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On reparle de la Côte d'Ivoire

Samedi 20 Octobre 2018 - 18:07

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Comme cela est le cas pour presque tous les pays africains, les élections ne sont pas seulement des moments de renouvellement des élites politiques. Elles peuvent devenir un cauchemar pour la société quand ceux qui sollicitent les suffrages de leurs concitoyens ne retiennent du rapport au scrutin que le fait de gagner une élection et non pas de la perdre et admettre sa défaite. Surtout aussi quand, pour ne pas avoir trouvé un terrain d’entente afin de poursuivre leur aventure ensemble, les alliés d’hier deviennent de pires ennemis.

Après un long chemin parcouru à recoller les morceaux d’une Côte d’Ivoire scarifiée par la crise postélectorale de 2010-2011, à laquelle il faut ajouter une décennie d’atrocités sur fond de querelles identitaires, les acteurs ivoiriens seraient-ils prêts à tout remettre sens dessus-dessous ? Cette question vaut la peine d’être posée au regard des heurts, certes sectoriels mais évidents ayant marqué les élections régionales et locales qui viennent d’avoir lieu ce mois d’octobre. Ils préfigurent que la présidentielle de 2020 pourrait à nouveau raviver les tensions.

Une chose est certaine, le champ politique ivoirien est truffé de rendez-vous manqués entre alliés d’hier mais il n’a pas non plus soldé les rancœurs nourries par le passé politique rappelé plus haut. Cela dessine une carte tellement bigarrée que la présidentielle prochaine, à laquelle le président sortant, Alassane Ouattara, ne devrait pas se présenter, laisse la voie libre à une concurrence qui ne pourrait épargner aucune composante politique de ce pays. La question se pose en ces termes : qui représentera qui à cette élection ?

Jusqu’à un moment récent, en raison de la bonne entente qui les liait depuis la chute de l’ex-président Laurent Gbagbo, on pensait le président Alassane Ouattara et l’ancien président Henri Konan Bédié trancher la question de la candidature de leur mouvance à la présidentielle de 2020. Ils l’envisageaient alors dans le cadre du parti unifié qu’ils ambitionnaient de mettre sur pied à travers la colonne vertébrale RHDP (Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix). Les deux alliés se sont brouillés presque pour de bon aujourd’hui car l’alternance qu’espérait le PDCI (Parti démocratique de Côte d’Ivoire) de Bédié, qui a soutenu à deux reprises le candidat du RDR (Rassemblement des Républicains), Ouattara, n’aura visiblement pas eu lieu.

Ailleurs, parce qu’ils disent ne pas lui trouver un remplaçant dans le moment présent, même s’il est encore retenu à la CPI (Cour pénale internationale) où il est inculpé de crime de guerre, les partisans de Laurent Gbagbo ne pardonnent pas à son ancien proche, Pascal Affi Nguessan, d’avoir engagé le FPI (Front populaire ivoirien) dans la vie politique ivoirienne sous son tombeur Alassane Ouattara. Il y a donc à ce jour à peu près deux FPI. L’aile tenue par les hommes de l’ancien président qui prient pour que son « joker » soit acquitté se console du retour de Simone Gbagbo, l’ex-première dame, qui sans doute, annoncera les couleurs dans les jours et les mois à venir.

Que dire du président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro ? Nul ne peut dire que cet homme qui tutoie les sommets de son pays depuis l’effraction putschiste de 2002 ne veut pas devenir chef d’Etat de Côte d’Ivoire.  De l’épreuve des armes, il est passé par celle des arcanes du pouvoir civil, non sans se rendre compte que sur cette route de l’envie de la magistrature suprême, la liste des candidats embusqués comme lui est longue ; que comme lui également, ses futurs challengers sont aussi en mesure de tenter le tout pour le tout, même de vêtir du treillis pour défendre leur morceau.

Il n’est nullement question de souhaiter un destin à la 2002 et 2010-2011 pour la « Grande » Côte d’Ivoire qui a su s’en relever. Mais peut-être qu’avant l’échéance électorale majeure prochaine, le président Alassane Ouattara se rendra compte que malgré le travail qu’il aura abattu en dix ans, le défi de l’alternance demeurera la pierre angulaire de la consolidation des acquis qui valent à son pays l’admiration de ses voisins et des partenaires extérieurs. Comment va –t-il s’y prendre ? La question reste posée.

Gankama N'Siah

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