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Centrafrique : les Faca sont la pièce manquante

Lundi 10 Mars 2014 - 0:23

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Les forces étrangères venues au secours de la République centrafricaine montent en puissance : de six cents hommes au départ, les effectifs des soldats français de l’opération Sangaris sont passés à 1 600 aujourd’hui. Pour leur part, les troupes africaines de la Misca comptent désormais de l’ordre de six mille hommes. Cela ne suffit pas, puisque l’Union européenne a promis de mobiliser un millier de soldats, et l’Organisation des Nations unies, dont l’ambition à terme est de prendre le relais des opérations de maintien de la paix, envisage de constituer une mission de douze mille hommes.

Étendue sur une superficie de 623 000 kilomètres carrés, la Centrafrique est, en effet, un vaste territoire en partie infréquentable par la route du fait de l’absence ou de la dégradation des voies de communication. Difficile donc de faire mieux avec le petit monde en treillis cantonné pour l’essentiel dans la capitale Bangui, accaparé par l’ampleur de la tâche à accomplir. Dans cette partie de cauchemar où armes blanches et armes de guerre produisent un grand fracas, où sont passées les Faca, les forces armées centrafricaines ?

Certes l’urgence pour Sangaris et la Misca, et demain pour la force onusienne, est de rétablir l’ordre public, de ramener la paix et la sécurité dans ce pays meurtri. Tous les discours entendus depuis l’éclatement des violences il y a bientôt une année appellent à réaliser l’objectif de préserver des vies humaines en procédant au désarmement de toutes les milices. Ce qui se fait cahin-caha. En revanche, les initiatives allant dans le sens d’aider à la reconstruction de l’armée nationale centrafricaine ne sont pas très perceptibles.

Il est évident que la Centrafrique est confrontée à une crise multiforme, qu’elle n’a pas d’argent pour s’engager sur plusieurs fronts à la fois. Mais la remise en ordre des forces armées et de sécurité de ce pays ne serait pas un mauvais investissement, d’autant plus que les difficultés actuelles des unités dépêchées par l’Afrique et la France peuvent en partie être imputées à la mauvaise connaissance du terrain.

En cinquante ans d’indépendance, cinquante-quatre ans si on veut, la Centrafrique a tout de même été dotée d’une armée digne de ce nom. Même si plongée durant tout ce temps dans un cycle épuisant de pronunciamientos et de mutineries cette armée a fini par perdre la face, lui offrir les instruments de sa réinvention devient un impératif à l’heure qu’il est. L’État centrafricain étant désarticulé, les précieuses pièces du puzzle qu’il faut rassembler pour en rebâtir l’embryon seraient entre autres l’armée, la police, la gendarmerie et la justice. Ce sont ces grands corps de l’État, à côté de bien d’autres, dans la grande administration publique à réhabiliter, qui refonderont la nation centrafricaine.

Pour voir que l’armée centrafricaine est capable de renaître de ses égarements, qu’elle garde encore une âme, un certain orgueil, il faut se souvenir du tollé soulevé par la déclaration de l’ancien président de transition, Michel Djotodia, le 27 juillet 2013. Parlant de réforme, il préconisait alors d’abandonner le nom de Forces armées centrafricaines (Faca) pour celui d’Armée républicaine centrafricaine. Souvent, et cela est vérifié dans plusieurs domaines, les noms ou les sigles ne sont pas toujours le vrai problème. Le vrai problème, ce sont les hommes et aussi les moyens qui doivent accompagner l’accomplissement d’une tâche.

Il est certain que si l’on appliquait cette maxime à la Centrafrique, les choses marcheraient. Il serait en tout cas bénéfique pour les pays engagés militairement en RCA de l’aider dans ce projet, de sorte que les éléments des Faca recyclés et remis en confiance opèreraient aux côtés de leurs frères d’armes d’Afrique et de France. Ils feraient honneur à leur nation et à leur histoire, tandis que la dynamique de la défense et de la sécurité régionale qui préoccupe tant les chefs d’État et la communauté internationale serait à son avantage.

Gankama N'Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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