Adoption au Congo : un chemin pavé d'embûches

Jeudi 2 Juillet 2020 - 19:42

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Entre le poids de la tradition (la famille qui s’oppose à ce recours) et la lenteur du système administratif, les parents sortent de cette aventure écorchés. Des moments difficiles qui, heureusement pour beaucoup, se terminent par une note de joie.

Quand Paul découvre qu’il souffre d’azoospermie, un profond sentiment d’injustice l’envahit. Après avoir fait le deuil d’une paternité biologique, sa femme et lui se lancent dans le parcours de l’adoption. Aujourd’hui, avec son fils Kimia, il devient papa. « Ne pas pouvoir concevoir pour un homme en Afrique, c’est un véritable échec. Heureusement ma femme m’a soutenu sans doute parce qu’elle avait déjà deux enfants de son premier mariage. Je ne la remercierai jamais assez pour son soutien, car elle peut concevoir et a choisi d’adopter par amour », a fait savoir Paul.

Après quatre fausses couches, Geneviève a décidé de mettre fin à ce calvaire. « Apprendre que je ne pourrai jamais concevoir d’enfant naturellement a été un choc car, dans nos sociétés, l’infertilité est très souvent mal perçue et je ne vous parle même pas d’adoption. Dans ma famille, la première à y être opposée était ma mère », a déclaré Geneviève qui, au bout de trois ans d’interminables audiences administratives, est devenue maman. Toutefois, au moment où nous bouclons notre reportage, Geneviève est encore dans l’attente des papiers de sa fille. « Cela fait un moment que l’adoption de Fleur a été prononcée, mais l’avocat de la famille peine à obtenir l’acte d’adoption alors que ma fille porte déjà le nom de notre famille », a-t-elle signifié. Selon Geneviève, dans cette affaire d’adoption, il faut avant tout se munir de patience, d’amour et avoir les poches bien pleines.

Il y a trois mois, Christophe et Célestine ont reçu un appel leur confirmant que son mari et elle allaient bientôt être parents de la petite Esperancia âgée de neuf mois. «Nous pleurons, rions, c’était juste incroyable au regard des épreuves interminables que nous avions dû traverser…J’allais être mère, un sentiment de joie et de peur se mêlaient à ce bonheur », a expliqué Célestine les larmes aux yeux.

Un coup de fil tant espéré qui redonne la joie à ce couple qui tente, depuis plus de quinze ans, d’avoir un enfant. Seulement l’annonce de l’adoption d’Esperancia au sein de la famille du couple ne fait pas l’unanimité. «Nos familles et notre entourage nous ont carrément dissuadés de le faire. Plusieurs sont arrivés à me dire que ma fille ne serait pas totalement mienne puisqu’elle n’avait pas le même sang que nous et qu’il serait préférable d’adopter au sein de la famille ». Mais Célestine écoute son cœur et, depuis une année, elle vit le bonheur de sa petite fille. «Quand on a rencontré Nude pour la première fois, mon mari et moi étions littéralement comblés, c’était un don du ciel. On a tout de suite oublié les longues démarches, les nuits sans sommeil, la lenteur administrative, l’argent laissé çà et là pour diligenter l’adoption, et la famille qui ne vous rend pas la vie facile en vous dissuadant d’adopter…Parfois on a eu envie de tout abandonner. Mais une fois que Nude était à la maison, toutes mes angoisses ont fait place à une telle joie ! Je pense que ça doit être identique à une femme qui accouche », a fait savoir Pauline Kiadi.

« D’Abord il y a la longue pile de papiers administratifs à fournir, les allers- retours entre l’orphelinat et le parquet. Si tu n’es pas psychologiquement blindée, tu en sors meurtrie », a témoigné Nathalie qui a vu son vœu être exaucé alors qu’elle venait d’avoir 45 ans. «C’était inespéré, Dieu a fait grâce et m’a donné la possibilité de recueillir Mounia, mon soleil. Mais j’ai dû pour cela m’éloigner de mes parents, sortir de mon quartier et simuler une grossesse. Résultat, Mounia a trouvé une place dans ma famille, et on lui trouve même des ressemblances avec ma mère », a-t-elle dit. Nathalie compte emmener son secret dans sa tombe afin de permettre à sa fille de vivre une vie paisible et, surtout, ne pas être rejetée dans sa famille. L’adoption d’un enfant nécessite beaucoup de courage car les affres de ce processus restent indélébiles, surtout si à la fin on n’obtient pas ou difficilement la garde de l’enfant. Les mois qui suivent ce parcours d’adoption sont ponctués de doutes, de pleurs, de peur, de découragement, d’espoir…

Berna Marty

Légendes et crédits photo : 

Image illustrative DR

Notification: 

Non