Saintrick : le musicien le plus sénégalais de tous les Congolais

Samedi 7 Juin 2014 - 1:45

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Saintrick vit à Dakar, parle le wolof sans accent, et fait de la musique très proche du style populaire sénégalais mbalax. Pourtant Patrick Joël Mayitoukou est né à Brazzaville en 1968, au quartier ex-Voie, et est très fier de ses origines congolaises

La première langue africaine parlée par Patrick a été le wolof, pour avoir passé une partie de son enfance à Dakar où son père a travaillé pendant dix ans. En 1983, à la mort de son père, la famille rentre à Brazzaville, et le jeune Patrick participe alors à plusieurs formations musicales. On le retrouve d’abord dans un  groupe d'harmonicistes, ensuite à Lomoka Spirituel, dans le quartier Matoure, ensuite pendant cinq ans dans la chorale du quartier Saint-Charles-Louanga, Touti Ndissa ( qui signifie « faites nous chanter » en lingala) et avant d’atterrir dans un orchestre raggae, Jah Children, où il rencontre Cyrill Koussonga, un excellent compositeur, qui lui offre ses titres qui sont toujours dans le répertoire de  Saintrick.

C’est dans Jah Children que l’artiste chante en solo pour la première fois de sa vie. Saintrick rejoint ensuite Africa Brass, un orchestre de jazz avec lequel il commence à tourner en Afrique. S’ensuivra un court passage comme choriste chez  Zao et la création des Tambours de Brazza. En 1988, Saintrick lance sa propre formation, Les Tcheli, qui l'accompagne jusqu'à nos jours.

Au cours de cette période, Saintrick crée son propre style de musique métissée, yeketi, qui se repose sur le wala de Nzongo Soul, la rumba congolaise, et le mbalax sénégalais. Au Congo, Saintrick a toujours gardé sa culture sénégalaise. S’il a chanté en wolof, c’était pour ne pas oublier la langue de son enfance. Et la communauté sénégalaise de Brazzaville l'a soutenu au début de sa carrière solo alors que sa musique était considérée comme non  commercialisable au Congo.

Le début d’une carrière prometteuse

Sa carriere solo a débuté grâce  à sa participation en première partie d'artistes sénégalais comme Baba Maal, Youssou N'Dour et Ismaël Lô.  En 1993, Saintrick sort son première album, Sidilo, un hommage à Ismaël Lô. À Dakar, il s’installe en 1999 après une odyssée qui commence par la fuite de Brazzaville vers l'autre rive dans une pirogue visée par des tirs en 1997. Passant par Kinshasa et Bangui, il arrive, accompagné de  son frère Luc et du groupe Tcheli, le 18 août 1999, après seize ans d’absence du Sénégal. Le pays de son enfance l’accueille chaleureusement, et Saintrick se réintègre facilement grâce à ses multiples contacts musicaux. La srtucture de Mori Kanté, Africafête, devient son agence artistique. Il participe au projet Refugee Voices de Youssou N'Dour. Avec son inséparable frère Luc, il fonde une structure de production, ZHU Culture, agence artistique qui offre différentes formations en sonorisation, expertise culturelle, carrières d'artistes.

Diversité de casquettes

Les multiples talents de Saintrick ne se limitent pas à la musique. Il y a quelques années, il participe à la première pub de la bière Ngok au Congo, et au Sénégal on le retrouve dans une pub pour Orange. Il vient également de tourner dans le premier film de Laurentine Milébo à Paris. Saintrick a écrit un livre sur la sonorisation qui sert de manuel à la majorité des ingénieurs du son en Afrique francophone. Il prépare actuellement la sortie d'un livre autobiographique et est l’auteur d’une bande dessinée sur les pygmées parue en 2012. 

Invité du festival Nsangu Ndij Ndji, demain soir Saintrick sera aux côtés de son icône, Ismaël Lô, pour le concert de clôture de cette dixième édition. En effet, Pierre-Claver Mabiala a réservé le concert à Saintrick pour  la dixième édition de son festival où il va se produire pour la première fois devant le public de Ponton.

Sasha Gankin