Couleurs de chez nous : Brazza, la verte ? Brazza, les veillées.

Jeudi 13 Décembre 2018 - 20:41

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Vous avez dit « Brazza la verte » ? En effet, la capitale congolaise s’était vu attribuer cette appellation en raison de la verdure qui la surplombait et la domine jusqu’à ce jour.

Pourtant, ce décor a cédé la place à un autre : celle des veillées qui donnent une tout autre image à la ville. Laquelle ? Celle des fêtes continues et continuelles. D’où cet étonnement d’un étranger arrivé nouvellement à Brazzaville qui ne comprenait pas comment les habitants de cette ville surfaient avec délectation et détachement sur la mort. Notre étranger ne comprenait pas comment, au lieu de pleurer ou d’afficher la tristesse, les Brazzavillois qu’il a vus sur un lieu de deuil étaient tout contents et dignes d’eux.

Bière, sandwichs et divers coupe-faim sont des signes qui interpellent autant que cet habillement ostentatoire qui s’accommode bien des carnavals ou de retrouvailles mondaines. Telle est, à ce jour, l’image de Brazzaville. Et derrière la capitale : c’est l’ensemble de nos villes, localités et villages qui sont concernés.

Quid de nos us et coutumes qui prônent la consternation, le recueillement et le respect devant chaque décès ? Quid de cette tradition séculaire qui veut que le mort reste sacré ? Plutôt que de s’interroger sur le taux élevé de décès dans notre cité et sur, souvent, les causes inconnues, les Congolais semblent se complaire d’un phénomène, certes naturel, mais qui leur soutire les leurs.

« Un tel est mort ! » ; « X vient de nous quitter alors qu’on devait se voir chez lui… » ; « Y a été retrouvé mort dans sa voiture ! », Bref ! Autant de messages que s’échangent désormais les Congolais à longueur de journées. Des messages qui les laissent froids. Car, sans pause, les voilà vite repartis dans leur besogne : boire, manger et danser.

Un comportement nouveau autant que l’est le déploiement des banderoles qui annoncent lesdits décès avec des messages de cette « famille éplorée » exprimant ses « regrets éternels » et souhaitant « un repos en paix de l’âme ». Mais que voit-on ? La même famille s’arrange, durant les obsèques, à les troubler par des bagarres, disputes, vols, règlements de comptes et diverses obscénités servies.

C’est le cas de ce corps que l’on promène de maison en maison ou de rue en rue avec l’argument avancé et peu convaincant du « mort qui dit adieu aux siens ». Et sans hésitation, les siens lui renvoient ce qu’il faisait de son vivant : aspersion du cercueil avec de la bière ; pleurs feints, danse improvisée, etc. Il faut voir comment les vendeuses au marché célèbrent la mort d’une des leurs. Des « rituels d’aujourd’hui » !

En passant pieds joints sur l’impact de ces veillées sur le fonctionnement des administrations (publiques surtout), des interrogations s’imposent sur cette société en décomposition et qui voit ses valeurs disparaître. Ici, le mort est désormais perçu comme un vulgaire « objet » et la mort une occasion de s’épandre. Faut-il laisser le navire continuer de tanguer ? Où es-tu Puissance publique ? A vous philosophes et sociologues d’entrer en scène !

 

Van Francis Ntaloubi

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