Affaire Sarkozy: derrière cette poignée de main...

Jeudi 22 Mars 2018 - 17:45

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Depuis qu’a éclaté l’affaire Sarkozy, dénégations et dénonciations s’enchaînent. A quelles fins?

Chaleureuse, en apparence, comme le veulent les usages diplomatiques, la poignée de main, ce 10 décembre 2007, entre Nicolas Sarkozy, locataire de l’Elysée à l’époque, et Mouammar Kadhafi, le chef de la Jamahiriya arabe libyenne, comportait-elle des sous-entendus ? Etait-elle un juste retour des choses après que les deux hommes avaient mis en commun un deal convenable pour leur amitié naissante ?  

Le rebondissement, après cinq années d’enquête, de ce que les juges français appellent « l’affaire Sarkozy », relative au financement présumé de sa campagne à l’élection présidentielle française, en 2007, est diversement interprété. Si le principal mis en cause parle de manipulation, ses soutiens en disent autant, l’avalanche de déclarations des témoins supposés, qui parlent de preuves « suffisantes », met les magistrats dans leur obligation professionnelle de dire le droit.

Au demeurant, c’est presque l’histoire d’un « guide » qui accumulait tous les mauvais présages, et toutes les inimitiés au long de son règne. Au sein du monde arabe naturellement le sien, comme dans la sous-région du Maghreb, il est difficile de dire que Mouammar Kadhafi avait beaucoup d’amis. Il n’est que de songer à son délaissement quand les puissances extérieures étaient lancées à ses trousses en 2011. Même quand, en 1986, l’Américain Ronald Reagan lança ses F16 contre lui, tuant au passage certains de ses proches, il n’y eut pas une levée de protestations chez ses « frères ».  

Dans le reste de l’Afrique, à l’évidence, Kadhafi tentait de peser de tout son poids sur les affaires du continent. Il payait les dettes des Etats démunis, ambitionnait, comme se l’autorisèrent les pères-fondateurs (certains d’entre eux) de l’ex-Organisation de l’unité africaine dans les années de libération du joug colonial, de construire les Etats-Unis d’Afrique. Sur ce point, le « guide » libyen jouissait d’une audience certaine parmi la jeunesse du continent, tandis que la plupart de ses pairs eurent de la peine à le suivre, tellement l’homme avait un côté imprévisible bien déroutant.

Un jour, Mouammar Kadhafi s’était permis, du haut de la prestigieuse tribune de l’ONU, à New York, de froisser et de déchirer la charte de l’organisation mondiale avant de la jeter par-dessus bord. Arrogant on le disait, mais provocateur et original aussi quand le bédouin se permettait de planter ses tentes dans les grands-places des capitales du monde qui l’accueillaient. Ce fut le cas quand il visita finalement son « ami », Nicolas Sarkozy, en 2007. Ses valises furent posées dans les jardins de l’hôtel Marigny, moyennant quelques accommodations.

Reçu avec tous les honneurs à l’Elysée, son hôte essuya les critiques de son entourage et de ses adversaires politiques pour avoir déroulé le tapis rouge au « dictateur ». C’est ainsi que sont traités les dirigeants du tiers monde. On se rend compte pourtant, que les dictatures peuvent être le lot de tous ceux qui détiennent un quelconque pouvoir. Le jour par exemple où, à brûle-pourpoint, l’ONU fut priée de valider l’invasion de la Libye pour en chasser le dirigeant au prix de tant de pertes humaines et matérielles, les puissances possédant le droit de véto avaient bel et bien fait un usage disproportionné de leur pouvoir.

Mais que peut-on réellement attendre de l’affaire Sarkozy ? Nul ne le sait vraiment, car les voies de justice peuvent aussi être impénétrables. La justice pour la Libye serait qu’elle retrouve sa tranquillité. Car on pourrait assister aussi à beaucoup de bruit pour rien, Kadhafi n’étant plus là pour dire sa part de vérité.

Gankama N'Siah

Légendes et crédits photo : 

la rencontre à l’Élysée entre Kadhafi et Sarkozy à l'époque président de la république française/ DR

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