Les Dépêches de Brazzaville



Changement climatique : l'Afrique paiera pour les pays industrialisés


Le continent africain, qui contribue pour moins de 4 % aux émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), paiera l’addition des pays industrialisés. Les cent quatre vingt-quinze Etats présents à la conférence sur le climat (COP21) de Paris s'étaient accordés pour maintenir le réchauffement climatique sous 2°C d’ici à 2100. A Bonn, en novembre 2017, le Programme des Nations unies pour l'environnement a estimé qu'il faudrait maintenir le réchauffement en dessous de 2°C. Cependant, même si les Etats respectent leurs engagements pris à Paris, le mercure devrait grimper de plus de 3 °C à « l’horizon 2071-2100 », selon un rapport.

L'inégalité des effets du réchauffement climatique et ses impacts économiques

Sur le plan économique, très récemment, l'organisation humanitaire Dara a estimé que le réchauffement climatique pourrait faire baisser de 3,2% le PIB mondial d’ici à 2030 si rien n'est fait pour dé-carboniser l'économie à l’échelle planétaire. Les effets du réchauffement seront géographiquement inégaux. L'idée selon laquelle l'Afrique est l’une des régions du monde qui sera la plus durement touchée par les conséquences économiques du changement climatique fait consensus.

A en croire le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le dérèglement du climat pourrait induire une baisse du PIB de l'Afrique de l’ordre de 2 à 4 % d’ici 2040 et entre 10 à 25 % d’ici à 2100. Les secteurs les plus vulnérables sont l'agriculture et les industries extractives. L'Afrique compte sept des dix pays les plus menacés au monde par le réchauffement (Sierra Leone, Soudan du Sud, Tchad, Nigeria, Centrafrique, Érythrée et Éthiopie).

Intitulé "Les économies émergentes ralentiront sous l'effet de l'augmentation des températures", un récent rapport indique que la hausse du mercure pourrait provoquer une baisse de 10,8 % des exportations d'Afrique de l'ouest et de 7,9 % celles d'Afrique centrale d’ici à 2045. Les secteurs des industries extractives et de l'agriculture représentent 60% de ce recul. En Afrique centrale, l’Angola et le Gabon sont les pays les plus menacés par une baisse des exportations. Cette baisse découlant de l’augmentation des températures se situera, cependant, à 0,1% en Europe, 1% en Amérique du Nord et de 1,6% en Asie de l’est.

L'impact du réchauffement climatique sur l'agriculture

Pour le Programme des Nations unies pour l'environnement, un réchauffement d’environ 2 °C entraînerait une réduction de 10% du rendement agricole total en Afrique subsaharienne d’ici à 2050; un réchauffement supérieur (plus probable) pourrait porter ce chiffre à 15 ou 20%. Et si le réchauffement dépassait les 3°C, toutes les régions actuellement productrices de maïs, de mil et de sorgho deviendraient inadaptées à ce type de cultures.

Si la situation actuelle perdure, l’Afrique ne parviendra à produire que 13% de ses besoins alimentaires d’ici à 2050. Cela fera peser une nouvelle menace sur les quelque 65% de travailleurs africains dont la subsistance dépend de l’agriculture et mettra la sécurité alimentaire du continent en péril.

D’ici à 2050, il suffira d’une augmentation de 1,2 à 1,9 degré Celsius environ pour accroître d’entre 25 et 95% le nombre d’Africains sous-alimentés (+ 25% en Afrique centrale, + 50% en Afrique de l’est, + 85% en Afrique australe et + 95% en Afrique de l’ouest). Le lac Tchad est un cas patent. Il a vu sa superficie passer de 25 000 km2 en 1960 à entre 8000 et 2500 km2 aujourd'hui, en raison des grandes sécheresses qui ont touché la région (Tchad, Cameroun, Niger et Nigeria). Quelque cent-cinquante espèces de poissons ont ainsi disparu du lac. Les pays africains représentent la moitié des quarante-huit pays notés en « risque extrême » dans l'indice de stress thermique élaboré par Verisk Maplecroft. Ce qui correspond à une perte annuelle de dix milliards de dollars.

La hausse de température va entraîner la hausse de la climatisation, de pathologies et de la migration

La hausse des températures et les vagues de chaleur vont entraîner une hausse de la demande d’énergie pour la climatisation, en particulier dans les zones urbaines, ainsi que la propagation de pathologies coûteuses en Afrique, en termes de prise en charge, soulignent les experts. Ce qui est révélateur de l'injustice subie par l'Afrique qui n'a aucune responsabilité historique dans le réchauffement climatique mondial. En effet, le continent noir représente moins de 4% des émissions de GES mais paiera dans ce domaine la dette des pays industrialisés. Le continent commence à jeter hors de son sol des millions d'Africains vers la migration, à cause des bouleversements induits par le réchauffement climatique.

Une étude de la Banque mondiale a indiqué que l'Afrique subsaharienne fournira le plus gros contingent. Dans une étude rendue publique en mars dernier, la Banque mondiale a révélé de migrants climatique d'ici à 2050 si rien n'est fait pour lutter contre la flambée du mercure.


Noël Ndong