Consultations politiques : l'Upads fait erreur

Lundi 25 Mai 2015 - 14:58

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En l’espace de trois jours, l’Union panafricaine pour la démocratie sociale (Upads) a rejeté, dans deux actes successifs, l’initiative des consultations politiques engagées par le président de la République, Denis Sassou N’Guesso, en vue de réfléchir à l’avenir des institutions du pays. La principale formation de l’opposition congolaise a, en effet, cosigné, le 19 mai, avec plusieurs partis de l’opposition radicale, la déclaration du Frocad (Front pour le respect de l’ordre constitutionnel et l’alternance démocratique), et rendu public, le 22 mai, un communiqué à l’issue de son propre bureau politique.

Dans l’une comme dans l’autre de ces deux annonces, le moins que l’on puisse dire est que l’Upads a décidé d’abandonner la ligne du dialogue qu’elle s’était imprimée depuis quelques années, lorsqu’elle était parvenue, au terme d’une longue bataille de restructuration interne qui a laissé des traces, à se redonner une posture de parti de gouvernement ainsi qu’elle l’a toujours proclamé. Et si, dans ce cheminement vers la rigidité, le parti de Pascal Lissouba faisait erreur ?

« Imposture », tel est le mot utilisé par l’Upads, à l’issue de la réunion de sa haute instance dirigeante, pour qualifier les consultations en cours depuis le 20 mai, entre le président de la République et plusieurs dirigeants politiques et acteurs de la société civile. Pour ce parti, comme pour la plateforme à laquelle elle appartient, le Frocad, le refus catégorique est l’unique réponse à ces pourparlers, non- contraignantes, il est vrai, qui se déroulent au palais du peuple.

Même lorsque les responsables de l’Upads soulignent dans leur communiqué que le boycott de l’initiative présidentielle ne relèverait pas d’une quelconque « irrévérence » de leur part, ils savent qu’agir ainsi contraste lourdement avec une vision de rassemblement. Rappelons que depuis son congrès (de sortie de crise) de 2006, ce parti a conclu quelques alliances, qui ont toutes périclité lorsque ses partenaires préféraient le repli sur soi à la concertation.

Tel fut notamment le cas lorsque l’Upads signa avec le RDD (Rassemblement pour la démocratie et le développement) et l’UDR-Mwinda (Union pour la démocratie et la République) pour le compte de l’ANR (Alliance pour la nouvelle République), le 11 mai 2007. Alors que ses deux partenaires boycottaient les élections législatives de cette année-là, la formation de Pascal Tsaty Mabiala passait outre cette consigne et présenta ses candidats. Parti d’opposition, elle refusa aussi de rejoindre le FPOC (Front des partis de l’opposition congolaise) constitué dans la perspective de l’élection présidentielle de 2009, et n’émargea pas non plus dans l’autre plateforme de l’opposition formée par les partis signataires de la déclaration du 18 août, qui contestaient les résultats des élections législatives de 2012.

L’Upads a aussi pris part aux concertations politiques d’Ewo, en 2011, à celles de Dolisie, en 2012, évitant de pratiquer la politique de la chaise vide dont ses alliés ont le secret. À la différence de ces derniers, d’ailleurs, elle siège dans les deux chambres du Parlement, l’Assemblée nationale et le Sénat, ainsi que dans les conseils départementaux et municipaux.

Depuis qu’est engagé le débat sur le changement ou non de la Constitution du 20 janvier 2002, la position de l’Upads est connue et se résume au rejet de tout projet de changer la loi fondamentale en vigueur. Comme ce parti, d’autres formations, y compris au sein de la majorité présidentielle expriment, soit leur refus, soit leur prudence vis-à-vis de cette démarche ; d’autres par contre n’y voient aucun mal et se mobilisent pour un tel changement, quittes à en demander la caution au peuple souverain, au moyen d’un référendum. Il y a bien évidemment aussi le fait que les uns, comme les autres, appellent à la tenue d’un dialogue « inclusif », quand bien même, sur ce point, les divergences seraient notables sur les objectifs de celui-ci.

Notons, tout de même, que les consultations entreprises par le président de la République, le 20 mai, qui se poursuivront ce mardi 26 mai et sans doute, mercredi, ne sont pas un appel à la signature d’un quelconque document qui lierait les mains de ses signataires. Entouré de son directeur de cabinet, le ministre d’État Firmin Ayessa, et de son ministre de l’Intérieur, Raymond Zéphirin Mboulou, le président de la République accueille ses hôtes, avec qui il échange à bâtons rompus, sans les engager à signer quoi que ce soit.

Comment dans ses conditions, le principal parti de l’opposition, dont plusieurs responsables siègent au sein des institutions de la République, peut-il, choisir de ne pas adresser la parole de vive voix au chef de l’État ? Comment, en plus, l’Upads peut-elle adresser des menaces à certains de ses dirigeants « qui prendraient part, sous quelque prétexte que ce soit, aux consultations en cours, même à titre individuel » sans faire croire aux observateurs de la scène congolaise que ce que l’on demande avec opiniâtreté à autrui est parfois difficile à réaliser par soi-même ?

Il est entendu que l’opposition, dans son ensemble, salue les sons de cloches divergents au sein de la majorité concernant le changement de la Constitution exprimés librement par certaines formations de cette famille politique. À ce jour, aucun des responsables de ce côté-ci n’a été officiellement menacé de quoi que ce soit. On a l’impression, au regard du radicalisme qui s’empare de l’Upads, notamment sur les pourparlers en cours, avec le président de la République, que le principal représentant de l’opposition congolaise se laisse dicter son discours par des partis, pour la plupart marginaux, qui n’ont pas l’expérience qu’elle a acquise dans la gestion des affaires publiques du temps où elle était au pouvoir, entre 1992 et 1997. Pense-t-elle sans doute, devant le populisme qui caractérise ses alliés que le moment est venu de ratisser large en comptant sur leur apport ? L’Upads ne doit pas oublier que le dialogue a toujours fondé les rapports entre les hommes. En rejeter le principe, en suivant ceux qui n’y trouvent pas d’intérêt presque par habitude peut être une grande erreur.

La rédaction

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