Les Dépêches de Brazzaville



Assemblée nationale : la session ordinaire de septembre bat de l’aile


Ça sent le roussi à l’hémicycle du Palais du peuple où depuis l’ouverture de la présente session budgétaire de septembre, les choses semblent ne pas tourner rond. Entre les députés de l‘opposition et ceux de la majorité, le torchon brûle. Les premiers ont décidé de boycotter les plénières estimant être otages d’une majorité mécanique toujours mise en branle lorsqu’il s’agit d’annihiler leurs actions. Tout se passerait comme si l’opposition parlementaire n’existe quasiment pas dans une institution réputée évoluer sous la coupe de la coalition au pouvoir qui ne cesse d’imposer ses vues. Sans s’assurer d’une réelle protection de la part du président de l’institution dont la coloration politique est bien connue, les députés de l'opposition apparaissent comme des laissés-pour-compte, leurs points de vue ne comptant que pour du beurre.

La séance plénière du vendredi 7 octobre consacrée à l’examen des motions de défiance adressées à deux membres du gouvernement est révélatrice du traitement peu orthodoxe infligé aux députés de l‘opposition. L’intervention par motion incidentielle du député Zacharie Bababaswe appelant au rejet de ladite motion est la goutte d’eau qui a débordé le vase sur fond des  divergences d’interprétation sur la pertinence d’une telle requête pendant l’examen d’une motion de défiance. Devra-t-on continuer à accepter que des motions de défiance visant des membres du gouvernement soient systématiquement vidées de leur substance par des motions incidentielles inopportunes et inconvenantes ? Telle est la question qui taraude l’esprit des députés de l’opposition peu enclins à saisir la Cour constitutionnelle sur une matière qu’ils estiment déjà réglée. La Haute cour, d’après eux, avait déjà tranché en janvier 2016 en disant que les articles de la Constitution relatif au contrôle du pouvoir exécutif via les motions de défiance ou de censure, n’appelaient à aucune interprétation car ils étaient clairs. Autrement dit, une motion incidentielle ne saurait contrarier une motion de défiance ou une motion de censure.          

Il s’avère que cet arrêt de la Haute cour avait été ignoré au grand désenchantement des députés de l’opposition qui ont quitté la salle. Et depuis lors, ils évoluent en dehors de l’hémicycle tout en appelant à la destitution du président Aubin Minaku jugé partisan dans la conduite des débats du fait de ses accointances avec la majorité présidentielle dont il est secrétaire général. Cette situation est à la base du blocage actuel de la chambre basse qui ne saurait fonctionner sans cette composante politique majeure que représente l’opposition parlementaire. La crise tend d’ailleurs à s’enliser étant entendu que ces députés ont déclaré ne pas cautionner la violation de la Constitution et du règlement intérieur de leur institution à laquelle se livrerait Aubin Minaku. Ils ont promis, à travers une déclaration publiée le 10 octobre, de saisir des instances interparlementaires en rapport avec la situation dans laquelle se trouve l’Institution législative congolaise.

C’était sans compter avec la réaction musclée de leurs pairs de la majorité présidentielle qui, par le biais des présidents des groupes parlementaires affiliés, ont accusé leurs collègues de l’opposition de chercher à bloquer la machine par leur boycott des travaux. Un stratagème qui serait « destiné à empêcher l’Assemblée nationale d’adopter les lois essentielles au parachèvement du processus électoral, en vue de la réalisation de leur agenda, consistant à accéder au pouvoir par des voies non démocratiques », ont-ils indiqué dans leur communiqué. Ils en appellent par ailleurs à l’invalidation des députés concernés dont la plupart ont toujours brillé par leurs absence injustifiées et non autorisées aux sessions parlementaires conformément aux articles 110, point 6, de la Constitution et 85, point 6 du règlement intérieur.

Nonobstant les appels du président de la chambre basse invitant les députés de l’opposition à rentrer à l’hémicycle, ces derniers ont opté pour la radicalisation de leur mouvement en maintenant leur décision de ne plus participer aux travaux parlementaires jusqu’à nouvel ordre. Ce qui fait dire à leurs collègues de la majorité qu’ils sont bel et bien dans un schéma insurrectionnel.    


Alain Diasso