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Le déficit d'enseignants

Lundi 30 Septembre 2013 - 9:11

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Le chiffre communiqué par les experts du secteur, à l’orée de la rentrée scolaire 2013-2014, est hallucinant : 14 000 enseignants manquent pour rendre l’école réellement agréable dès le 1er octobre. Il est évident, quelles que soient les dispositions que les pouvoirs publics prendront, que ce gros déficit ne pourra être comblé avant la rentrée des classes. Ce qui veut dire que cette année encore les mêmes causes produiront les mêmes effets.

De la maternelle au secondaire, ceci devenant la chose la mieux observée, les classes seront bondées d’apprenants pour très peu d’instituteurs et de professeurs. Dans ce que l’on appelle les coins de brousse, d’autres écoles seront peut-être fermées toute l’année pour les mêmes raisons. Sans oublier qu’en dehors des 14 000 enseignants recherchés, que l’on ne trouvera pas, ceux qui sont, en revanche, régulièrement inscrits, régulièrement affectés, régulièrement rémunérés et avancés, ajouteront au déficit.

Il ne s’agit pas d’une situation qui concerne tous les enseignants, mais certains d’entre eux qui passent souvent le plus clair de leur année de travail entre leur ville de résidence et leur lieu d’affectation. Et pour cause. Dès l’ouverture des classes, ils se signalent à leur établissement, se font délivrer la note de prise de service, prennent contact avec leurs élèves une semaine, puis demandent et obtiennent une permission d’absence. Ils « sèchent » parfois le mois entier, parfois le trimestre entier, parfois toute l’année.

À Brazzaville, où ils affluent, ces hommes et ces femmes à qui incombe la lourde responsabilité de former l’élite de demain, ont un tas d’arguments pour expliquer leur comportement. La plupart disent être derrière un dossier de reclassement rangé au placard par la lourde machine administrative ; ils ont souvent de la peine à toucher leur salaire dans le lointain coin du Congo où ils sont en poste ; ils ont des ennuis de santé qui ne peuvent trouver de remèdes qu’en ville…

Enfin, d’autres ne souhaitent pas rester longtemps hors des officines de la trépidante Brazzaville où, pour tout dire, ils sont en contact assidu avec un cousin récemment promu à une haute fonction qui voudrait en faire son « dirpro » (directeur du protocole). D’autres encore attendent un changement de carrière après avoir satisfait au concours ouvrant les portes d’un ministère plus « traiteur ».

Si l’on ajoute à ces raisons plus ou moins objectives d’autres plus ou moins de même nature portant sur le manque chronique de tables-bancs et de matériels didactiques dans certains établissements, la précarité des structures d’accueil, l’épineux problème du transport dans l’hinterland, le déficit enseignant que l’on déplore à juste titre peut ressembler à un glissement de terrain sans fin, une érosion de tous les instants susceptible d’emporter l’école elle-même. Cela pour dire que le problème restant entier, les solutions les plus viables viendront rarement du seul constat dressé tous les ans sur « la baisse du niveau scolaire ».

Peut-être devrait-on, en soldant le contentieux empoisonnant des avancements et arriérés de salaire, des reclassements et autres primes allouées aux enseignants, explorer à nouveau, et en profondeur, l’idée jusque-là en chantier de la mise en place progressive d’une fonction publique territoriale.

Envisagée dans le cadre d’une décentralisation audacieuse, l’affaire n’arrangerait pas seulement le corps enseignant, lequel, comme d’autres dans la grande administration publique aujourd’hui, brandit au moindre malentendu la pancarte d’avis de grève qu’il porte en sous-main.

Gankama N’Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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