Union européenne : l'aide au développement nourrit des débats à Bruxelles

Jeudi 6 Novembre 2014 - 11:00

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Le Nouveau commissaire européen en charge du Développement, Neven Mimica, qui espère redonner espoir à la politique de développement de l’Union européenne (UE) rencontre beaucoup de détracteurs.

C’est le cas du spécialiste de l’aide au développement du parti de gauche au Bundestag allemand, Niema Movassat, qui pense que « Mimica n’a pas grand-chose à dire ». Il considère qu’il est « en bas de l’échelle de la commission. Et que  l’aide au développement sera comme toujours reléguée au second plan face à la politique commerciale libérale et une politique étrangère basée sur l’action militaire ».

De l’avis de certains spécialistes, le problème réside dans la nouvelle structure de la Commission pensée par le nouveau Président Jean-Claude Junker qui prévoit de confier plus de pouvoirs aux vice-présidents. Ainsi, « la politique de développement tombera aux oubliettes », prédit Niema Movassat.

On sait aujourd’hui que, désormais, une grande partie du portefeuille du développement sera sous la responsabilité de la Haute Représentante de l’Union, Federica Mogherini.  La directrice du bureau d’Oxfam à Bruxelles, Natalia Alonso estime que cela pourrait poser problème. La politique de développement du l’UE risque donc « d’être instrumentalisée et utilisée dans l’intérêt de la politique étrangère ». Toutefois, les ONG se félicitent que le nouveau commissaire en charge du Développement ait conscience des difficultés liées à cette nouvelle structure « obligé de faire avec ce qu’il a ».

Lors de son audition, Neven Mimica avait indiqué que l’un des aspects fondamentaux de son mandat serait la cohérence politique, souhaitant travailler en étroite collaboration avec les commissaires chargés de la politique étrangère, du commerce et de l’aide humanitaire ; et de soumettre chaque proposition législative à une évaluation de qualité en terme de politique de développement. Oxfam  estime que l’instauration de ce genre d’évaluation est nécessaire et urgente, surtout dans des cas comme la conclusion d’un accord international sur l’évasion fiscale, par exemple. En effet, les pays en développement perdent tous les ans des dizaines de milliards d’euros qui devraient leur revenir sous forme de taxe et être utilisés pour combattre la pauvreté. À côté de  l’ampleur de l’évasion fiscale, « nos fonds de développement font pâle figure » d’après Natalia Alonso qui pense que le commissaire en charge du Développement devrait également s’impliquer dans les politiques environnementales et climatiques.

2015 a été déclaré « année européenne du développement ».  Une année durant laquelle l’UE espère informer ses citoyens en matière de politique de développement. Et à la fin de l’année, la communauté internationale est appelée à se mettre d’accord sur un programme de développement post-2015. Le commissaire a déclaré qu’il soutiendrait des objectifs universels avec « un équilibre optimal » entre les besoins  sociaux et écologiques de l’humanité. La lutte contre la pauvreté doit rester une des priorités de l’UE, et les États doivent augmenter leur aide financière au développement. Pour ce faire, il faut créer des modèles de financements innovants, notamment la Taxe sur les transactions financières (TTF) ou une coopération plus étroite ave le secteur privé, par exemple.

Neven Mimica plaide également pour le renouvellement de l’accord de Cotonou qui lie l’UE aux pays ACP (Afrique, Caraïbe et Pacifique), qu’il considère comme une priorité.  Signé en 2000, cet accord devrait prendre fin en 2020. Il estime que la collaboration avec ces pays devrait alors être adaptée aux nouvelles réalités du programme d’après-objectif du Millénaire.

Tobias Khaler, de l’ONG One voit plutôt d’un bon œil l’intention du nouveau commissaire d’affronter des sujets comme la pauvreté, la santé, la sécurité alimentaire, la transparence de l’aide au développement, ou une meilleure collaboration avec la société civile. La performance du nouveau commissaire dépendra à présent de sa capacité à convaincre les chefs d’État et de gouvernement et de promouvoir des objectifs ambitieux, susurre-t-on à Bruxelles.

Pour Karin Sohet de l’ONG Aprodev, c’est un enthousiasme prématuré, estimant que Neven Mimica « a été interrogé de manière superficielle par le Parlement. Il ne possède aucune vision pour le développement », considérant que jusqu’ici, il n’a fait que répéter ce qui figure dans le programme pour le changement de la Commission européenne.

Noël Ndong