Autour du Lac Tchad se joue un gigantesque drame de survie

Lundi 13 Mars 2017 - 10:20

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Un diplomate italien qui vient de visiter la région souligne que l’ampleur de la catastrophe multiple qui se joue autour du Lac Tchad est sous-évaluée.

Le représentant italien à l’ONU, Inigo Lambertini, a fait partie de la délégation du Conseil de sécurité qui a récemment visité la région du Lac Tchad. Du 1er au 7 mars, une quinzaine de hauts-diplomates ont été dépêchés par l’ONU dans les quatre pays  qui bénéficient des ressources hydriques et halieutiques du plus grand réservoir d’eau de l’espace sahélo-sahélien mais qui s’étiole à vue d’œil. A leur retour à New York les ambassadeurs ont été unanimes à reconnaître que le Tchad, le Cameroun, le Nigéria et le Niger, quatre riverains du Lac Tchad, sont confrontés à une situation critique.

C’est la plus grande crise humanitaire au monde, ont convenu M. Lambertini et ses collègues. Les chiffres de l’ONU sont terrifiants : plus de 17 millions de personnes vivent dans les zones les plus touchées, avec quelque 11 millions d’entre elles nécessitant une assistance humanitaire d’urgence. La crise apparaît encore plus effrayante lorsqu’on visite la zone, affirme M. Lambertini. Une crise dramatique dans toutes ses dimensions, parce qu’elle est à la fois « humanitaire, sociale et sécuritaire », a-t-il souligné.

Ses collègues et lui ont été d’avis qu’il apparaît urgent d’apporter une réponse, elle aussi multiforme, à cette crise sans précédent. Il y faut tout à la fois de l’engagement politique, de l’assistance humanitaire, de la protection des droits humains, de reprise économique et de développement, de respect de la loi et de lutte affirmée contre les financements du terrorisme. C’est-à-dire une mission qui n’est pas à la hauteur d’un seul des quatre Etats impliqués !

L’ambassadeur italien a loué « le grand engagement des jeunes pays de la sous-région dans la lutte contre le terrorisme et les grands pas accomplis pour le rétablissement de la sécurité ». Même si ces avancées se sont faites avec l’appui de la communauté internationale, il faut accentuer le mouvement et apporter plus d’aide. Il a rappelé qu’à la conférence d’Oslo, en février, les donateurs (dont l’Italie) avaient promis une aide humanitaire d’urgence, il s’agit de passer des paroles aux actes.

Cette conférence tenue le 24 février dans la capitale norvégienne avait rassemblé 14 bailleurs de fonds et s’était soldée par la promesse de 672 millions de dollars pour financer l’assistance aux populations rendues vulnérables autour du Lac Tchad. Appauvries et/ou déplacées par les attaques incessantes de la secte islamiste Boko Haram, ces personnes attendent de l’aide. Souvent des agriculteurs, des pasteurs ou des pêcheurs, elles voient aussi s’étioler le Lac Tchad en même temps qu’elles sont cernées par les férocités de Boko Haram, mouvement né au Nigéria mais qui a élargi son rayon d’action à la sous-région.

« Les préoccupations restent élevées à cause de nombreux réseaux de trafics illégaux qui se sont développés dans la région, et pour les liens désormais établis entre Boko Haram et la criminalité transnationale organisée. Chacun de ces trafics, en commençant par celui des êtres humains, appelle une plus grande détermination qui passe aussi par une plus grande perspective englobant le Sahel », a estimé Inigo Lambertini.

Mais cela n’est pas tout, ajoute le diplomate italien. « Il est également essentiel d’accompagner les mesures de sécurité par un plan de développement à long terme, qui consente une existence durable pour les populations de la zone, particulièrement les déplacées, pour faire en sorte qu’elles ne soient pas exploitées par les trafiquants ». Toute cette crise est aussi une conséquence des effets du changement climatique, a-t-il fait observer. En un peu plus de 30 ans, en effet, le Lac Tchad a perdu 90% de son étendue d’eau. La rareté de l’eau, du fourrage pour les bêtes et du poisson : trois autres sources de conflit !

Lucien Mpama

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