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Corriger enfin les dérives de l’Histoire

Lundi 11 Novembre 2013 - 0:23

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Si l’on ne réécrit pas l’Histoire, on peut du moins en corriger les fautes, les dérives, les crimes. Aussi les nations qui se rendirent au fil des siècles coupables de tels abus envers l’Afrique doivent-elles se préoccuper aujourd’hui d’en réparer les effets en participant enfin activement à l’émergence du continent.

Deux agressions étrangères, commises entre le moment où les pays européens se dotèrent de moyens de transport suffisants pour se déplacer et la deuxième moitié du vingtième siècle, ont empêché le continent de se développer comme il aurait pu le faire. La première fut la traite négrière qui permit aux Arabes et aux Européens de s’enrichir en déportant des millions d’Africains noirs dans des conditions atroces et qui dura près de cinq siècles. La deuxième fut la colonisation qui permit aux Européens de mettre en coupe réglée les peuples de l’ensemble du continent et qui dura, elle, plus d’un siècle.

Ces deux agressions, sur lesquelles on est encore loin d’avoir tout dit, ont morcelé les ethnies qui s’étaient implantées au cours des siècles sur des territoires définis, ont du même coup empêché les peuples africains de construire des États cohérents, ont favorisé le pillage des ressources naturelles de leurs terres, ont maintenu les populations dans un état de misère qui bloquait toute évolution, et ont rendu leurs classes dirigeantes dépendantes de capitales lointaines. Elles sont bien à l’origine des difficultés que rencontrent aujourd’hui les pays africains.

Même si l’Europe, en ce début de vingt et unième siècle, refuse toujours de l’admettre, c’est bien la traite négrière, du quinzième au dix-neuvième siècle, et la colonisation, consacrée par la Conférence de Berlin en 1884-1885, qui sont responsables des problèmes auxquels se heurte aujourd’hui encore le continent. La première a décimé les peuples vivant au sud du Sahara, la deuxième a divisé ces mêmes peuples en créant des frontières artificielles que la recherche de la stabilité a rendues intangibles après l’accession des pays africains à l’indépendance.

Pourquoi rappeler, ici et aujourd’hui, ces réalités ? Parce que, même si cela ne sera sans doute jamais dit de façon aussi brutale au plan officiel, c’est bien elles qui sous-tendront les débats à venir entre l’Afrique et l’Europe. À commencer, bien entendu, par le « sommet » de l’Élysée, les 6 et 7 décembre, qui réunira à Paris une quarantaine de chefs d’État pour débattre de la sécurité et du développement.

Qu’elle le veuille ou non, l’Europe est responsable du sous-développement de l’Afrique. Et si elle continue de le nier, elle finira par payer au prix fort son inhumanité passée comme le montre la vague migratoire qui la frappe de plein fouet et qui prendra vite pour elle des proportions dramatiques si elle ne se préoccupe pas de rendre aux peuples africains ce qu’elle leur a volé au fil des siècles.

Que l’on nous comprenne bien : ce n’est pas la « repentance » que les nations du continent attendent, mais une participation réelle, concrète, massive de l’Europe à son émergence. À une coopération fantôme qui tient plus du discours que de l’action, des images que du réel, les peuples du Sud veulent substituer un appui financier, technique, commercial, culturel qui leur permettra d’accélérer leur marche vers le développement durable.

Voyons si les chefs d’État présents à Paris dans trois semaines oseront dire à l’Europe ses quatre vérités en se servant comme intermédiaire de la France qui les convie à débattre sur l’avenir.

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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