Diplomatie : le Comité de haut niveau de l'UA déterminé à ramener la paix en Libye

Lundi 14 Août 2017 - 22:21

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Le Comité de haut niveau de l’Union africaine (UA) pour la Libye que dirige le chef de l’Etat congolais, Denis Sassou N’Guesso, multiplie des démarches pour tenter de résoudre la crise libyenne. Un dénouement appelé de tous les vœux par la communauté internationale au moment où la Libye est encore confrontée à des rivalités politiques et à une insécurité record, six ans après la chute du régime de Mouammar Kadhafi.

 

Au plan continental, la recherche de toute solution à cette crise par le Comité de haut niveau va aboutir dans un futur proche au lancement, au siège de l’UA, d’un dialogue inclusif inter-libyen. Le terrain est déjà préparé et la voie pour y arriver a été balisée depuis le 27 janvier à Brazzaville lors du sommet des chefs d’Etat membres du Comité de haut niveau, et tout dernièrement à la faveur de la réunion du Conseil de paix et de sécurité organisée à Addis-Abeba le 20 juillet.

Cette dernière rencontre a eu le mérite d’identifier les points de convergence et de divergence entre les protagonistes de la crise pour pouvoir mettre en application la feuille de route de la réunion de Brazzaville. L’évaluation de cette situation a conduit le président du Comité de haut niveau à envisager le plus tôt possible la mise en place des comités d’un dialogue et la convocation d’une instance préparatoire, dont le Congo est disposé à abriter la réunion prévue début septembre.

Loin de prétendre résoudre la situation en Libye par un coup de bâton magique, l’UA compte sur l’engagement des Libyens à tourner la page du conflit qui a trop duré. Ce souhait a été maintes fois exprimé par l’ONU, la Ligue arabe et les dirigeants des pays membres de l’UA, dont le président du Comité de haut niveau pour qui, il n’y a pas d’alternative au dialogue. « La solution à la crise libyenne dépend, avant tout, des Libyens eux-mêmes (…), elle ne peut être que politique », avait déclaré Denis Sassou N’Guesso lors du sommet de Brazzaville.

Au cours de la récente réunion du Conseil de paix et de sécurité sur la Libye, le ministre des Affaires étrangères, de la coopération et des Congolais de l’étranger, Jean-Claude Gakosso, est revenu sur la nécessité d’un « engagement de plus en plus affirmé des libyens eux-mêmes en faveur d’un dialogue franc, sincère et inclusif » pour trouver une solution durable à la crise qui divise leur pays.

Une volonté commune de dialogue

Le Comité de haut niveau, chargé de réconcilier les Libyens et de pacifier leur pays, est parvenu au niveau actuel d’apaisement de la situation en Libye et au rapprochement des acteurs en vue d’un dialogue inclusif avec le concours de ses pays voisins, mais aussi grâce à une diplomatie attentive. La mission « d’information et de sensibilisation » conduite par le chef de la diplomatie congolaise du 29 mai au 3 juin à Tripoli, Tobrouk et Benghazi participait de cette volonté.

Cette délégation comprenant les ministres des Affaires étrangères des pays membres du Comité de haut niveau (l’Afrique du Sud, l’Algérie, la Guinée Conakry, la Mauritanie, le Niger, la Tunisie, et le commissaire paix et sécurité de l’UA, Smail Chergui), y avait rencontré les autorités politiques et militaires impliquées dans la crise en Libye. 

Souhaitée par l’organisation panafricaine et les Nations unies à partir d’une feuille de route soumise par le président du Comité de haut niveau, cette mission a été positive dans son ensemble. En témoignent les échanges que la délégation a eus avec les acteurs libyens, dont le Premier ministre libyen, Fayez al-Sarraj, et le Maréchal Khalifa Haftar, chef des autorités basées dans l’est du pays, qui ont affiché une volonté de dialogue en vue de ramener la paix dans leur pays.

La tâche est difficile certes, mais les membres du Comité de haut niveau croient qu’une solution sera trouvée parce que le maréchal Khalifa Haftar, qui est soutenu par la Russie et l’Egypte, a accepté d’être associé aux initiatives de recherche d’une solution pacifique lancées par l’organisation continentale. Ces autorités parallèles disposant d’avions de chasse et de tanks pour leur armée ont de quoi peser sur l’avenir de la Libye puisqu’après avoir participé au dialogue politique libyen parrainé par les Nations unies en décembre 2015, au Maroc, elles sont restées hostiles à l’action du gouvernement d’union nationale. Quant à Fayez al-Sarraj et son exécutif, ils sont soutenus par les Occidentaux et la communauté internationale mais avec une autorité qui ne va pas au-delà de Tripoli. Ces deux pouvoirs rivaux s’accusent mutuellement d’attaques armées dans les territoires qu’ils contrôlent.    

Si les principaux protagonistes libyens sont disposés à dialoguer, ou appellent à l’organisation des élections générales dans leur pays dès mars 2018, l’on doit cette évolution de la situation à une offensive diplomatique ayant favorisé la bonne tenue du sommet du Comité de haut niveau à Brazzaville. En effet, du Caire à Pretoria, en passant par Alger et Tunis, la diplomatie congolaise n’a ménagé aucun effort pour que la réunion de la capitale congolaise sur la Libye soit l’occasion d’engager des démarches consensuelles susceptibles d’aboutir à une solution politique négociée à la crise.

Tous les acteurs sont parties prenantes dans la gestion du dossier

« Nous sommes allés en Egypte, en Tunisie (…), et nous avons échangé avec les autorités. Partout où nous sommes passés, nous avons été bien reçus et le message du président Denis Sassou N’Guesso était bien accueilli », avait assuré Jean Claude Gakosso, rendant compte de sa tournée effectuée dans ces pays. « Il fallait que les acteurs concernés : l’Algérie, le Niger, le Soudan, l’Egypte, la Tunisie soient également parties prenantes dans la démarche », avait-il poursuivi.

Au cours de ces missions, la nécessité de s’attacher à l’accord de Skhirat (Maroc) qui, selon le chef de la diplomatie congolaise « représente une plate forme idoine pour le dialogue entre acteurs libyens », avait été également évoquée, même si l’on a cru apporter des amendements à ce document, conformément aux besoins des Libyens.

Les pays voisins de la Libye ont réaffirmé leur attachement à une solution politique à la crise, puisqu’ils se sont prononcés « en faveur d’un règlement inclusif en Libye » et ont rejeté « le recours à la violence ». De même, ils ont interdit toute mesure visant à entraver le processus de règlement politique de la crise qui prolongerait la souffrance du peuple libyen, particulièrement au niveau économique et humanitaire.

Lors d’une réunion le 6 juin de cette année dans la capitale algérienne, l’Egypte, la Tunisie et l’Algérie avaient mis en garde contre les « retombées de la dégradation de la situation sur la sécurité et la stabilité en Libye et de toute la région ». Ils estiment qu’un tel climat « sert les intérêts des groupes terroristes et leur ouvre la voie pour élargir leurs activités criminelles », étant donné que ce pays est devenu une nation de transit à la fois pour les groupes djihadistes, les trafiquants d’armes et de nombreux migrants qui souhaitent rejoindre l’Europe.

Hors d’Afrique, l’Occident qui avait évincé Mouammar Kadhafi en 2011, mais est resté jusqu’à ce jour en panne de solution concernant la Libye, semble avoir compris qu’il faut relancer l’avenir et le devenir de cet Etat en déliquescence. Avec la France en tête, qui a réussi le 25 juillet à Paris les frères ennemis libyens, les Occidentaux répondent ainsi au souhait maintes fois exprimé par Denis Sassou N’Guesso de voir l’Afrique « se réapproprier ce dossier délicat, afin d’apporter sa contribution à la recherche d’une véritable sortie de crise », non pas pour le gérer seule, mais avec d’autres partenaires.

 

Nestor N'Gampoula

Légendes et crédits photo : 

1- Le ministre des Affaires étrangères s'entretenant avec le Premier ministre libyen Fayez al-Sarraj 2- Jean-Claude Gakosso et le maréchal Khalifa Haftar

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