Wendy Bashi : « J’avais envie de raconter le Kivu autrement »

Lundi 4 Mai 2015 - 14:00

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Wendy Bashi est journaliste freelance basée à Bruxelles. Elle  vient de réaliser « Rumeurs du lac », un documentaire sur les mythes et les légendes liés au lac Kivu. Entretien. 

Les Dépêches de Brazzaville : Quel est votre parcours académique et professionnel ?

Wendy Bashi : Je suis diplômée en information et communication de l'université de Liège.  À ce diplôme s'ajoute un brevet en « Making TV News » obtenu à l'issue d'une formation chez Thomson Reuters en Angleterre. En 2009, au sortir de mes études, j'ai directement commencé à travailler au Cirtef, en tant que journaliste pour deux émissions diffusées sur TV5Monde et la RTBF. Il s'agit de « Reflets Sud » et « Afrique Plurielle ». En 2011, j'ai travaillé pendant six mois comme chargée de production pour le Cirtef. Mon travail consistait à fournir du contenu dans les rubriques « Long métrage », « court métrage » et « documentaire » de TV5Afrique. Une fois mon contrat achevé, j'ai fait un bref passage à l'agence interne de la RTBF liée directement à la newsroom. Au terme de ce contrat, je me suis rendu compte qu'il me manquait des cordes à mon arc. J'ai donc décidé d'aller faire un stage à la Voix de l'Amérique (VOA) aux USA. J'y ai fait mes preuves au département « Swahili ». À mon retour des États-Unis, je suis allée à Londres pour obtenir un brevet chez Thomson Reuters en « Making TV News ». Après Thomson Reuters, j'ai travaillé pendant deux ans et demi pour l'agence de presse « Infosud ». En fin 2013, j'ai été prise comme journaliste correspondante pour les magazines « Amina » et « Enjeux Africains », tous deux basés en France. La même année, j'ai également commencé à collaborer avec le magazine « Afrik'Hebdo » diffusé sur les ondes de la RTBF International et sur la Première tous les samedis.

LDB : Qu’est-ce qui vous motive et vous passionne dans votre métier de journaliste ?

WB : Je me considère comme une éternelle étudiante. J’apprends tous les jours dans ce métier. Je traite  chaque sujet avec une soif d'apprendre. Une fois le sujet bien compris, cerné et appris, je suis en mesure de le relayer auprès de mon lectorat.

LDB : Qu’est-ce qui vous a poussé à réaliser votre dernier film « Rumeurs du lac » ?

WB : Rumeurs du lac est la suite de mon mémoire de fin d'études. J'ai réalisé un travail sur le rôle que peut jouer un lac transfrontalier dans une zone où l'on trouve deux pays voisins avec des relations en dents de scie. Ensuite, ayant grandi au bord du lac, j'avais été bercée par toutes les histoires que renferme le lac Kivu. Je me suis dit que ce serait une bonne idée de les raconter. À toutes ces motivations s'ajoute l'envie de raconter le Kivu autrement que la manière dont il est actuellement raconté dans les médias depuis une vingtaine d'années. Il s’agit de proposer une autre histoire du Kivu, proposer un véritable contrepoint, un autre discours et attirer l'attention du monde sur le fait qu'il y a une autre réalité du Kivu que celle que l'on connaît.

LDB : Comment avez-vous vécu cette expérience ?

WB : Ça n'a pas été une expérience facile. « Rumeurs du lac » est mon premier documentaire et comme toutes les premières expériences, on est heureux d'entreprendre quelque chose de nouveau. Mais à cela s'ajoute un constant sentiment d'insécurité et de remise en question. Je ne savais pas comment m'y prendre mais je savais que je voulais réaliser un documentaire. J'ai eu la chance d'être bien entourée et d'avoir mon père à mes côtés quand j'ai commencé. Aujourd'hui il n'est plus là... À chaque fois que j'ai douté pendant le tournage, je me suis dit que je devais le finir pour lui. Raison pour laquelle je lui ai dédié le film. Au final, ce fut une belle expérience que j'ai envie de renouveler dès que possible.

LDB : Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?

WB : Pour le moment, je me consacre à faire parler de « Rumeurs du lac » et en marge de sa sortie, je continue mes activités de tous les jours, à savoir Reflets Sud, Afrique Plurielle, Amina, Enjeux Africains et Afrik'Hebdo.

LDB : Quel regard portez-vous sur le rôle de la femme africaine dans le cinéma ?

WB :Tout dépend de l'angle d’analyse. S'il s'agit des femmes réalisatrices, je suis fière du travail accompli par mes aînées. J'admire beaucoup le travail des personnes comme Angèle Diabang, Monique Phoba ou encore Katy Lena Ndiaye. Ce sont des femmes qui nous racontent des histoires via la caméra avec leurs sensibilités, sans entrer dans une surenchère de clichés. Je suis fière de leur travail et fière qu'aujourd'hui l'Afrique puisse se raconter seule par des voix de l'intérieur. J'espère qu'il y aura de plus en plus de voix qui s'élèveront des entrailles du continent pour raconter d'autres histoires. S'agissant des femmes comédiennes, là aussi je suis contente et fière des comédiennes que je croise de part mon métier. Cependant, pour celles qui évoluent en occident, le chemin est encore long et pas simple. J'espère voir de plus en plus de comédiennes d'origine africaine jouer des rôles élogieux et pas seulement des rôles qui les enferment dans une certaine catégorie. Je rêve du jour où on proposera à une comédienne un rôle non pas uniquement pour sa couleur de peau et tout le fantasme que cela peut renfermer, mais tout simplement parce que c'est une bonne comédienne.

Patrick Ndungidi

Légendes et crédits photo : 

Wendy Bashi