Sénégal : Human Rights Watch dénonce les violences sexuelles dans les collèges

Samedi 20 Octobre 2018 - 14:15

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Dans un rapport publié le 18 octobre, à Dakar, l’ONG américaine a indexé des abus dont les filles sont victimes dans les écoles secondaires, principalement de la part des enseignants et responsables des établissements concernés.

 

Le rapport de quatre-vingt-dix-huit pages, intitulé "Ce n'est pas normal : exploitation sexuelle, harcèlement et abus dans les écoles secondaires au Sénégale, documente les violations commises à l’encontre de filles par des enseignants et personnels des collèges.

Human Rights Watch (HRW) a constaté des cas dans lesquels des enseignants abusent de leur autorité pour obtenir des relations sexuelles, en échange d’argent, de bonnes notes, de la nourriture ou d’articles tels que des téléphones portables et des vêtements neufs.

« Le Sénégal a de manière louable reconnu que la violence sexuelle est un problème sérieux dans ses écoles mais de nombreux enseignants s’en tirent à bon compte alors qu’ils exploitent et harcèlent sexuellement leurs élèves, qui endurent de telles violations pour passer en classe supérieure », a déclaré Elin Martinez, chercheuse auprès de la division Droits des enfants au sein de HRW et auteure du rapport.

Cette ONG a, en outre, constaté que les établissements scolaires ne sensibilisent pas suffisamment les mineurs à la sexualité, la santé reproductive et leurs droits sexuels et reproductifs. Elle estime que le gouvernement devrait enfin adopter un programme complet d’éducation sexuelle, conforme aux normes internationales en vigueur, et garantir l’accès des jeunes à des services de santé répondant à leurs besoins.

« Le gouvernement sénégalais veut que les filles réussissent leur éducation. Mais il devrait pour cela mettre fin à la culture du silence qui recouvre les abus commis par des enseignants, encourager les filles à prendre la parole et adresser un message sans équivoque à tout le personnel éducatif, selon lequel la violence sexuelle vis-à-vis des élèves ne sera pas tolérée », a conclu Elin Martinez.

Des filles réduites au silence à cause des tabous

HRW a également eu des entretiens individuels et collectifs avec plus de cent soixante filles et jeunes femmes ainsi qu’avec une soixantaine d’autres personnes, parents, experts du champ éducatif, psychologues, activistes locaux, partenaires de développement et responsables gouvernementaux nationaux et locaux dans quatre régions du Sénégal.

L’ampleur et la prévalence des abus sexuels à l’encontre des élèves n’ont pas été déterminées. Les tabous et les stigmates sociaux ont réduit au silence de nombreuses filles et jeunes femmes victimes de ces pratiques. Des recherches effectuées par HRW, des agences des Nations unies, des organisations non gouvernementales et des universitaires suggèrent que les violences sexuelles et sexistes en milieu scolaire sont un problème grave au Sénégal.

Ces agissements sont une violation flagrante des obligations professionnelles et éthiques qui incombent aux enseignants et un crime au regard de la loi sénégalaise, lorsque les victimes sont âgées de moins de 16 ans.

Harceler des élèves à des fins sexuelles et abuser de son pouvoir et de son autorité sur un enfant, alors que l’on est enseignant, sont des crimes passibles de peines pouvant aller jusqu’à dix ans de prison.

Signalons que le gouvernement sénégalais a pris des mesures pour lutter contre la violence sexuelle et la discrimination sexiste dans les établissements scolaires, dans le cadre d’efforts plus larges visant à élargir l’accès des filles à l’enseignement secondaire et à les y maintenir.

En 2013, le gouvernement s’est doté d’une stratégie vigoureuse de protection de l’enfant. Grâce à un soutien international, il a œuvré à la réduction des grossesses précoces, notamment par le biais de programmes destinés à aider les filles à aller jusqu’au terme du cycle secondaire.

Yvette Reine Nzaba

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