Mali : la manifestation du M5 hausse le ton

Samedi 11 Juillet 2020 - 12:08

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le rassemblement du 10 juillet, aux allures de désobéissance civile, a opposé les contestataires et les forces de l’ordre à Bamako.

La manifestation contre Ibrahim Boubacar Keïta a dégénéré dans la capitale malienne. Plusieurs bâtiments officiels ont été pris d’assaut dont le siège de l’Office de radio-télévision du Mali (ORTM), l’Assemblée nationale ainsi que deux ponts de Bamako. Les forces de l'ordre sont intervenues pour disperser les manifestants. Au moins une personne a été tuée et 19 autres blessées par balles.

Le mouvement du 5 juin (M5), composé d’une partie de la société civile, de l’opposition politique et de religieux, a organisé sa troisième manifestation pour réclamer la démission du chef de l’État, Ibrahim Boubacar Keïta(IBK).

Le rassemblement a commencé après la grande prière du vendredi. Des forces de défense et de sécurité ont été déployées, notamment sur les principaux axes de circulation.

Dans son discours télévisé du 8 juillet, le président de la République, IBK a affirmé que la dissolution de l’Assemblée nationale ne serait pas juste, car elle priverait de leurs sièges tous ceux qui ont été élus sans contestation. Pour se faire entendre, le M5 a appelé à la désobéissance civile sur toute l’étendue de territoire. Un mot d’ordre respecté à Bamako.

Après le rassemblement à la place de l'indépendance, au cours duquel l’un des leaders du M5 a appelé  à occuper la devanture de l’ORTM, la Primature et l’Assemblée nationale, des manifestants ont pris la direction de plusieurs bâtiments publics, dont l'ORTM et le Parlement.

Des actes de vandalisme enregistrés

La cour de l’ORTM a été investie et la télévision nationale a cessé d’émettre, avant que ses programmes ne reprennent dans la soirée. La permanence du député, Karim Kéita, fils du président de la République, a été saccagée. Les manifestants ont également réussi à bloquer deux des trois ponts de la capitale.

Aux alentours de 21 heures, les agitateurs bloquaient encore la circulation, des pneus continuaient de brûler et des barricades avaient été érigées par des jeunes sur l'axe reliant le sud de la ville au centre-ville, où se trouve la cité administrative, le siège de nombreux ministères. Des automobilistes sont restés bloqués à cause des barricades au niveau de nombreux carrefours. En fin de journée, des manifestants interdisaient aussi l’accès à l’aéroport.

Vers minuit, le pont des Martyrs de Bamako était toujours sous le contrôle de jeunes se réclamant du mouvement. Des barricades posées et des pneus brûlés empêchaient les véhicules de circuler.

De source médicale, le bilan était en fin de soirée d’au moins une personne tuée et de nombreux blessés, dont 19 par balles. « Il est difficile de donner un bilan définitif, mais le bilan provisoire est de plusieurs dizaines de blessés, il faut en compter une quarantaine environ », estime Djimé Kanté, secrétaire général adjoint du comité syndical du CHU ,Gabriel Touré. Parmi ces blessés, certains sont dans un état critique. « J’ai vu un jeune dont la main droite a été totalement détruite et d’autres ont des impacts de balles. Ils sont en train d’être pris en charge », at-il ajouté, avant de confirmer qu’il y a bien un mort. « Le corps a été déposé à la morgue de l’hôpital, Gabriel Touré, mort des suites de ses blessures par balles ».

« La mobilisation d’aujourd’hui a été plus forte que celle du 5 et du 19 juin. Et donc nous sommes satisfaits, cela montre que nous sommes en phase avec le peuple », estime Choguel Kokala Maïga, l’un des responsables du mouvement. Et de poursuivre : « La frustration que le peuple malien vit aujourd’hui, dans n’importe quel autre pays, cela aurait donné bien plus de dégâts matériels et humains. C’est grâce à la retenue, au mot d’ordre permanent de conquête pacifique de la dignité de notre peuple que les dégâts ont été limités. Ce qu’il y a eu comme dégâts, c’est la responsabilité du pouvoir. Les manifestants étaient à mains nues. Ils ont pris l’ORTM sans casser un œuf, à l’Assemblée nationale, sans casser un œuf. C’est là-bas que des personnes ont tiré sur la foule et ça c’est la responsabilité du gouvernement. »

Dans un message écrit, le président IBK a regretté « les scènes de violence». Il a également exprimé sa compassion aux familles des victimes.

Pour sortir de la crise politique, l’opposition proposait alors de nommer un nouveau Premier ministre et de dissoudre la nouvelle Assemblée nationale contestée depuis les législatives d’avril. Des propositions qui ne semblent pas à l’ordre du jour à la présidence.

Josiane Mambou Loukoula

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