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Les enjeux du golfe de Guinée

Lundi 29 Juillet 2013 - 8:15

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De la même façon que le golfe Persique, l’océan Indien au débouché de la mer Rouge ou le détroit de Malacca en Asie, le golfe de Guinée devient au fil des ans un lieu stratégique où se joue une partie planétaire. Il le doit, bien sûr, à sa position géographique qui en fait le point de passage obligé pour tout navire voulant passer de l’hémisphère Nord à l’hémisphère Sud en longeant les côtes de l’Afrique ; il le doit aussi et surtout au fait que cette partie du monde s’impose progressivement comme l’une des plus riches du globe en raison de la vitalité de ses populations et de la richesse de ses ressources naturelles. Considéré jusqu’à une date récente comme voué pour longtemps à la misère et à la guerre, le Bassin du Congo est désormais l’objet de toutes les attentions et, de ce fait, la sécurité de l’océan qui le borde s’impose comme un enjeu majeur.

Il l’est d’autant plus que, dans le même temps, l’insécurité gagne tout au long de ses côtes avec les attaques de plus en plus nombreuses perpétrées par des pirates équipés d’embarcations rapides qui se dissimulent par dizaine, par centaines même, dans les baies et les mangroves pour fondre brutalement sur leur proie. Tous les experts en conviennent : si des mesures ne sont pas prises rapidement pour neutraliser les bandes qui s’y multiplient, cette partie de l’océan deviendra une zone de non-droit où les agressions se multiplieront et où les trafics les plus dangereux se donneront libre cours.

Disons avant d’aller plus loin que, dans cette affaire, les pays riches de l’hémisphère Nord sont tout autant concernés que les pays qui bordent le golfe de Guinée, car, très vite, si rien n’est fait pour stopper les dérives en cours, la drogue, les armes, les produits illicites de toute nature emprunteront cette voie pour gagner l’Europe en toute impunité. Sans compter, bien sûr, les attaques qui seront menées contre les plateformes pétrolières, les navires marchands, les bases logistiques des grandes compagnies internationales présentes dans cette zone et qui rendront infiniment dangereuses les activités économiques sur toute l’étendue de la région.

Les États qui bordent cette partie de l’océan ont pris depuis longtemps la mesure du problème et s’efforcent de mobiliser les moyens nécessaires pour combattre le fléau en gestation. Mais ils n’ont pas, et n’auront pas avant très longtemps, les capacités techniques et financières qui leur permettraient de le résoudre. Ce qui a comme conséquence évidente que l’affaire concerne la communauté internationale dans son ensemble et non les seuls États du golfe de Guinée, laquelle communauté internationale dit effectivement avoir conscience de la gravité du problème, mais ne se mobilise guère, en dépit des apparences, pour aider les pays concernés à agir.

D’où cette idée qui paraîtra folle à beaucoup, mais qui relève selon nous du simple bon sens : construire à proximité immédiate d’un grand port de la région une base équipée de moyens navals, aériens, électroniques qui garantiraient une réponse efficace et immédiate aux agressions dont les navires de toute provenance pourraient être l’objet. Voyez, par exemple et pour illustrer ce propos, le rôle que Pointe-Noire, avec son port en eau profonde et les installations ultramodernes qui y sont en cours de construction, pourrait jouer dans la mise en place d’un tel dispositif. Capables d’intervenir rapidement sur toute l’étendue du golfe, les moyens qui y seraient concentrés dissuaderaient vite les pirates de sortir de leurs trous.

La France et ses partenaires européens, la Chine, les États-Unis, la Russie, l’Inde, le Brésil ont tout à gagner à la mise en place d’un tel dispositif. Encore faudrait-il le leur dire expliquer de façon claire, preuves à l’appui.

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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