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Déchirements

Lundi 19 Octobre 2020 - 12:27

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La Côte d’Ivoire est-elle sur le point de retomber dans les violences qu’elle a connues les décennies passées ? A deux semaines de l’élection présidentielle du 31 octobre prochain, alors que la campagne électorale en vue de ce scrutin a été officiellement lancée jeudi dernier, la question se pose de savoir comment les acteurs en présence entendent occuper le terrain sociopolitique. Au demeurant, les appels au boycott du vote, lancés par les candidats Henri Konan Bédié et Pascal Affi Nguessan, qui dénoncent un processus électoral vicié, ne sont pas de nature à apaiser un climat politique tendu depuis plusieurs mois du fait des dissensions entre le pouvoir et l’opposition.

Le 16 octobre, le président sortant, Alassane Dramane Ouattara, candidat à sa propre succession, est entré en campagne en demandant à ses partisans de ne pas suivre « ceux qui ont peur de l’élection ». Une allusion claire à ses deux adversaires cités plus haut. Comme s’il voulait prouver qu’il a le contrôle de la situation, le chef de l’Etat a choisi la ville de Bouaké pour lancer sa campagne électorale. Située dans le Nord de la Côte d’Ivoire, Bouaké fut la place forte de la rébellion qui ébranla ce pays dans les années 2000. Elle fut menée par un certain Guillaume Soro que l’on disait alors soutenu dans son aventure par le président actuel. En délicatesse avec ce dernier, l’ex-chef de forces nouvelles n’est plus en vue sur la scène ivoirienne. Il rumine son retour au bercail en France où il est retenu en exil.

Sur la liste des candidats au scrutin de la fin octobre figure, outre les trois premiers, Kouadio Konan Bertin. Anciennement proche d’Henri Konan Bédié, il avait en vain sollicité les primaires au sein du Parti démocratique de Côte d’Ivoire, pour départager les éventuelles candidatures à la présidentielle. C’est donc un dissident libre, si on peut dire, qui peut être un motif de consolation pour Alassane Ouattara. Le candidat Kouadio Konan Bertin avait beau revendiquer être de l’opposition, sa vision des choses est différente de celle portée par Konan Bédié et Affi N’Guessan. Il a refusé de suivre le mot d’ordre de boycott et crédibilise de ce fait, même moyennement, le processus électoral en cours.

Le problème des partisans du boycott est qu’ils l’ont posé à la fin de l’accomplissement de toutes les procédures autorisant leur participation au scrutin. Ils savaient la candidature du président Ouattara « contre-indiquée » comme ils le disent, mais ont tout de même joué le jeu de la compétition politique en déposant les leurs. Ils se seraient désistés avant la validation de leurs candidatures par la cour constitutionnelle que le chef de l’Etat sortant aurait eu toutes les peines du monde à poursuivre la mise en œuvre du processus. La volte-face de dernière minute de ses concurrents lui fait dire que ces derniers ont peur de perdre.

Tout compte fait, dans la période présente, la grande peur est aussi que les Ivoiriens rouvrent les pages sombres des déchirements qu’ils ont vécus dans leur chair il y a quelques années. Il faut prier que les caravanes de paix menées à travers le pays par les artistes musiciens ivoiriens avant les carnavals politiques qui courront jusqu’au 29 octobre minuit, dans le cadre de la campagne électorale, rappelleront à tous les enfants du pays d’Houphouët Boigny leur devoir de préserver la cohésion nationale comme la prunelle de leurs yeux.

Gankama N'Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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