Adoptions : les familles italiennes rentrent bredouilles de Kinshasa

Jeudi 9 Janvier 2014 - 18:45

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Deux mois d’attente dans la capitale n’ont pas infléchi la fermeté des autorités congolaises : pas d’adoption d’enfants congolais, surtout pas sous la pression

C’est un sentiment de grand découragement qui s’est saisi de toute l’Italie mercredi, lorsqu’il est devenu évident que les autorités de Kinshasa entendaient examiner les dossiers des enfants en adoption à leur rythme. Quelque vingt-quatre familles italiennes avaient fait le déplacement de la République démocratique du Congo fin novembre dans l’espoir d’égayer la période de Noël par la présence d’un nouveau membre dans la famille : un enfant adopté du Congo. Mais ni la longue attente, ni les pressions diplomatiques et cordiales, ni même les événements de violence enregistrés à Kinshasa le 30 décembre n’ont permis d’apporter le dégel espéré.

Kinshasa continue de s’en tenir à son message de toujours et expliqué aux capitales occidentales : des irrégularités dans les adoptions (pas forcément celles concernant les familles d’accueil italiennes) ont  été découvertes ; il faut procéder à un réexamen au cas par cas de l’ensemble des dossiers. L’amitié qui caractérise les rapports entre l’Italie et le Congo font que la situation des familles italiennes trouvera un traitement  rapide en quelques jours. Leurs dossiers seront traités « en priorité et avec amabilité », a assuré le Premier ministre, Augustin Matata-Ponyo, la semaine dernière.

À Rome, les autorités elles-mêmes ne se sont pas croisées les bras. Le Premier ministre, Enrico Letta, avait appelé son homologue congolais en personne. La ministre des Affaires étrangères, la battante Emma Bonino, y était allée aussi de ses amicales pressions diplomatiques. Et, surtout, l’Italie avait dans sa manche, si l’on peut dire, son as de pique : la ministre de l’Intégration, Cécile Kyenge-Kashetu, d’origine congolaise précisément. En novembre dernier, elle était venue à Kinshasa, avait frappé à toutes les portes et reçu la garantie que l’affaire ne traînerait pas. Résultat des courses : rien !

« Les parents rentreront tous comme demandé par les autorités congolaises. Le renouvellement des visas expirés n’a pas été concédé, mais le gouvernement a pris l’engagement d’examiner au plus tôt les documents présentés par les famille italiennes. » : c’est la douche froide déversée malgré elle sur toute une nation mercredi par Mme Cristina Nespoli, présidente d’Enzo B, une des structures italiennes qui s’est le plus dépensée pour ces adoptions. Elle a ajouté, mais tout le monde l’avait compris : « Les autorités congolaises ne veulent plus subir de pression. »

Elle a tenté d’adoucir la potion par une note d’espérance : « Cela ne veut pas dire que des irrégularités ont été trouvées dans les procédures italiennes. C’est seulement que (Kinshasa) ne veut avoir aucun doute et examiner les dossiers dans le calme. Peut-être que la pression excessive n’a pas joué en faveur d’une solution à brève échéance. Dans tous les cas, il n’y a plus rien d’autre à faire que respecter la décision congolaise et attendre avec patience. »

La patience est précisément le mot que les vingt-quatre familles italiennes qui ont déjà commencé à rentrer n’ont plus beaucoup en sympathie : « Franchement, rentrer sans nos enfants représente une défaite politique évidente pour notre pays », écrivait sur les réseaux sociaux Massimo de Toma. Il s’apprête à reprendre l’avion et rejoindre sa ville de Bari sans l’enfant qu’il entendait adopter. « C’est une affaire délicate », s’est limitée à dire Cécile Kyenge, qui est aussi présidente de la Commission des adoptions internationales.

Lucien Mpama