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Migrants : l’Europe face à ses responsabilités

Samedi 27 Mai 2017 - 14:21

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Plus les semaines  passent  et plus s’accroît en Mer Méditerranée le flot des migrants venus du Sud (Proche et Moyen-Orient, Afrique du Nord, Sahel, Afrique Orientale). Avec, comme il fallait s’y attendre, une série de drames plus inhumains les uns que les autres dont les médias mondiaux diffusent d’heure en heure les images poignantes, insupportables.

La tragédie qui se déroule ainsi aux portes de l’Europe prend une dimension telle qu’il devient impossible pour les dirigeants du Vieux continent d’en sous-estimer la gravité comme ils l’ont fait trop longtemps et, surtout, de nier la responsabilité qui est la leur dans la dérive sanglante à laquelle nous assistons. Car c’est bien le monde occidental qui a provoqué – sans en avoir conscience peut-être, mais en refusant d’écouter  les avertissements que lui  lançaient les dirigeants du grand Sud – la tragédie qui précipite chaque jour au fond de la mer  des dizaines d’innocents.

Jamais, en effet, les migrations dites « sauvages » n’auraient pris une telle dimension si l’Europe et les Etats-Unis s’étaient abstenus d’intervenir comme ils l’ont fait ces vingt dernières années en Afghanistan, en Irak, en Syrie et surtout en Libye au nom d’une politique dite de « défense des droits de l’homme » qui a généré les pires violences. Mus par une vision néocoloniale des rapports entre les nations et incapables de prévoir les conséquences inévitables de leurs interventions armées, les dirigeants des nations occidentales ont commis une série d’erreurs, pour ne pas dire de crimes, dont nous vivons aujourd’hui les premiers effets.

Mieux vaut, par conséquent, regarder la vérité en face car les drames qui se déroulent sous nos yeux se multiplieront à coup sûr dans les mois à venir. Chassés de leurs maisons, de leurs pays par la misère économique et sociale, par l’intolérance religieuse, par les tensions politiques internes, par la décomposition de leur environnement immédiat, les migrants sont mis en esclavage par des mafias qui bâtissent leur fortune sur la misère humaine. Affamés, battus, violés dépouillés des maigres moyens financiers qu’ils avaient accumulés en vue de leur migration ces hommes, ces femmes et ces enfants n’ont pas d’autre issue pour survivre que de s’entasser sur des bateaux de fortune que la moindre vague peut renverser. Et plus le temps passe plus le nombre de victimes augmente.

Croire que le flot s’interrompra en raison de ces violences comme le font et l’espèrent en réalité sans le dire ouvertement les dirigeants européens relève d’une utopie elle-même criminelle. Car personne ne peut empêcher une famille en proie aux pires tensions de croire qu’en fuyant son pays elle aura une chance de survivre. Lorsque la mort rôde autour de soi tout est bon pour lui échapper, tout y compris l’exil.

En ce moment précis où les dirigeants européens se demandent comment ils parviendront à relancer une Union en voie de décomposition l’on ne saurait trop leur conseiller d’écouter les conseils, les avis, les propositions des dirigeants du grand Sud. S’ils veulent réduire ou ralentir la migration sauvage qui menace leur propre destin qu’ils aident donc les pays africains à ramener la paix partout où les erreurs occidentales l’ont mise en péril.

Pour ne citer qu’un exemple parmi bien d’autres,  qu’ils aident donc le président Denis Sassou N’Guesso à réconcilier les frères ennemis libyens comme le lui a demandé l’Union Africaine afin que ceux-ci s’assoient autour d’une même table et s’emploient à trouver une issue pacifique à la crise qui les oppose depuis la chute de Mouammar Kadhafi programmée de façon absurde par la France et l’Angleterre il y a cinq ans. Alors, en effet, ils montreront qu’ils ont pris la mesure de leurs erreurs passées et sont décidés à œuvrer en faveur de la paix. Alors, enfin, ils auront une chance  de réduire, voire de mettre un terme au flot des migrations sauvages qui menace très directement aujourd’hui leur paix sociale, leur sécurité intérieure.

 

 

 

 

 

 

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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