Women without borders : plaidoyer pour améliorer la position de la femme en Afrique

Samedi 12 Avril 2014 - 15:45

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Les peintures, qui occupent la salle d’exposition de la Halle de Gombe, ont en partie pour fil conducteur le besoin explicite de la femme « multifonctionnelle » à ne pas être perçue seulement comme mère faisant valoir ses capacités à s’assumer en tant que leader ou acteur dans la société au même titre que l’homme.

Les tableaux à l’acrylique, à l’huile et en papier mâché valent le coup d’œil. Songi songi, une illustration des conciliabules auxquels se plaisent d’ordinaire les enfants avec leur mère se présente comme une invitation cordiale à l’entrée. À l’instar de Pendeza Pelinda, Tabitha wa Thuku met aussi la génitrice en scène dans Twin parade in green (double parade en vert).Ici, on la voit prendre soin de son « nouveau-né tout en tressant sa fille plus âgée et lui montrant comment (se) coiffer ». Pendeza Pelinda revient encore sur ce thème dans La Solitude alors que Safina Kimbokota l’effleure dans Land ownership (appartenance à la terre).

Gardienne du foyer dont elle prend soin au quotidien, la femme aspire à jouer aussi d’autres rôles. Et comme le témoigne Stacey Gillian dans ses Fragments of society (fragments de la société) : « De notre existence à nos actions, il faut se battre pour vivre et être reconnu » reste à garder à l’esprit que « le combat pour s’améliorer est mondial », poursuit-elle. Pour sa part, le tableau en papier mâché « exprime la manière dont les femmes sont accueillies dans la société », comme des « fragments ».

Si Crista Uwase nous donne une version de sa vie en papier et colle au travers de son collage de pages de papiers journaux et de revues titré My life in paper (ma vie en papier), c’est qu’elle a décidé de dire de la sorte un profond ressenti. La Rwandaise affirme  : « les femmes n’ont jamais eu de vraie place dans le monde de la création et nous savons que ça reste un monde réservé aux hommes ». L’on lit comme une sorte de tristesse dans ses propos lorsqu’elle ajoute : « Nous ne sommes nulle part dans l’histoire de l’art et peu importe nos efforts, nous ne sommes pas reconnues et même parfois ignorées... ». Mais il est clair qu’il ne faut pas y voir de l’abattement. Bien au contraire, elle pense que Women without borders constitue une belle opportunité de manifester le savoir-faire de la gent féminine. Et Crista Uwase de l’exprimer de la sorte : « Pour moi, une femme sans frontière est un passage opportun que nous devrions prendre pour découvrir les faces cachées de la créativité féminine qui n’a jamais vu le jour ».

Qui gouverne le monde ?

Mais encore, le leadership est souvent affaire d’hommes dans le monde non pas que la femme ne sache pas s’y faire mais qu’elle se trouve, quoique le succès du discours sur le genre soit relégué au second plan assez souvent encore en Afrique. Aussi, quand Anne Mwiti en vient à se demander Who rules the world ? (Qui gouverne le monde ?), sa peinture se veut évocatrice de bien de réalités. Il y est notamment question de « l’égal accès aux ressources, le rôle des femmes dans le développement économique et dans le management des ressources globales ». Par ce biais, elle laisse entendre que « le moment est venu pour les femmes de jouer un rôle dans les décisions de gouvernance ». Un impératif qui s’impose à elles dans leurs sphères d’action, un exercice à faire en toute conscience en tant que « femme, mère, épouse, collègue, amie, sœur » et vu que tous les espoirs sont permis, « pourquoi pas comme prochaine présidente ? ».

Safina Kimbokota trouve également son mot à dire dans ce propos. Dans Land ownership (appartenance à la terre), elle présente les femmes en zones rurales quitte à s’insurger du fait que la plupart d’elles en Afrique dépendent du travail agricole pour survivre sans droit de possession de terrain. « Elles doivent travailler avec ce fardeau subissant en même temps le rejet de la communauté rurale ». Sa récrimination s’accompagne d’une affirmation : « Quand les droits sur la terre seront sécurisés le cycle de la pauvreté sera stoppé ».

Pour sa part, un peu en écho aux deux œuvres précédentes, Maria Naita choisit de mettre « la femme au centre de l’environnement social, économique et religieux » dans une de ses toiles sans titre. La vie y est présentée au travers « des yeux d’une femme active convaincue qu’il y a un meilleur moyen pour mettre en valeur l’héritage et l’écriture ». Elle partage sa lecture personnelle de cette toile en ses termes : « Ceux qui s’aiment partent, voyagent loin et nous font attendre avec espoir et amour. Ainsi, ceux qui restent travaillent dur : c’est ce qui fait que la femme active est un pilier dans notre environnement ».

Nioni Masela

Légendes et crédits photo : 

Songi songi, toile de Pendeza Pelinda vue à l’entrée de l’exposition