Les Dépêches de Brazzaville



Rentrée scolaire 2013-2014 : la Fenco dresse un état des lieux

La secrétaire chargée des conflits de travail et de la juridiction à la Fédération de l’éducation nationale du Congo (Fenco) a demandé au ministère de l’Enseignement primaire, secondaire et de l’Alphabétisation, de diligenter le processus de tenue des Commissions administratives et paritaires (CAP), anciennement connues sous le sigle de CAPA. Dans un entretien avec les Dépêches de Brazzaville, Yvonne Bernadette Mfoutou est revenue sur les maux qui minent le sous-secteur à l’orée de la rentrée scolaire 2013-2014, prévue le mardi 1er octobre dans tout le pays.

Affiliée à la Confédération syndicale des travailleurs du Congo (CSTC), la Fenco a organisé récemment une série de descentes dans quelques départements du Congo pour vulgariser les conclusions des négociations globales gouvernement-partenaires sociaux qui se sont achevées le 12 août dernier par la signature d’un accord-cadre. Si la rentrée se prépare bien au regard des engagements des enseignants membres de ce syndicat, la délégation a fait un triste constat à l’intérieur du pays. « Nous demandons au ministère de diligenter le processus de tenue des CAPA parce que nous nous sommes rendu compte qu’à l’intérieur du pays, les enseignants ne sont pas avancés. Il y a ceux qui sont déjà à leur 24e année de service mais qui sont payés au grade d’instituteur stagiaire », a regretté Yvonne Bernadette Mfoutou.

Déficit en personnel : l’administration est indexée

À l’issue du conseil national de l’éducation préscolaire et de l’enseignement primaire, secondaire et de l’alphabétisation, il est ressorti que le sous-secteur accuse actuellement un déficit de près de 14.000 enseignants. Selon la Fenco, le problème se situe au niveau de l’administration qui ne sait pas réellement la conduite à tenir face aux enseignants qu’elle affecte à l’intérieur du pays. « L’administration devrait prendre ses responsabilités dans le suivi de ces enseignants. On recrute un enseignant, on l’affecte à l’intérieur du pays, mais le pauvre s’en va avec presque rien (30 000 FCFA seulement) comme mise en route. En acceptant d’y aller, il passe plusieurs mois sans prise en charge. C’est pourquoi, les enseignants reviennent et rentrent dans les circuits pour se retrouver à Brazzaville en laissant des postes vacants », a déploré la syndicaliste.

Pour le bien-être des enseignants nouvellement recrutés et pour l’équilibre de l’école, elle a demandé au ministère de revaloriser la prime de mise en route, en revenant sur les anciennes habitudes consistant à payer les avances de solde. Présidente du Syndicat des enseignants ex bénévoles, membre de la Fenco, Yvonne Bernadette Mfoutou justifie aussi ce déficit par des manœuvres enregistrées au niveau de la Fonction publique et des Finances où les quotas prescrits ne sont pas souvent respectés. Les quotas attribués au ministère de l’Enseignement, a-t-elle critiqué, s’épuisent souvent sans que tous les concernés ne reçoivent leurs textes d’intégration.

Bénévoles et prestataires : les grands oubliés

Dans la notification des quotas de recrutement au titre de 2013, déclarée « année de l’éducation de base et de la formation professionnelle », les bénévoles et les prestataires des deux sous-secteurs de l’enseignement n’ont pas été pris en compte. D’après la Fenco, cette catégorie d’enseignants qui évoluent dans les établissements publics de l’hinterland peut bel et bien réduire le déficit criard déploré. « Ils sont en train d’évoluer dans les établissements publics sans rémunération ni aucune reconnaissance de l’État. Les autorités n’ont pas de raisons à donner pour dire qu’ils n’ont pas de diplômes professionnels. Par rapport à la ronde que nous avons effectuée dans le pays, certains responsables se sont rendu compte que l’école est tenue effectivement par cette catégorie d’enseignants. Nous avons lancé un appel auprès du gouvernement par rapport au quota de cette année pour qu’il prenne en compte les bénévoles et prestataires dans leurs notifications », a-t-elle commenté.

En effet, il n’est pas rare de rencontrer des établissements publics dont l’unique titulaire est le directeur, suppléé par les bénévoles et les prestataires. Cela est visible dans certains départements ayant occupé les premiers rangs lors des résultats des examens d’État de cette année, à l’image de la Sangha, des Plateaux et autres. Ceux-ci se sont placés largement devant Brazzaville et Pointe-Noire, où évoluent les titulaires.

L’engagement décennal foulé aux pieds

Depuis belle lurette, lorsqu’on recrute les enseignants, ils ont toujours une fiche à remplir sous forme d’engagement pour exercer cette profession pendant au moins dix ans. Actuellement « l’engagement » n’est plus respecté. Pour Yvonne Bernadette Mfoutou, ceci s’explique par le manque de mesures d’accompagnement. Les enseignants ont tendance, a-t-elle signifié, à rechercher là où ils peuvent être mieux rémunérés. « Avec le problème de statut particulier, si l’on peut revaloriser notre sous-secteur, nous pensons que l’engagement décennal va être respecté. Nous avons même des enseignants qui sont recrutés depuis douze mois sans salaire. Il est obligé de revenir s’asseoir pour attendre cette prise en charge », a-t-elle ajouté.

L’accord-cadre, une garantie pour la Fenco

Interrogée sur la dernière déclaration d’une frange de la Concertation pour la revalorisation de la profession d’enseignant qui estimait que la question du statut particulier n’avait pas été abordée pendant le dialogue social, la représentante de la Fenco a indiqué qu’elle avait reçu des garanties. Elle s’est demandée si, au sortir de ces négociations, les représentants de la CRPE avaient pris soin de rassembler leur base pour rendre publiques les conclusions arrêtées. « Je pense que si cela a été fait, il n’y aurait plus des déclarations allant à l’encontre de ce qui a été décidé. L’acquisition de notre statut particulier est en bonne voie, elle n’est pas floue. Pour le relèvement du point indiciaire, on a donné à tous les fonctionnaires, nous avons une garantie qui est l’accord-cadre irrévocable », a-t-elle précisé.

Retour sur les deux mois de grève des enseignants

L’année scolaire 2012-2013 a été marquée par une grève des enseignants qui a totalement paralysé les sous-secteurs d’enseignement pendant deux mois sur toute l’étendue du territoire national. Les enseignants revendiquaient, entre autres, l’adoption de leur statut particulier, le relèvement du point d’indice à 320, la publication des textes harmonisés et le paiement des rappels de solde d’activités. Le mouvement a été suspendu grâce à l’implication du gouvernement dans son ensemble, et même des partis politiques de la majorité présidentielle, avec comme garantie : l’ouverture des négociations globales. 

Tous ces points ont été inscrits à l’ordre du jour de ces assises. Concernant les rappels de solde d’activités, il a été convenu que pour des situations antérieures et des dossiers qui étaient déjà traités au niveau de la solde, la paie devrait se faire avant l’année prochaine. Même chose pour les textes harmonisés où tous les dossiers qui étaient dans le circuit d’approbation devraient être publiés avant 2014. S’agissant du statut particulier, la mouture rédigée par les enseignants pendant la grève a été retirée afin de l’arrimer à la nouvelle loi portant refonte du statut général de la fonction publique.

Des résultats peu probants aux différents examens d’État

Aussi bien du côté de l’enseignement général que du secteur technique, les résultats n’ont pas comblé les attentes des élèves ainsi que celles des parents. Au niveau de l’Enseignement primaire, secondaire et de l’Alphabétisation par exemple, même si le taux d’admission au baccalauréat est en augmentation cette année par rapport à 2012, soit 28,20% contre 17,85%, il n’a pas atteint la barre des 30%. En effet, sur les 46.096 candidats présentés, 13.002 ont été déclarés admis. Le nombre des refusés s’élève à environ 33.094 candidats, soit un pourcentage de 71,79%.

En revanche, 39.731 candidats ont été déclarés admis au brevet d'études du premier cycle (BEPC) sur les 83.378 présentés à la session de juillet 2013. Ces  résultats sont en légère régression par rapport à l’année dernière, avec 49,94% de réussite contre 47,65% (soit une baisse de 2,29%). Pour rappel, les résultats des examens d’État ne sont plus satisfaisants depuis 2010. Le constat a même été fait par les responsables de ce sous-secteur qui ont suggéré récemment quelques mesures pour améliorer les rendements scolaires. Ils ont par exemple souligné la nécessité de dispenser un enseignement de qualité ; de respecter le temps d’apprentissage et d’améliorer la qualité du système d’évaluation.

Concernant l’Enseignement technique, professionnel, de la formation qualifiante et de l’emploi, les résultats ont été catastrophiques au bac, car sur les 25.845 inscrits, à peine 592 ont pu arracher leurs diplômes au premier tour et 4.006 admissibles, soit un taux de réussite de 17,75%. Ces résultats sont en régression de 2% par rapport à l’année dernière. Notons que l’une des raisons des mauvais résultats au baccalauréat technique a, sans doute, été le passage du code à barre à la fiche d’anonymat. Le code à barre favoriserait la tricherie à la correction et même à la direction des examens et concours depuis plus d’une décennie.

Au niveau du brevet d’études techniques (BET), du brevet d’études professionnelles (BEP), du brevet de technicien (BT), du certificat d’aptitudes professionnelles (CAP) et du brevet technique forestier (BTF), les résultats sont encourageants dans l’ensemble. Selon les services des examens et concours techniques, le taux de réussite est en hausse par rapport à l’an dernier. Par exemple au BET, ce taux est de 58%. Le BTF de Mossendjo a obtenu 62,22%. À moins de 24 heures du démarrage des épreuves du second tour, les mêmes services ont été incapables de communiquer les statistiques du BET et du BF (ce dernier serait en baisse).

La Conapeco sollicite l’assistance du gouvernement

Participant aux travaux de la 15e session ordinaire de l’éducation préscolaire, de l’enseignement primaire, secondaire et de l’alphabétisation, tenue récemment à Brazzaville, le président de la Coordination nationale des promoteurs des écoles privées du Congo (Conapeco), Clobert Ibinda, a sollicité l’assistance de l’État. Selon lui, l’école privée malgré les efforts consentis, éprouve encore de nombreuses difficultés au Congo. En effet, l’image que présentent certaines écoles appelle à des mesures disciplinaires de la part des autorités. Il suffit de se rendre dans quelques quartiers de Brazzaville pour se faire une idée du spectacle désolant que livrent ces écoles : deux petits bâtiments contenant autant d’élèves, des enfants marchant dans l’eau sous le regard impuissant de certains promoteurs qui n’attendent que la fin du mois pour faire des recettes.

Quelques mots qui minent le secteur de l’enseignement

Les conseillers ayant pris part aux dernières assises organisées par les deux ministères en charge de l’Éducation, ont passé aux fins les difficultés rencontrées dans l’exercice de leur profession. Il s’agit, entre autres, de la mauvaise gestion des carrières administratives, des mauvaises conditions de travail, les mutations arbitraires, le harcèlement sexuel, le désordre dans le recrutement des bénévoles, la non-pérennisation des primes d’encadrement, le quota insignifiant du personnel à recruter. À cela s’ajoutent, le déficit en personnel enseignant, le problème du processus enseignement-apprentissage, la vétusté des structures, la pléthore et le manque de moyens roulants.

Hellot Matson Mampouya : « Améliorer les conditions de travail du personnel enseignant est un défi à relever »

Félicitant les enseignants pour avoir sauvé l’année scolaire 2012-2013, le ministre de l’Enseignement primaire, secondaire et de l’Alphabétisation, avait exhorté les enseignants et les gestionnaires du système à une prise de conscience, de responsabilité et au respect des textes en vigueur. Il avait également souligné la nécessité d’intensifier le suivi-évaluation du fonctionnement des structures pour un meilleur rendement. Il annonçait dans cette perspective, l’exécution en cours du programme de construction des directions départementales. « Il est prévu la dotation en moyens roulants, des directions départementales et des circonscriptions scolairesa », a indiqué Hellot Mampouya. Selon lui, les faiblesses constatées dans la gestion du système éducatif en ce qui concerne le déficit en enseignants, en salles de classe et en équipements scolaires peuvent trouver leur réponse dans la constitution de pôles scolaires modernes. Ceux-ci devant comprendre toutes les structures caractéristiques d’établissements scolaires modernes aux grandes capacités d’accueil, internats, réfectoires, salles multimédias, bibliothèques, aires de jeu, de façon à avoir une meilleure utilisation des enseignants et ainsi contenir le déficit personnel enseignant. « Cette approche permet en plus aux apprenants, de bénéficier des meilleures conditions d’études et aux enseignants de sortir de l’isolement », précisait-il.

Toutes les conditions sont réunies à l’école primaire Pierre Ntsiété

Le directeur de l’école primaire Pierre Ntsiété, Émile Ngampio, a émis le vœu de voir les parents d’élèves envoyer leurs enfants à l’école dès le premier jour de la rentrée. « La rentrée scolaire aura bel et bien lieu le 1er octobre conformément à la note de service du ministère. Que les enfants viennent à l’école le 1er avec le peu de moyens dont ils disposent. S’ils ont un ou deux cahiers, même sans tenue scolaire, qu’ils viennent, ils vont s’équiper progressivement. Il ne faut pas rater le premier jour, nous voulons voir tous les enfants », a-t-il déclaré.

Quant au mouvement du personnel, il estime qu’il est au complet. Il a fait observer : « Il y a eu un petit flou qui a régné au départ. Les gens se disaient que, comme les notes étaient sorties un peu en retard, la rentrée pouvait être reportéeÀ la grande surprise, nous avons reçu le calendrier qui nous dit que les dates sont maintenues », a assuré Émile Ngampio.

Le lycée technique commercial 1er mai est prêt à recevoir les élèves

Le proviseur de ce lycée, Faustin Parfait Boro, a expliqué que son établissement se préparait pour la rentrée effective des classes 2013-2014. Pour la réussite de la rentrée, il a invité les parents et les élèves à respecter le calendrier en fonction des jours de réception. « Que les parents s’arrangent pour obtenir les tenues scolaires, les kits pour démarrer avec les cours. Aux enseignants qui sont encore à l’intérieur du pays de regagner leur poste de travail pour que nous puissions commencer à temps pour donner le meilleur de nous-mêmes », a-t-il martelé.

Le proviseur a, par ailleurs, rappelé aux élèves de la seconde et de la première année que le concours d’entrée en seconde et au collège d’enseignement technique est gratuit. Les dossiers sont déposés à la DEC. Cet établissement est confronté à un problème de manque de tables-bancs. L’insuffisance de ces tables-bancs pourrait s’expliquer par le choix porté sur celui-ci par d’autres établissements pour abriter les centres des examens. « Chaque année, il y a un déficit en tables- bancs parce que nous enregistrons des cassures de tables. Si nous pouvions recevoir des dons, ce serait bien », a expliqué le directeur.

Notons que dans le cadre de l’année de l’éducation de base et de la formation professionnelle, le ministre de tutelle, Serge Blaise Zoniaba, a engagé depuis quelques mois des travaux de construction et de réhabilitation des infrastructures. Il s’agit notamment de la construction des centres d’apprentissage des métiers à Brazzaville et Pointe-Noire et la réhabilitation du lycée technique industriel du lycée 1er mai et du collège d’enseignement technique de Matsimou à Brazzaville, en cours de réalisation, ainsi que l’internat du lycée technique agricole d'Ouesso, qui sera réceptionné dans quelques jours. 


Parfait Wilfried Douniama