Secteur minier : les attentes non assouvies refont surface dans l'est de la RDC

Mardi 25 Mars 2014 - 17:25

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Goma succède à Lubumbashi dans l’organisation de la deuxième conférence minière placée sur le thème de la « gestion durable et transparente des ressources naturelles dans le Congo post-conflit » mais si le Nord-Kivu revient sur la scène économique qu’il était forcé de quitter en raison du climat politico-militaire délétère, les questions essentielles demeurent encore sans réponses.

Restant égal à lui-même, le gouvernement de la République est une fois encore revenu sur la nécessité de doter le pays d’un secteur minier qui contribue davantage au budget de l’État, car les matières premières étant épuisables. À l’époque, Joseph Kabila, inaugurant la première conférence minière dans la capitale cuprifère, avait demandé un plan d’action clair et même un chronogramme pour la création d’industries capables de transformer localement les produits miniers pour la création d’emplois et de la valeur ajoutée. Rebondissant sur l'épineux problème de la compétitivité du secteur minier, Matata Ponyo, Premier ministre, a insisté à son tour sur la diversification des activités économiques pour le développement du pays sur des bases durables.

Une année après la première conférence de Lubumbashi, le ministère des Mines a évoqué quelques avancées au niveau « de la bonne gouvernance des ressources naturelles, de la concertation entre les services de l’administration et les secteurs miniers, de la mise en place d’unités locales pour la transformation des produits miniers et de la priorité accordée aux entreprises locales dans la fourniture des services ». Cette évaluation est jugée trop évasive faute de chiffres concrets, selon un analyste. Par contre, ce dernier a relevé l’absence à ce jour d’un Code minier révisé et d’une loi sur les Hydrocarbures. Alarmiste, il a déploré le fait que la RDC continue à naviguer à vue, sans une politique minière claire capable de répondre aux défis que les autorités congolaises se sont fixés.

Mais il y a aussi la réalité du terrain. Dans un avant-papier d’annonce de la diffusion prochaine du documentaire « Obama’s law », Jeune Afrique parle des effets pervers de la Loi américaine dans l’est de la RDC. Trois ans après, la Loi Obama, qui exige aux entreprises américaines de divulguer chaque année la provenance de leurs matières premières pour décourager l'exploitation illicite dans les zones en conflit, n’a pas produit les résultats escomptés. À ce jour, la société civile du Kivu s’inquiète des répercussions néfastes de la mesure dans les provinces de l’est où la quasi-majorité des activités socio-économiques tournent autour des mines.

Le secteur privé critique

Selon les milieux des affaires, les efforts de redynamisation de l’activité minière ne peuvent éluder la question fondamentale de la recherche en géologie, et surtout les capitaux à mobiliser dans un contexte de manque d’attractivité. Les autorités congolaises doivent garder également en vue la volatilité des cours des matières premières. En novembre 2013, l’on a observé, par exemple, une baisse des cours de l’or et du cuivre. Il est impérieux de mettre en œuvre des politiques qui tiennent compte de ce paramètre d’autant que 80% des investissements miniers en RDC sont étrangers.

Au-delà, il convient dès à présent de réfléchir sur un statut pour les informels, c’est-à-dire ceux qui n’évoluent ni dans le Code minier ni dans la Convention minière mais font perdre à l’État congolais des sommes faramineuses, ont-ils ajouté. La législation minière devrait être profondément réformée pour réduire la brèche ouverte "aux chasseurs des contentieux fiscaux", bien souvent "des fonctionnaires indélicats qui profitent des lourdes peines imposées aux sociétés minières pour gagner les primes". Selon la FEC, le Katanga a aligné à lui-seul 60% des contentieux, et la majorité de ceux-ci, soit environ 90%, concerne le secteur minier.

Dans le Kivu, il existe tout de même des expériences intéressantes et facilement exportables dans d’autres provinces. Lors des exportations des concentrés de coltan, d’étain ou de wolframite, il a été créé, avec le concours du gouvernement central, des comptes dans les deux Kivu et le Maniema pour les territoires d’où ont été extraits les minerais. Un pourcentage est retenu pour chaque quantité extraite, et versé dans un compte commun réunissant la FEC, le gouvernement provincial et la société civile.

En définitive, il ne revient pas à l’État congolais lui-même de changer les choses. À l’instar des diplomates étrangers venus nombreux à la deuxième conférence minière, les opérateurs miniers ont aussi le devoir de contribuer à l’amélioration de l’image du pays, en mettant en exergue leurs réussites.

Laurent Essolomwa

Légendes et crédits photo : 

Une vue de la ville de Goma