Lydie Oboa : « La direction générale du Portefeuille public, c’est l’Etat qui est actionnaire »

Vendredi 7 Mars 2014 - 13:40

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Le ministère de l’Économie et des Finances est doté, depuis l’année dernière, d’une nouvelle direction générale, celle du Portefeuille public (DGPP), créée par le décret présidentiel du 30 décembre 2013. Son animatrice, Lydie Oboa, éclaire sur la mission de cet organe technique dans cette interview exclusive aux Dépêches de Brazzaville

Les Dépêches de Brazzaville : Que signifie le « portefeuille public » ?

Lydie Oboa : Le portefeuille public, ce n’est pas de l’argent, ni le patrimoine, ni la caisse. C’est l’ensemble des participations de l’État dans les entreprises. L’État est actionnaire de sociétés commerciales de la même façon qu’il construit les routes, les hôpitaux, les écoles ou qu’il entretient l’armée. L’État n’a pas vocation à gagner de l’argent. Simplement, il peut être amené à faire des affaires pour des raisons d’intérêt public ou stratégique.

LDB : Pouvez-vous donner un exemple ?

L. O. : Par exemple, dans le domaine de l’électricité, l’État intervient pour garantir au plus grand nombre l’accès à l’électricité à un coût tenant compte du pouvoir d’achat des Congolais et garantir ainsi la paix sociale.

LDB : Jusqu’où les attributions du portefeuille public peuvent-elles s’étendre ?

L. O. : Le portefeuille public est où l’État investit. Schématiquement, il s’agit des entreprises publiques, mais également des entreprises à participation publique à l’instar de la Société Générale, dont on a inauguré le siège récemment : elle n’est pas une entreprise publique, mais son capital est détenu pour partie par l’État. En revanche, la Banque congolaise de l’habitat est une entreprise publique parce que la participation de l’État est majoritaire. Il en est ainsi de la Banque postale du Congo, de la Société nationale d’électricité, d’ECair (Equatorial Congo Airline), du port autonome de Pointe-Noire, de la Société nationale de distribution d’eau, du Chemin de fer Congo-océan, des ports, des aéroports, du transport, de la SNPC, etc. La position d’actionnaire donne à l’État le droit de participer au conseil d’administration de cette société et de veiller à ses intérêts dans la gestion de l’entreprise.

LDB : Quel est votre rôle en tant que directrice du portefeuille public ?

L. O. : Schématiquement, il s’agit d’assurer le suivi des performances financières des entreprises dans lesquels l’État investit et de l’application correcte des bonnes règles de gestion par leur dirigeant.

LDB : Existe-t-il un pont entre ce que vous faisiez avant en tant que secrétaire permanente du Haut-Conseil du dialogue public-privé et le poste de directrice générale du portefeuille public ?

L. O. : En théorie non, puisqu’au Haut-Conseil du dialogue public-privé, notre action se focalisait sur l’amélioration du climat des affaires pour permettre le développement du secteur privé et la diversification de l’économie en vue de favoriser l’emploi et la croissance durable. En réalité, il y a une passerelle dans la mesure où on recherche toujours cette dynamique de diversification de l’économie, mais ici, l’industrialisation est amorcée par les entreprises à participation publique.

LDB : Que vous a apporté cette expérience de secrétaire permanente ?

L. O. : Elle m’a convaincue de l’importance de l’une de mes missions, à savoir la création d’entreprise à participation publique. En effet, au Haut-Conseil du dialogue public-privé, j’ai pu me rendre compte que le secteur privé congolais n’était pas aujourd’hui suffisamment outillé pour relever seul le défi de l’industrialisation.

LDB : Quel est le nombre exact d’entreprises à créer ?

L. O. : Aucun objectif n’est assigné dans ces termes à la direction générale du Portefeuille public, car les créations d’entreprises à participation publique sont effectuées de manière ponctuelle pour suppléer au secteur privé et garantir l’emploi avant que le privé ne prenne le relai. Toutefois, en 2013, la DGPP a travaillé à la création d’une vingtaine d’entreprises qui, compte tenu d’un certain nombre de paramètres, ne verront le jour qu’en 2014. Pour rappel, lorsque l’État ne dispose pas de compétence, il recourt à des partenaires techniques qui l’accompagnent dans la mise en exploitation de ces entreprises et en même temps forment les Congolais qui sont appelés à y travailler.

LDB : Peut-on dire que l’État a pris la relève parce qu’il considère qu’il n’y a pas d’opérateurs économiques au Congo ?

L. O. : Non, il ne faut pas exagérer. Il existe des opérateurs économiques et nous avons tous intérêt à ce qu’il y en ait. De toute façon, l’industrialisation ne peut se faire qu’avec des entreprises. Et les entreprises, ce sont les entrepreneurs, donc l’initiative privée. Simplement, l’État doit accompagner les privés. Il y a beaucoup de facteurs qui peuvent faire aujourd’hui que l’initiative privée est un petit peu bridée. Mais cela ne veut pas dire qu’elle n’existe pas. Elle a juste besoin d’être redynamisée. L’emploi se trouve dans les entreprises et non plus dans la Fonction publique.

LDB : Depuis la création de cette direction, qu’est-ce qui y a déjà été réalisé ?

L. O. : À côté de la participation à la création des entreprises qui verront le jour en 2014, le recensement des entreprises publiques et l’évaluation de leurs performances financières, nous avons été amenés, par exemple, à participer à la conclusion du contrat de service entre la société française Électricité de France et la Société nationale d’électricité.

LDB : Travaillez- vous de concert avec la Commission nationale des investissements ?

L. O. : En fait, la Commission nationale des investissements s’adresse généralement aux entreprises privées qui souhaitent bénéficier des avantages de la Charte nationale d’investissement. Ces entreprises privées sont déjà constituées. La DGPP se situe en amont, c’est-à-dire à la création des sociétés. Enfin, la DGPP ne se concentre que sur les entreprises à participation publique.

Nancy France Loutoumba

Légendes et crédits photo : 

Photo 1: Lydie Oboa, l'animatrice de la direction générale du Portefeuille public, (© Adiac). Photo 2 : L'immeuble abritant la DGPP (© Adiac).