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Marcel Gotène, un autre sacre posthume

Samedi 17 Février 2018 - 18:23

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En prélude à l’exposition qui nous est annoncée à grandes pompes, consacrée à Marcel Gotène, du 20 février  au 19 mai, au Centre  international de conférence de Kintélé,  il paraît difficile de résister à la tentation lisible de revenir sur la vie du maître qui nous a quittés en 2013, mais dont les œuvres qui l’ont rendu éternel confirment sa grandeur et continuent de s’arracher.

Celui dont l’œuvre sera de nouveau célébrée et qui se définissait lui-même de façon énigmatique  comme  « un drôle de type ! », considéré d’autre part par l’écrivain Nicolas Bisseck comme l’un des artistes les plus talentueux d’Afrique subsaharienne, continue  de faire la fierté d’une nation entière et partant d’un continent.  

Rappelons que né en 1939 à Yaba, dans la partie septentrionale du Congo, il découvre Brazzaville dès l’âge de 8 ans, abandonne l’école précocement  et s’adonne très vite à son unique passion, le dessin, en se servant au départ du charbon de bois.

Cette passion le conduit à intégrer, en 1951, l’École de peinture de Poto-Poto, créée par Pierre Lods où, paradoxalement, il considère n’avoir rien appris sauf à explorer sa propre personnalité artistique, tout en demeurant original et reconnaissant tout de même avoir été impressionné par ses prédécesseurs, Zigoma, Thango et Bonguila.

En 1953, première participation  à la foire de Brazzaville et les ventes s’avèrent plutôt bonnes pour l’époque où il gagne 8 000 francs qui lui permettent de s’équiper. En 1954, il se retrouve à Paris pour une exposition consacrée aux gouaches au Cercle de la France d’Outre-Mer. Ce qui constituera son véritable départ, le propulsant au rôle de porte-étendard de la peinture congolaise de l’époque sous la présidence d'Albert Sarrault, alors président de l’Union française.

En 1963, il est invité en France  par le peintre français Jean Lurçat, auprès de qui il apprendra beaucoup avant de regagner son pays natal. Pensionnaire de l’École nationale des arts décoratifs d’Aubusson, en France, il y étudiera la tapisserie.

On se plaît à définir son œuvre à cheval entre le figuratif et l’abstrait. Il crée, entre autres, des personnages, des paysages, des atmosphères au surréalisme inaccoutumé. Son environnement  est dominé par du blanc, bleu, rouge, jaune, noir, vert et d’un peu de marron. Il  a aussi créé des monstres à deux têtes.

Ce fût un personnage contrasté, empreint de violence et de douceur qui a eu à cœur de transcrire cette dualité dans ses œuvres en transmettant un message d’ordre sociologique, politique, religieux ou mystique, illustré par le souci de maintenir l’harmonie entre le minéral, le végétal, l’animal et l’humain toujours en présence de « l’œil qui voit tout », qu’il a symbolisé par des ronds ou ovales, « œil » invitant le spectateur à « ouvrir l’oeil ».

Au cours de sa longue carrière et jusqu’à nos jours, Gotène a exposé et vendu de nombreux tableaux, mais tenait  à ce que l’on garde en mémoire qu’être peintre et vivre de son art ne s’acquiert jamais facilement. Il s’est longtemps considéré comme méprisé par la société, lui qui disait : « Je ne suis pas venu au monde pour changer l’homme, mais j’aime le respect ».

Il a ainsi vécu progressivement le changement du regard de ses contemporains devenu bienveillant, vis-à-vis  de l’art et des artistes, lui qui se considérait comme : « Un grand parmi les grands », se persuadant que la  peinture ne pouvait pas procéder du hasard mais d’une volonté divine.

Ainsi en  a-t-il été de Marcel Gotène, dont les œuvres seront exposées au Centre international de conférence de Kintélé, opportunité pour ceux qui ne l’ont pas connu de discerner son talent d’or à l’état pur qui a bénéficié  de la reconnaissance artistique du monde de l’Art et reçu de nombreux prix et distinctions parmi lesquels:

• Grand Prix public (médaille de Léonard de Vinci) par l’Académie internationale de Lutèce (1972);

• Grand prix France Afrique décerné par la Société internationale de Beaux-Arts (1973);

• Premier prix du président la République du Congo (1979);

• Diplôme d’honneur décerné par l’ambassade de Cuba à Brazzaville (1987);

• Grand prix Agip-Recherches Congo avec la médaille d’argent dédiée à Enrico Mattei (1987);

• Grand prix du président de la République gabonaise (1998).

 

 

 

 

Ferréol Gassackys

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Édition Quotidienne (DB)

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