Justice : des ONG plaident pour la création des chambres spécialisées mixtes

Mercredi 2 Avril 2014 - 17:35

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Pour ces organisations, il faut promulguer deux lois qui faciliteraient la tenue des procès pour crimes internationaux graves

Dans une déclaration conjointe publiée le 1er avril, cent quarante-six organisations congolaises et internationales de défense des droits humains ont appelé la RDC à adopter un avant-projet de loi relatif à la création des chambres spécialisées mixtes chargées de juger les responsables d’atteintes graves aux droits humains. Pour ces organisations, le Parlement congolais devrait également voter, au cours de la session parlementaire en cours, une proposition de loi visant à incorporer le statut de la Cour pénale internationale (CPI) en droit congolais.

Selon ces ONG, les chambres spécialisées mixtes proposées au sein du système judiciaire national se concentreraient sur les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le crime de génocide, et elles bénéficieraient, au départ, de la présence de personnel non congolais jouissant d’une expertise dans ce domaine, alors que la loi de mise en œuvre du statut de la CPI introduirait dans le droit congolais les définitions de ces crimes en accord avec le statut de la cour, et réglementerait la coopération avec celle-ci. « La mise en place des chambres spécialisées mixtes et l’adoption de la loi de mise en œuvre du statut de la CPI renforceraient la capacité des tribunaux nationaux à finalement traduire en justice les responsables des indicibles atrocités commises en RDC », a souligné la présidente de Synergie des Femmes, Justine Masika Bihamba. Cette dernière a, par ailleurs, exhorté les autorités congolaises à transposer immédiatement leurs discours en actes et adopter des mesures concrètes favorisant la justice.

Les ONG, ont, en effet, déploré l’impunité dont bénéficie, à ce jour, la majorité de responsables de massacres, de viols, d’actes de torture, de recrutement forcé d’enfants soldats et d’incendie de maisons perpétrés en RDC au cours des deux dernières décennies, en particulier dans l’est du pays. « Cela fait plusieurs années que les deux projets de loi sont à l’examen, mais des avancées concrètes ont été enregistrées au cours des derniers mois, faisant de leur adoption au cours de la présente session parlementaire un objectif réalisable », ont souligné ces organisations, qui ont noté l’engagement du chef de l’État, Joseph Kabila, et son gouvernement à renforcer la capacité du pays à s’attaquer à l’impunité pour les atrocités perpétrées à l’encontre des civils.

Cinq millions de personnes victimes de la violence

Ces ONG ont, en effet, fait constater que les cycles répétés de violence et l’impunité qui ont marqué les deux dernières décennies, en particulier dans l’est de la RDC, ont provoqué la mort de quelque cinq millions de personnes victimes de la violence, de la faim et de l’absence de soins médicaux. À en croire ces structures, les forces armées nationales de la RDC, du Rwanda et de l’Ouganda ainsi que de nombreux groupes armés non étatique, se sont livrés à des massacres, des exécutions sommaires, des viols, des actes de torture, au recrutement forcé d’enfants, au pillage et à l’incendie de maisons.

Dans leur plaidoyer, ces organisations appellent le gouvernement congolais à finaliser et approuver sans délai l’avant-projet de loi relatif à la création de chambres spécialisées mixtes indépendantes, impartiales et efficaces, et à le transmettre au Parlement. Elles les ont également exhortés à organiser des consultations publiques avec la société civile, les parlementaires et les bailleurs de fonds afin d’expliquer l’avant-projet de loi relatif à la création de chambres spécialisées mixtes et son articulation avec d’autres réformes judiciaires, et à examiner les amendements susceptibles d’être proposés lors des consultations.

Le gouvernement congolais est également prié d’exprimer publiquement sa volonté de voir adopter et promulguer la loi de mise en œuvre du statut de la CPI dans les meilleurs délais, conformément aux recommandations des concertations nationales et à l’engagement pris par la ministre de la Justice et des droits humains lors de la réunion de haut niveau sur l’État de droit organisée par l’ONU à New-York, en septembre 2012.

Ces ONG demandent aux parlementaires congolais à veiller à ce que l’examen du projet de loi relatif à la création de chambres spécialisées mixtes soit inscrit à l’ordre du jour de la présente session parlementaire et à faire la preuve de leur engagement en faveur d’une justice pour les victimes des atrocités perpétrées dans le pays, en adoptant sans délai ledit projet et de finaliser l’adoption de la proposition de loi de mise en œuvre du statut de la CPI au cours de la session parlementaire en cours.

Lucien Dianzenza

Légendes et crédits photo : 

Palais de justice de Bukavu