Evocation : Charles de Gaulle 3

Jeudi 2 Juillet 2020 - 20:15

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En entrant en guerre contre l’Allemagne en 1939, la France s’était alignée derrière son allié britannique. Celui-ci, en dehors d’un corps expéditionnaire de 200.000 hommes devait soutenir l’armée française avec des moyens aériens estimés à 25 escadrilles. Basée sur le principe d’une guerre éclair, le blitzkrieg, l’offensive allemande de mai et juin 1940 déjoua les plans britanniques. Soumis à rude épreuve, ils durent précipitamment rembarquer la totalité de leur corps expéditionnaire de l’autre côté de la Manche en Angleterre en y emmenant plus de 100.000 soldats français. Mis sur la défensive, les Anglais estimèrent prudents de ne pas disperser les moyens en leur possession. D’où le refus de ne plus envoyer les avions promis à la France. Naturellement, ce développement n’était pas pour plaire au commandement français qui y voyait une trahison. De fait, la France se retrouva seule face à une puissante armée d’invasion qui dominait ses forces de la tête et des pieds. Lorsque Paris fut capturé le 10 juin 1940, le gouvernement et la population mis en fuite, seule face à un ennemi qui l’avait défait en rase campagne, l’alternative d’un armistice semblait rationnelle. L’arrivée au pouvoir le 17 juin 1940 du maréchal Philippe Pétain et de son ministre de la guerre Maxime Weygand inscrira l’Etat français dans cette option. Le 22 juin, l’armistice était signé dans un décor historique choisi par le  mythomane führer allemand Adolf Hitler.

Le général Charles de Gaulle ne partageait pas cette position du gouvernement de son pays. Deux visions fondaient son rejet de cet armistice. Selon lui, la France était défaite mais pas vaincue. Cette posture était aussi celle des Britanniques qui avaient concédé un repli tactique et exhortaient l’allié français à rester dans la guerre. Par le passé et depuis l’antiquité, le refus de la soumission à l’ennemi qui a défait les troupes au combat a souvent payé. Le vainqueur, en effet, se retrouve dans ces conditions de façon inattendue face à une pression morale quand le vaincu en fuite ne reconnait pas sa défaite. D’autre part, De Gaulle estimait que la France n’était pas seule dans cette guerre qui était une guerre mondiale. Sa vision militaire lui montrait des forces immenses de par le monde qui ne s’étaient pas encore exprimées. Le dernier mot reviendrait à ces forces le jour où elles déployeront les chars, les avions et la tactique qui a permis à l’Allemagne d’écraser la France.

Comme susmentionné, le général de Gaulle n’était pas mandaté par aucune institution française pour s’opposer aux décisions prises par le gouvernement légal français. Pour l’état-major de son pays, ses déclarations londoniennes relevaient d’une inqualifiable indiscipline. Sa promotion de général à titre temporaire fut annulée ; au regard de l’état-major français, il était redevenu le colonel Charles de Gaulle. Le 23 juin, Albert Lebrun, président de la République française prit une ordonnance qui mettait prématurément le colonel Charles de Gaulle à la retraite par mesure disciplinaire assortie d’une traduction devant un tribunal de guerre qui le condamna le 4 juillet 1940 à une peine de quatre ans d’emprisonnement avec perte de la nationalité française. Lorsque le gouvernement français apprit que le rebelle de Londres s’apprêtait à lui disputer des lambeaux des territoires français d’Outre-mer, il se dépêcha de l’inculpé de « trahison, atteinte à la sûreté extérieure de l'État, désertion à l'étranger en temps de guerre sur un territoire en état de guerre et de siège » et condamné à Clermont-Ferrand le 2 août 1940 à la « peine de mort, dégradation militaire et confiscation de ses biens meubles et immeubles ».

A Londres, cependant, le rebelle étoffait son parcours de légitimité. Il ne se considérait pas comme le chef d’une légion de volontaires français se battant aux côtés de la Grande-Bretagne. Il voyait les choses en grand. A défaut d’officiels français absents de la lutte contre l’envahisseur allemand, c’est lui Charles de Gaulle qui portait le flambeau de la résistance depuis son appel du 18 juin. Autour de lui des volontaires avaient afflué. Une organisation dite la France libre s’était structurée.  En créant les Forces françaises libres (FFL), le général de Gaulle avait en vue une vaste ambition qui le singularisera et fera de lui la principale figure de la France qui se bat.  Son ambition était « de garder la France dans la guerre contre Hitler, en créant une armée et un contre-État doté de tous les attributs de souveraineté et légitimité, et qui se donne une base territoriale en ralliant les territoires français de l'Empire colonial, future plate-forme de la reconquête ». (à suivre)

 

 

François Ikkiya Onday-Akiera

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