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Désinformation

Samedi 1 Septembre 2018 - 17:30

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A défaut de s’affronter avec les terrifiantes armes de destruction massive qu’elles n’ont cessé d’accumuler depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, en 1945, les puissances occidentales, asiatiques, eurasiatiques et moyennes orientales se découvrent un nouveau champ de confrontation : celui des réseaux sociaux. Aussi affolantes que le sont les premières catégories d’armes, ces plates-formes de communication occupent désormais le devant de la scène mais du fait des dérapages liés à leur exploitation, elles échappent de plus en plus au contrôle de leurs managers.  

Que l’on évoque, en effet, Twitter, Facebook ou tel autre « réseau social », considéré ainsi pour la masse d’abonnés qu’ils drainent et le volume d’informations qu’ils relayent au quotidien, ces instruments d’interaction entre individus et/ou organisations privent de sommeil les décideurs publics et privés. On observe ainsi, pour ce qui est du domaine public, comment les inimitiés grandissantes entre l’Occident d’une part, la Russie et l’Iran d’autre part, se nourrissent de l’instantané du Web. Les deux derniers pays sont accusés de manipuler l’information à des fins de déstabilisation des nations occidentales, lesquelles semblent prendre la chose au sérieux. Dès lors, de Bruxelles à Londres, en passant par Washington notamment, on prévient Moscou de ne pas continuer de jouer avec le feu.

La Russie est-elle si puissante, si insaisissable au point de tourner en dérision les lourdes sanctions que lui ont infligées l’Europe et les Etats-Unis depuis l’éclatement de la crise ukrainienne et l’annexion de la Crimée en 2014 ? De l’avis de certains dirigeants européens et américains, il n’y a pas de doute, Moscou est, moyennant le concours de réseaux sociaux, au cœur d’une stratégie de fragilisation de l’Occident qui reposerait essentiellement sur « l’utilisation des techniques de l'information de masse pour induire en erreur, cacher ou travestir les faits ». Cette définition que le moteur de recherche Google donne du mot désinformation montre bien, quand on les écoute parler (Russie et Occident), que les deux parties versent dans une surenchère dénonciatrice dont souvent les preuves sont difficiles à rassembler.

Il en est ainsi de l’affaire Skripal qui est à l’origine, depuis le début de cette année, de la crise diplomatique entre la Grande- Bretagne et la Russie : empoisonné selon toute vraisemblance avec sa fille Loulia, le 4 mars, à Salisbury en Angleterre, l’ex-agent russe, Serguei Skripal, tout comme cette dernière, s’en est sorti après des soins intenses. Mais l’incident a relancé la rivalité entre les puissances de 1945. Qui a bien pu tenter de supprimer l’agent double ? A Londres comme à Moscou, les accusations et contre-accusations ont été plus parlantes que les preuves. Seule conséquence politique, le renvoi dans l’un et l’autre pays de nombreux diplomates en poste.

A ce spectacle des « grands » de ce monde, confrontés il est vrai aux défis de restructuration de leurs économies, du terrorisme international et de la crise migratoire, les pays du Sud restent sans voix. Ils ont de la peine à interférer dans ces querelles dépensières et attendent de voir s’ils seront tenus à l’écart de ces confrontations géostratégiques ou si pour éviter d’être privés de l’accès aux investissements des multinationales, seront-ils obligés, d’une manière ou d’une autre, de prendre parti pour l’un ou l’autre camp. Pour dire que très bientôt peut-être, la guerre froide redeviendra une réalité. Et l’une de ses caractéristiques sera la désinformation. Grâce aux réseaux sociaux !

 

Gankama N’Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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