Cocasse !

Étonnant, pour ne pas dire cocasse, est l’emballement politique, diplomatique et médiatique planétaire qui accompagne les dernières révélations concernant l’espionnage auquel se livrent les services de renseignement américains. Cocasse pour au moins trois raisons dont chacune devrait, en bonne logique, susciter une franche hilarité, mais également une grande inquiétude.

Première raison : tout le monde sait et depuis fort longtemps que les grandes puissances surveillent, ou plus exactement tentent de surveiller, le monde qui les entoure. Cette paranoïa n’a rien de nouveau même si les techniques modernes lui donnent une dimension jamais observée jusqu’à présent. Elle est ancrée dans le cerveau des puissants de la planète et rien ne la fera disparaître quelles que soient les promesses de ceux qui s’y livrent. Prisonniers des administrations qui les entourent, les dirigeants n’ont dans ce domaine qu’une liberté très réduite.

Deuxième raison : espionner est chose aisée dès lors que l’on a les moyens financiers et techniques nécessaires ; mais en revanche, analyser, interpréter, comparer, se projeter en avant est une tout autre aventure dans laquelle les puissances concernées se montrent dangereusement incompétentes. Les « grands » accumulent, certes, des milliards de données, mais s’avèrent incapables de les ordonner pour agir efficacement. En témoigne leur incapacité à lutter efficacement contre le terrorisme.

Troisième raison : l’incroyable gaspillage d’argent et de moyens que nécessite l’espionnage généralisé auquel se livrent les « grands » ne peut que provoquer à terme des dérapages en série. Exactement comme les drones dans les zones de combat causent la mort de civils bien plus que de combattants, ce gaspillage génère des erreurs d’interprétation qui aggravent le mal contre lequel il est censé lutter. Il instaure par ailleurs au plan planétaire une suspicion, une méfiance réciproques porteuses de graves dangers.

Dans cette affaire comme dans bien d’autres, mieux vaut se fier aux ressources de l’esprit humain plutôt qu’à la technique. Espérons que les « grands » le comprendront avant que la situation ne dérape et ne les enferme dans une impasse dramatique.