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Le musée Maloango de Diosso

Vendredi 21 Février 2014 - 2:03

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Le musée Maloango est situé à Diosso, et non à Loango. Il est blotti au milieu d’une abondante végétation de cocotiers, de manguiers et de palmiers, et sa proximité avec les gorges de Diosso, dans une synergie à développer, devrait en faire un lieu très fréquenté. Les gorges de Diosso sont d’immenses cirques d’effondrement ouverts sur la mer. Le fond des gorges est couvert de forêts d’où émergent des rochers ruiniformes violacés, curieusement érodés. La vue plongeante sur ces rochers et sur la mer est tout à fait remarquable. Diosso est situé à vingt-trois kilomètres de Pointe-Noire. Le musée Maloango perpétue le souvenir du royaume Loango.

Le Loango a formé pendant des siècles un important royaume côtier, tributaire de celui du Kongo, qui englobait l’embouchure du fleuve, signalé dès le xvie siècle par Duarte-Lopez et décrit vers 1604 par Andrew Battel. Le royaume Loango, qui domina l’intérieur aux xviie et xviiie siècles, avait à sa tête un roi divin, le Maloango, que personne de sa cour ne pouvait voir boire ou manger, et auprès de qui le rôle de bouffon était tenu par des Noirs albinos. La sœur du roi avait une place éminente, et quatre de ses fils gouvernaient les quatre provinces du royaume, l’aîné étant l’héritier. Cette pratique matriarcale était répandue dans tout le Bassin du Congo.

C’est de Loango que partait la route des caravanes, nom donné à la piste pour piétons, de tracé et de parcours difficiles surtout à la saison des pluies, qui seule reliait la côte à Brazzaville et alimentait tous les postes échelonnés jusqu’aux confins du Soudan. Voilà pour l’histoire du royaume Loango. Le musée Maloango est installé dans l’ancien palais royal, construit en 1952, à Diosso, pour Moe Poaty III, qui l’a occupé de 1954 à sa mort, le 3 mai 1975. Ce bâtiment abrite depuis le 10 avril 1982 le musée Maloango. À la diligence du président, Denis Sassou-N’Guesso, un nouveau palais est en construction pour loger l’actuel Maloango, Moe Makosso IV, intronisé en 2009.

Gageons, avec l’installation prochaine du Maloango dans sa proximité immédiate, que le musée Maloango ne sera plus ce no man’s land qu’il est aujourd’hui. Témoins d’un pan de la civilisation congolaise, les objets exposés témoignent de la vitalité de ce royaume. Le musée fait revivre des fragments de notre civilisation à travers les objets exposés. Ils laissent deviner la vie quotidienne de leurs utilisateurs. Les cinq livres d’or du musée montrent que de nombreuses personnes l’ont visité. Cela n’empêche pas de déplorer le caractère quasi confidentiel de son existence et son équipement sommaire.

Il est fortement dommage, contrairement à d’autres pays, que le Congo n’ait pu, ni su mettre en exergue ses lieux de mémoire. Gorée, au Sénégal, promu au rang de patrimoine, draine des millions de visiteurs du monde entier. Ce site contribue à la visibilité du pays, en plus des devises qu’il rapporte à l’État sénégalais. Loango, la piste des caravanes, Mbé peuvent constituer un circuit touristique, à l’indéniable cohérence historique, si on s’en donne le mal et les moyens.

Au-delà du cas spécifique du musée Maloango, c’est la question de la connaissance de l’histoire de notre pays et de son enseignement qui se pose. C’est dommage à dire et à rappeler : le Congolais ne connait pas son histoire. Il suffit, à cet égard, de regarder le contenu des enseignements d’histoire pour s’en convaincre. L’inexistence de contenus historiques dans nos médias – presse écrite, radios et télévisions – est navrante. Si d’aventure un programme s’y risque, c’est sur le mode de l’allégorie et il sombre rapidement dans le cliché en raison d’une absence évidente de maîtrise du sujet. De ce point de vue, la tâche est ardue. En attendant, Congolaises et Congolais de passage à Pointe-Noire, il est bon d’aller au musée Maloango se ressourcer à travers une visite guidée par son conservateur, infatigable et passionné, Joseph Kimfoko-Madoungou qui maintient la flamme allumée d’une partie de notre civilisation.

Mfumu

Edition: 

Édition Quotidienne (DB)

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