Vérité des urnes : Martin Fayulu de plus en plus isolé

Mercredi 23 Janvier 2019 - 13:02

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

La marge de manœuvre est en train de se rétrécir au fil des jours pour le candidat malheureux de la coalition « Lamuka » à la présidentielle du 30 décembre, dans sa volonté de faire bouger les lignes face à une situation de fait, à savoir la victoire électorale de Félix Tshisekedi.

L’opposant continue, malgré tout, à revendiquer sa victoire électorale et entend concrétiser, selon lui, la volonté du peuple congolais exprimée dans les urnes le 30 décembre 2018 à travers une lutte politique accrue dont il se fait, d’ores et déjà, le porte-étendard. « Qui veut arrêter l’installation de la démocratie au Congo ? Si la volonté du peuple congolais exprimée le 30 décembre 2018 ne se matérialise pas, comment est-ce que ce même peuple pourra faire confiance aux élections ? », avait-il twitté au lendemain d’un meeting raté du 21 janvier qu’il voulait tenir au siège de l’Interfédéral du Mouvement de libération du Congo (MLC), un parti partenaire au sein de la coalition Lamuka. En fait, c’est un Martin Fayulu transfiguré, déterminé et prêt au sacrifice suprême pour défendre ce qu’il pense être une juste cause qui s’offre aujourd’hui à l'opinion.

Alors qu’une poignée de ses partisans tenus en respect par les éléments de la police l’attendait au siège provincial du MLC, il a préféré faire la ronde de quelques quartiers de Kinshasa pour rencontrer ses autres sympathisants, preuve qu’il est loin de lâcher du lest dans son combat pour le rétablissement de la vérité des urnes. Un combat qu’il est censé mener désormais avec quelques inconditionnels, en plus de ses deux principaux soutiens, Jean-Pierre Bemba et Moïse Katumbi, desquels il est censé recevoir des directives. La communauté internationale sur laquelle il misait tant pour l’accompagner dans cette bataille l’a finalement lâché. L’Union européenne (UE), la France, la Communauté de développement d'Afrique australe, l’Union africaine (UA), etc., ont, en effet, fait volte-face en prenant acte de la victoire de Félix Tshisekedi désormais auréolé par une reconnaissance internationale de plus en plus expressive.

« Seul président légitime » autoproclamé, Martin Fayulu apparaît de plus en plus isolé et son discours, séduisant au début, semble ne plus captiver une conscience internationale ayant préféré jouer la carte de la résignation face à l’évidence. Alors qu’il y a quelques jours encore, l'UE faisait part de ses « doutes sérieux » sur ces résultats, elle s'est alignée finalement sur la position de l'UA.

L’Eglise, la rue et après ?

Loin de s’avouer vaincu, Martin Fayulu sait qu’il lui reste un bon coup à jouer en s’alliant notamment à l’Eglise catholique dont il espère une forte mobilisation populaire. À défaut des soutiens diplomatiques, il sait qu’il peut compter sur l’Episcopat catholique mais également sur la rue qui, à tout moment, peut gronder dans l’espoir d’inverser la tendance. Martin Fayulu a-t-il la capacité de mobilisation digne des grands opposants, lui qu’une certaine opinion a toujours considéré comme une création virtuelle, sans réel ancrage sociologique ?

L’échec récent de son appel à la ville-morte ne constituait-il pas un signe prémonitoire au combat d’arrière-garde,  lassant et laborieux qu’il s’apprêtait à engager dans un contexte social marqué par la renonciation collective à la violence ? Malgré les doutes, une partie de l’opinion congolaise se satisfait du départ de Joseph Kabila et surtout de l’avènement d’un opposant à la tête du pays. Martin Fayulu ou Félix Tshisekedi, peu importe pour cette opinion locale pour autant que l’alternance tant attendue se soit matérialisée.

Entre la reconnaissance de sa défaite électorale et la poursuite de son combat pacifique pour la récupération par le souverain primaire de sa « victoire volée », Martin Fayulu a opté pour la seconde option. Logique en lui-même, il exclut toute participation à un gouvernement d’union nationale malgré la main qui lui est tendue par Félix Tshisekedi et les appels à la cohésion des Etats et organisations internationales. Il s’est, d’ores et déjà, forgé une stature d’opposant direct à Félix Tshisekedi, ou mieux, de chef de file d’une opposition multiforme qu’il devra piloter, avec tout ce que cela implique en termes d’énergie, de stratégie et de mobilisation. Ce qui ne sera pas une partie de plaisir.

Avec plus de soixante sièges pour Lamuka et son statut de second à la présidentielle selon la Cour constitutionnelle, il sait qu’il peut espérer peser à la future Assemblée nationale, même si plusieurs observateurs pointent déjà le risque d’un éclatement de cette coalition en cette période de tractations autour de la prochaine majorité. Les prochains jours nous en diront davantage sur l’avenir politique du coordonateur de la Dynamique de l’opposition et président du parti Engagement pour la citoyenneté et le développement.  

Alain Diasso

Notification: 

Non