Les Dépêches de Brazzaville



Lire ou relire: La tourterelle chante à l’aube de Marie-Léontine Tsibinda


Ceux qui ont lu les œuvres de Marie-Léontine Tsibinda depuis les années 1980 ne peuvent s’étonner de la constance lyrique de cette grande dame des lettres qui a ouvert la porte de l’écriture aux femmes congolaises, concomitamment avec Amélia Néné, une poétesse également.

 Résidant depuis quelques années au Canada, Marie-Léontine Tsibinda n’a pas rompu avec le cordon ombilical de sa terre natale. Le Congo des grandes rivières, des verdoyants jolis paysages, et de l’océan Atlantique à la côte ensoleillée et rafraichissante. C’est de cette beauté pittoresque que chante notre tourterelle exilée à l’autre bout du monde à cause des affres de la guerre.

L’idylle demeure une mélodie omniprésente au fil des pages, malgré l’obscurité des jours sombres où larmes et sang se mêlent pour expier les laideurs d’une génération égarée dans des combines nauséeuses. La nostalgie des étreintes étanche l’amertume des courants misanthropiques qui dans l’histoire du pays, ont parfois laissé une saveur fade dans l’âme.

La reine des mots embaumeurs s’indigne de ces temps lugubres que traverse son beau Congo natal et lance un cri d’espoir : « Un jour nouveau commence pour cet enfant dont les pas cherchent un jardin aux fruits bien doux » (p.218). Elle pleure et chante en effet pour la postérité afin que la jeunesse congolaise, et africaine, cultive l’amour au pluriel loin des sentiers battus qui ont fait du Congo et de l’Afrique « un pays de merdes » où le deuil massif fleurit en permanence. Forçant ses filles et fils à l’exil à l’exemple de l’auteure elle-même qui rappelle quelques tristes anecdotes de la guerre à travers un texte en prose portant un titre pourtant optimiste, « Renaître des cendres » (p.263-265). Comme quoi, plus jamais ça !

La tourterelle chante à l’aube, ce recueil de 284 pages qui a bénéficié de la préface de Boniface Mongo-Mboussa, est un véritable testament d’une mère aux enfants de son pays et de son continent.

Mariée au poète Jean-Bilombo Samba, Marie-Léontine Tsibinda est auteure d’une vingtaine de livres touchant plusieurs genres littéraires dont, Poèmes de la terre (Poésie, 1980), Les pagnes mouillés (Nouvelles, 1996), Moi Congo ou les rêveurs de la souveraineté (Anthologie, 2000), La porcelaine de Chine (Théâtre, 2013), Le sanglier de Tsirhi (Conte, 2017), Lady Boomerang (2017), etc.


Aubin Banzouzi

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