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La globalisation en Afrique : handicaps et opportunités ?

Mercredi 19 Août 2020 - 16:13

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Pourquoi des économies autrefois dynamiques et diversifiées ont été réduites à des monocultures fragiles, complètement dépendantes des flux mondiaux de capitaux, et qui se saignent pour survivre ? Pourquoi l’Afrique manque cruellement de ressources financières et techniques pour assurer son décollage ?  La globalisation a intégré les économies africaines à l’ordre mondial créé depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. En dépit des handicaps que l’on peut rencontrer, ce système peut offrir des opportunités pour l’Afrique.  

Handicaps. Une des causes du retard du développement en Afrique est la dépendance de ses économies du marché international à travers la globalisation de l’économie mondiale. L’autre handicap est constitué par le déficit des ressources techniques et financières. A cela s’ajoute les vulnérabilités de la mauvaise gouvernance.

Le mauvais rôle. Pour l’Afrique, la globalisation c’est la répartition des tâches en termes de production de matières premières. Tel pays produit le café qui n’est pas consommé sur place, tel autre le cacao ou le cuivre et l’uranium pour alimenter le marché international. La globalisation a détruit la production agricole locale tandis que les lobbies financiers ne se préoccupent que des grands groupes industriels, qui disposent d’une surface financière suffisante. L’Afrique est le maillon faible de la chaîne.

Faiblesse industrielle. Aucun de ces pays producteurs n’arrive à transformer ses matières premières sur son territoire. Même après plusieurs années d’exploitation, les pays ne disposent pas de ressources financières et techniques suffisantes pour assurer une autonomie. Pour avoir des ressources nécessaires, les Africains doivent recourir à des emprunts sur le marché financier auprès de bailleurs capricieux qui leur imposent des conditionnalités humiliantes. Si ailleurs, on peut vendre des avions de guerre à une dynastie inamovible qui bafoue les droits des femmes, n’accorde aucune perspective à l’opposition, ici on exige des élections ou des négociations avec des terroristes.

La solution pour les Africains serait de s’émanciper en se détachant du cordon ombilical de ces lobbies.

Opportunités. Plusieurs pays africains sont riches en matières premières qui alimentent les industries occidentales : fer, cuivre, aluminium, zinc, bronze, potasse, bauxite, tungstène, coton pétrole et bois. Sans compter les métaux rares qui assurent désormais la suprématie informatique et numérique des pays comme la Chine, Israël, les Etats-Unis, la Corée etc.

Pour tirer profit de ces matières premières, il suffira aux Africains de les transformer sur place afin d’exporter des produits finis générateurs de revenus plus intéressants que les matières premières brutes. Exemple : le bois qui est exporté du Congo chaque année et dont les revenus pour le pays ne semblent pas intéressants devrait être transformé totalement sur place en produits semi-finis ou finis. Le pays dépense chaque année plusieurs milliards pour importer des meubles en Chine et en Turquie. Ceci parce que l’industrie de transformation du bois est structurellement incompatible avec les stratégies nationales de développement. Pour cela il suffit de former les jeunes et d’implanter les unités de transformation localement. L’Afrique peut tirer profit de la globalisation en exploitant au mieux ses ressources.

Eviter le piège. Cette solution n’est pas facile à mettre en œuvre car, les lobbies occidentaux tenteront toujours de maintenir cette dépendance. Les pays qui ont tenté l’expérience pour s’en détacher ont dû faire face à des tracasseries et des sabotages.

C’est le cas du Congo, notre pays. En 1963, les dirigeants de l’époque, voulant se soustraire à la tutelle industrielle des puissances étrangères, avaient entrepris une vaste opération de nationalisation des unités de production dans les secteurs stratégiques. Le résultat fut catastrophique. Les actes de sabotage ont été relevés à la Compagnie des potasses du Congo.

 Lorsque le Congo voulut acquérir les équipements nécessaires pour construire sa raffinerie, une société belge manipulée par les lobbies français avait vendu des équipements incomplets.  Trainée en justice, cette société avait dû payer cher et ce fut une victoire inédite dans l’histoire des relations commerciales entre un Etat africain et une puissance européenne.

La globalisation et la financiarisation de l’économie mondiale ne sont pas une fatalité. Mais un mécanisme qui permet à tous les pays de la planète de tirer parti des règles du commerce international. Sauf que ces règles sont en général discriminatoires.  Il est donc temps de repenser ce système. Seul le respect des règles peut nous assurer un partenariat équitable.

 

 

Emmanuel Mbengué

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Édition Quotidienne (DB)

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