Les Dépêches de Brazzaville



Mode : Dr Lymane, huit fois titré meilleur sapeur de Pointe-Noire


Venu des confins d'Eko, un petit village situé dans la sous-préfecture de Boundji, département de la cuvette, ce jeune villageois a fini au fil des années par damer le pion à tous les citadins qu’il a croisés sur son chemin. Comment a-t-il fait ? 

Pour la petite histoire, le 10 mai 1972 est né à Eko dans le district de Boundji, à 535 km de Brazzaville, Henri Blaise Nguebeyi. Après ses études primaires dans son village natal, il est admis au collège d’Engana (à trois kilomètres d’Eko), un autre village centre de ce district éponyme. C’est dans cette contrée que commence à naître en lui les germes de la sape. Toute de suite, il se fait remarquer par son professeur, qui souvent lors du travail manuel lui disait : « Nguebiyi, comme tu es bien habillé, tu ne travailles pas, tu surveilles les autres.»

Pris par le goût du vêtement, il décide de passer ses vacances à Brazzaville chez son grand frère en 1987, question de se ressourcer vestimentairement. Lorsque prennent fin ses vacances, son grand frère lui octroie deux chemises et un pantalon. De retour au village, ces habits lui remontent la tête, et il se passe pour un sapeur sans égal.

Deux ans après, soit en 1989, il se rend à Pointe-Noire. Cette fois-ci, il s’accroche. Devenu Ponténégrin, c’est finalement dans cette ville qu’il s’est perfectionné dans le domaine de la sape. « C’est à Pointe-Noire que je me suis fait un nom. J’ai développé cet art en moi, parce qu’au village, c’était de la bricole. »

Sapeur né, il a commencé à participer à des compétitions dans la ville océane. C’est en 2010 qu’il participe pour la première fois au concours de la sape, à l’occasion de l’anniversaire de l’Espace Ponton. Mais il a été battu. Ensuite, il a participé au concours de 2011. Cette fois-ci, il occupe la deuxième place. Toujours en 2011, il participe au concours organisé à Côte Manève, il occupe la première place. En 2012, il remporte le concours « Play-boy ya makasi ». Cette victoire fait de lui le représentant des sapeurs de sa ville à la municipalisation accélérée du Pool à Kinkala. Il a remporté aussi le concours de la sape avec comme prix «une voiture de marque Toyota». Tout comme il a remporté le concours organisé par les Brasseries du Congo avec comme pactole, un million de FCFA.

« Je suis huit fois champion de la sape, donc le plus titré de tous les sapeurs Congolais. Je suis apte aujourd’hui de représenter le Congo partout dans le monde et ramener le titre. Cependant, je regrette qu’au Congo, les artistes ne soient pas encouragés. Avec tout ce que je fais pour promouvoir cet art, je ne bénéficie de rien de l’État congolais. Tout ce que j’ai pu avoir jusque-là comme récompense, ce ne sont que les trophées et cadeaux, dont le plus précieux demeure la voiture », s’est-il plaint.

Et d'ajouter : « Si aujourd’hui le Brésil est connu à travers le monde, c’est grâce au football. Le Congo se fait un nom grâce à la Sape, mais l’État ne se déploie pas à soutenir les piliers de ce mouvement. La sape à un bel avenir, il suffit seulement que les autorités prêtent attention à ce mouvement qui est notre patrimoine. Je souhaite aussi que soient organisés les grands événements sur la sape au Congo, en invitant les sapeurs venus d’ailleurs. » Sur le plan professionnel, Henri Blaise Nguebeyi est un artiste peintre, décorateur, sérigraphe. Ces tableaux sont beaucoup adulés. L’argent qu’il obtient en vendant ces tableaux lui permet d’acheter les habits qui font de lui un sapeur de renom.


Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

Photos 1&2 : Henri Blaise Nguebeyi, dit Dr Lymane (crédit photo/ DR)