Cameroun : la Suisse veut se poser en médiatrice dans la crise du pays

Mardi 29 Octobre 2019 - 12:45

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L’ambassadeur suisse à  Yaoundé, Pietro Lazzeri, s’est entretenu, le 28 octobre, avec le président camerounais, Paul Biya. Leur échange a porté sur la nécessité de trouver une solution durable à la crise qui secoue les régions anglophones.

Le diplomate, porteur à l'occasion d’un message du président de la confédération suisse, a réaffirmé la volonté de son pays d’offrir de bons offices pour la résolution de la crise séparatiste dans la partie anglophone du Cameroun. « L’intérêt de la Suisse est de trouver des solutions négociées dans l’intérêt des populations affectées par la violence », a-t-il indiqué à la presse, ajoutant que son pays a la « neutralité » et « l’expertise » nécessaires pour mener à bien la médiation, qui doit se faire avec « le consentement des parties ».

A titre de rappel, notons que fin juin dernier, la Suisse avait annoncé avoir été « mandatée par une majorité des parties pour faciliter un processus de négociation inclusif » dans la crise anglophone au Cameroun, d’après une source helvétique.

Au plan intérieur, un grand dialogue national avait été convoqué par le président camerounais, notamment du 30 septembre au 4 octobre. Ces assises avaient proposé d’accorder un « statut spécial » aux deux régions anglophones du pays en vue d’une solution durable à la crise déclenchée depuis 2016.

La crise anglophone, dont la Suisse et les autorités camerounaises veulent à tout prix résoudre, a des causes assez lointaines. En effet, après la Première Guerre mondiale, le Cameroun, ancienne colonie allemande, avait été partagé par la Société des nations (ancêtre de l’ONU), entre la France et le Royaume-Uni.

La partie française accéda à l’indépendance en 1960. Un an plus tard, celle sous tutelle britannique (le Nord majoritairement musulman) opta pour son rattachement au Nigeria mais l’une de ses zones se rattacha au Cameroun francophone, pour former une République fédérale à partir du 1er octobre 1961. Douze ans plus tard, soit en 1972, un référendum mit fin au fédéralisme.

Les contestataires demandent le retour au fédéralisme

C’est à partir des années 1990 que les revendications anglophones vont se multiplier en faveur d’un référendum d’indépendance. En 2001, des manifestations interdites lors du 40e anniversaire de l’unification dégénèrent, avec plusieurs morts et des leaders séparatistes arrêtés.

S’il y a eu une sorte d’accalmie depuis lors, il faut dire que des ambitions séparatistes étaient toujours caressées par les originaires des régions anglophones. Résultat : les tensions actuelles ont fini par émerger en novembre 2016, avec les revendications d’enseignants déplorant la nomination de francophones dans les régions anglophones.

Les juristes de la zone rejetaient ouvertement la suprématie du droit romain au détriment de la « Common Law » anglo-saxonne. Dans leurs revendications, la majorité des leaders de la contestation demande un retour au fédéralisme alors que d’autres veulent la création d’un Etat indépendant, l’«Ambazonie ».

La crise anglophone se solde, dès le mois de décembre de la même année, par la mort de premiers civils. D’autres seront tués lors de marches de protestation durement réprimées par la police. Le 17 janvier 2017, plusieurs leaders anglophones sont arrêtés, accusés d’« actes de terrorisme ». Le président Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, lève les poursuites en août.

L’International crisis group estime qu’à ce jour, les affrontements armés, mais aussi les exactions et crimes commis par les deux camps contre les civils, ont fait plus de trois mille morts, et l’ONU note que plus de cinq cent-trente personnes ont dû quitter leur domicile du fait de la crise.

 

 

Nestor N'Gampoula

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