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« Le Monde » et le Congo : droit de réponse

Lundi 13 Janvier 2014 - 0:01

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Ce n’est, bien sûr, qu’une péripétie dans la longue, très longue, bataille que le Congo livre pour faire respecter au plan international les jugements rendus par ses tribunaux, mais elle est hautement symbolique. Jugez-en.

Le 22 août 2013, en violation de toutes les règles du droit international, le général Norbert Dabira était interpellé en France, puis mis en examen et placé sous contrôle judiciaire pour « crimes contre l’humanité » par un juge d’instruction du tribunal de grande instance de Paris. Motif de cette arrestation arbitraire : le rôle qu’aurait joué cette personnalité congolaise dans l’affaire dite « des disparus du Beach », affaire jugée en 2005 au Congo à l’issue de laquelle le général avait été acquitté ainsi que quatorze autres hauts responsables congolais.

Rendant compte de cette arrestation, le quotidien Le Monde, dont la notoriété n’est plus à faire, s’est permis, quatre jours plus tard, de publier dans ses colonnes et de mettre simultanément en ligne sur internet un article virulent qui qualifiait de « mascarade destinée à innocenter les quinze accusés du massacre du Beach » l’arrêt rendu par la justice congolaise.

Relevant le caractère diffamatoire d’un tel propos, l’ambassadeur du Congo en France, Henri Lopes, a aussitôt adressé au quotidien un « droit de réponse » dans lequel il écrivait notamment : « Au terme de l’article 692-t du code de procédure pénale français, aucune poursuite ne peut être exercée précisément en matière de crimes contre l’humanité ou de torture contre une personne justifiant qu’elle a été jugée définitivement à l’étranger pour les mêmes faits. Il ne suffit donc pas de rapporter le propos d’un avocat de la partie civile, qui ne s’est pas rendu à Brazzaville et qui n’a donc rien connu du procès, pour qualifier l’arrêt de la cour criminelle de Brazzaville de “mascarade”. La République du Congo entend faire respecter par les autorités judiciaires françaises sa souveraineté et l’honneur de ses tribunaux. »

Comme on pouvait s’y attendre, étant donné la façon dont ses journalistes rendent généralement compte des événements qui se déroulent au Congo, la direction du Monde a refusé de publier cette mise au point. Et ce refus a conduit Henri Lopes, par le canal de ses avocats, Maîtres Jean-Pierre Versini et Orly Rezlan, à demander au tribunal de grande instance de Paris d’ordonner sa publication, ce que celui-ci vient de décider par un jugement rendu à Paris en fin de semaine dernière et que le quotidien a aussitôt exécuté en utilisant cependant le terme « correspondance » plutôt que « droit de réponse » jugé sans doute dégradant pour lui. Mais bon, ne pinaillons pas !

Si nous relevons ici ce fait, c’est qu’il traduit la volonté des autorités congolaises de mettre fin une fois pour toutes aux attaques récurrentes dont elles sont l’objet de la part d’organisations non gouvernementales pour le moins discutables et discutées, telles que la Fédération internationale des droits de l’homme, qui instrumentalisent la justice et la presse françaises dans le but évident de dégrader l’image du pays et de ses dirigeants. En rappelant dans les colonnes d’un média français influent qu’elles ne laisseront pas la justice d’un autre pays porter atteinte à « sa souveraineté » et à l’« honneur de ses tribunaux », les autorités congolaises lancent un avertissement clair à ceux qui tentent, à Paris et ailleurs, de redonner vie à la justice coloniale.

Trois remarques pour conclure sur le sujet :
1. Les journalistes du Monde feraient bien de réactualiser leurs connaissances sur l’Afrique au lieu de relayer sans les vérifier les accusations portées par des personnages et des institutions quelque peu sulfureux ;
2. La justice française devrait se garder de prononcer, comme elle le fait à intervalles réguliers, des jugements qui rappellent fâcheusement l’époque révolue où la France dictait sa volonté aux peuples africains ;
3. Les autorités congolaises, quant à elles, seraient sages de donner au jugement rendu vendredi à Paris le maximum de publicité afin que leurs détracteurs sachent à quoi ils doivent désormais s’attendre s’ils persistent dans leurs agressions judiciaires et médiatiques.

Jean-Paul Pigasse

Edition: 

Édition Quotidienne (DB)

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