Situation à la SNCC : l’Acaj recommande une enquête indépendante

Lundi 19 Mai 2014 - 16:45

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

 La recherche permettrait d’établir les responsabilités dans la mégestion qui caractérise cette société et l’acquisition des locomotives prises en leasing qui tombent régulièrement en panne et exposent les passagers à la mort.

La correspondance de l’Association congolaise pour l’accès à la justice (Acaj) adressée, le 16 mai, au Premier ministre l’a exhorté à initier une enquête indépendante en vue de relever les responsabilités dans la situation qui court au sein de la Société nationale des chemins de fer (SNCC) et dans laquelle la mort d’hommes se compte parmi les conséquences.

Pour l'Acaj, il s’agira également, en plus d’une évaluation de la gestion de cette entreprise, de voir clair sur la gérance de l’argent décaissé au profit de la société. « Elle [Acaj] constate que plusieurs fonds publics investis pour la [SNCC] redresser sont constamment dilapidés. Les droits des travailleurs y sont totalement bafoués au point que plusieurs d’entre eux meurent ou partent en retraite dans un dénuement poignant. L’absence de bon management du comité de gestion ne laisse nullement augurer de si tôt la reprise du trafic normal par cette compagnie ferroviaire », a déploré cette ONG. Pour l’association, « seule une enquête indépendante serait à même d’élucider l’affectation des 218 millions USD de Banque mondiale, 14 millions USD de la Banque africaine de développement et 30 millions USD de l’IDA ».

Des apports engloutis

L’Acaj relève, en effet, que, dès 2008, le comité de gestion en place depuis près de cinq ans a eu à bénéficier des aides de trente millions de dollars de la part de l’IDA, de quatorze millions provenant de la Banque africaine de développement (BAD) dont neuf millions cinq cent mille, pour l’achat des pièces de rechange et quatre millions cinq cent mille, pour le paiement du personnel. À en croire l’ONG, tous ces apports visaient la stabilisation de la société. Plusieurs autres millions de dollars, poursuit l’Acaj, ont été décaissés par le gouvernement de la République sous le Premier ministre Muzito. C’est notamment, a-t-elle expliqué, quinze millions de dollars déboursés entre 2009 et 2012 dont cinq millions deux cent mille, destinés à résorber la grève des travailleurs impayés pendant des longs mois et quatre millions, pour couvrir douze mois d’arriérés des salaires des pensionnés non logés de 2008, montant dont le solde reste injustifié jusqu’à ce jour.

L’ONG met également dans la même optique de stabilisation de SNCC les trois millions cinq cent mille USD remis à son staff dirigeant pour couvrir la paie du personnel au mois d’avril 2011, et les deux millions USD destinés à l’achat de deux locomotives de ligne et deux moteurs pour bateaux et la réhabilitation de deux barges. Alors que pour couronner ses efforts, le gouvernement a apporté quatre millions cinq cent mille USD à la trésorerie de cette société en vue de l’aider à assurer la paie des mois de septembre et octobre 2010.

L’Acaj a également noté qu’en interne, dans les entrefaites, la SNCC a dû générer pendant cette même période, ses propres ressources évaluées à un million huit cent mille USD provenant de l’hypothèque de son immeuble se trouvant sur l’avenue Kamanyola, dans la commune et ville de Lubumbashi. Alors que la Banque mondiale s’est signalée avec deux cent dix huit millions de dollars pouvant couvrir dix-huit mois de prise en charge en carburant, eau et électricité, acquisition des traverses ainsi que plusieurs autres retro-financements.

Serrer la ceinture

Cette association a aussi relevé que, par souci de redynamiser leur entreprise nécessitant un second souffle, les travailleurs ont dû consentir des sacrifices énormes en renonçant au besoin à plusieurs de leurs avantages vitaux. Ils ont notamment accepté, note-t-on, l’archivage de leurs arriérés des salaires de 2010, et se sont imposés de travailler sans qu’il y ait une structure de soubassement pour leurs traitements. En outre, ces agents et cadres ont accepté de toucher le salaire calculé au taux de 550 FC le dollar au lieu de 900 FC, tandis que l’employeur décidait unilatéralement la suppression de plusieurs autres avantages, parmi lesquels le paiement de l’indemnité d’attente pourtant consignée dans la convention collective, l’amputation des montants payés aux pensionnés, etc. « Au contraire, sous prétexte de bien gérer les aides remises par les partenaires internationaux, la SNCC connaît un comité de gestion doté des mandataires venus d’ailleurs avec un groupe de collaborateurs tous surpayés, et ce au moment où les pauvres agents alignent des mois et des mois d’arriérés des salaires », a regretté l’Acaj.

Après une observation attentive, l’Acaj note que le trafic ferroviaire de la SNCC est en chute libre constatée par la réduction sensible de la vitesse du train à 10 kms au lieu de 20 à 25 comme en 2008, entraînant une chute drastique des recettes. Pour cette ONG, le parcours moyen du train s’étale jusqu’à trente-cinq jours au minimum en aller-retour Lubumbashi-Ilebo ou Lubumbashi-Kindu, là où on en mettait sept, avec comme conséquence, le mauvais délai d’acheminement des marchandises (au moins vingt jours), et les incidents de circulation du train se multiplient exagérément (caténaires et rails cassés, déraillements, etc.). C’est donc pour permettre le diagnostic et traiter les problèmes qui se posent au sein de cette société que l’Acaj a conseillé cette enquête indépendante.

Lucien Dianzenza

Légendes et crédits photo : 

Inauguration des locomotives de la SNCC