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Une place pour trente-six

Samedi 8 Septembre 2018 - 19:15

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L’Ile de Madagascar, sur l’océan indien, a l’habitude des gros chiffres. Surtout quand il s’agit de la course au fauteuil présidentiel. Pour le scrutin prévu le 7 novembre, ils seront ainsi trente-six candidats à briguer le poste qu’occupe Hery Rajaonarimampianina, élu en 2013, qui est lui-même en lice pour sa propre succession. Comme par délit d’habitude, il faut rappeler qu’en 2013, le seuil de la trentaine de rivaux avait aussi été dépassé, puisqu’ils étaient au total trente-trois postulants. On dit la Grande Ile, donc peut-être aussi de grandes concurrences, de grandes ambitions.

Comparée à la présidentielle d’il y a cinq ans, celle de cette année a la particularité de relancer la bataille de la place entre anciens chefs d’Etat. Parmi eux, Didier Ratsiraka, 82 ans, qui exerça la fonction suprême dans son pays de 1975 à 1993, puis de 1997 à 2002 ; Marc Ravalomanana, né le 4 décembre 1949, président de Madagascar de 2002 à 2009, ou encore Andry Rajoélina, 44 ans, qui fut président de la Haute Autorité de transition, de fait chef de l’Etat de 2009 à 2014, après le coup d’Etat qu’il orchestra contre Ravalomanana. Avec eux, cela a été dit, le président sortant, qui sollicitera les suffrages de ses compatriotes après avoir fêté la veille, ses soixante-deux ans d’existence.

À l’issue du premier tour qui sans doute ne donnera pas de vainqueur vu le nombre vertigineux de candidats, les Malgaches devront retourner aux urnes, le 19 décembre, pour départager les deux « chanceux » arrivés en tête. Comme cela se passe sous d’autres cieux, on assistera soit au report des voix des malheureux sur le candidat de leur choix, ou bien au désistement sans consignes des uns et des autres. On pourrait également, c’est aussi l’une des caractéristiques des scrutins sur le continent africain et sa grande île, entendre les perdants crier à la fraude, aux dysfonctionnements généralisés du processus tout court.

Avant de se porter candidat, le président Rajaonarimampianina a été confronté en début d’année à des manifestations de rue durant lesquelles l’opposition réclamait sa démission. La contestation portait en gros sur les lois électorales jugées inadaptées par les contradicteurs du chef de l’Etat. Le raidissement des positions était tel qu’on redoutait l’intervention de l’armée dans le processus politique. Cela n’a pas été le cas et les choses, au dernier moment, sont rentrées dans l’ordre, permettant d’espérer une compétition électorale ouverte, où le meilleur devrait l’emporter sans que cela provoque des typhons sur l’Ile.

On a souvent invoqué le libre choix des électeurs comme l’un des moments fondateurs de la démocratie quand le peuple doit décider de qui doit conduire ses destinées. Les Malgaches ont donc le choix entre trente-six de leurs compatriotes qui expriment chacun l’engagement de rendre la vie prospère, de mieux écouter leurs doléances et de les tirer de la misère. Ils auraient été une demi-dizaine, une demi-douzaine, le choix serait néanmoins aisé. À trente-six, ils vont tous donner le tournis à ceux qui décideront de leur avenir politique dans l’immédiat et dans le futur.

Heureusement, et cela les candidats eux-mêmes, ainsi que les potentiels électeurs en sont conscients : il y en a qui se positionnent à l’élection présidentielle pour du vrai, d’autres pour espérer ensuite monnayer leur pourcentage, d’autres encore pour de la pure forme. Ainsi va la démocratie.

 

Gankama N’Siah

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