Littérature : Ali Zamir remporte le prix roman France Télévisions 2019

Vendredi 15 Mars 2019 - 12:14

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L’auteur comorien a été distingué pour "Dérangé que je suis", son troisième roman, publié aux éditions du Tripode. Un choix audacieux du jury, pour un livre à part, qui l’a emporté avec neuf voix dès le premier tour du scrutin.

Le roman d’Ali Zamir a été choisi par un jury de téléspectateurs parmi les six romans sélectionnés par un jury de professionnels. « Dérangé que je suis » raconte l’histoire d’un docker pauvre qui travaille chaque jour comme il peut pour se nourrir. Mais un matin, alors qu’il s’est mis à la recherche d’un nouveau client, Dérangé croise le chemin d’une femme si éblouissante qu’elle « ravage tout sur son passage ». Engagé par cette femme dans un défi insensé qui l’oppose au Pipipi (trio maléfique des trois dockers Pirate, Pistolet et Pitié), le pauvre homme va voir son existence totalement chamboulée.

Avec ce troisième roman, Ali Zamir confirme la place très originale qu’il occupe dans la littérature francophone, son don pour les récits incongrus et l’usage de mots rares. Son écriture est éblouissante, imagée, truculente. Son usage des mots rares qui, dans son texte ne sont pas incongrus, déplacés mais donne un petit plus. Dans ce roman, l’auteur passe du rire aux larmes, de la tragédie au comique avec une grande tendresse dans ses mots.

Avec Ali Zamir, né en 1987 aux Comores, la littérature francophone s’est bien trouvé un nouveau Pagnol sur une île de l’océan Indien, un auteur à l’invention verbale subtile.

Le jury sous le charme du roman d’Ali Zamir

Après un petit tour de table des présentations, les jurés sont invités par le président du jury, François Busnel, à défendre leurs choix. Et ils commencent tous par le même geste : plonger sous la table pour attraper dans leur sac le livre qu’ils ont préféré. Tous ont apporté avec eux leur choix. La couverture colorée du livre d’Ali Zamir, très vite, occupe le devant de la scène. « Pour moi l’objet livre est très important, et celui-là est vraiment beau, la couverture, la présentation », se lance Barbara. « Et puis j’ai adoré la richesse du vocabulaire, regardez ! », dit-elle en montrant son exemplaire, sur lequel elle a noté : « j'ai appris plein de nouveaux mots ». « Moi aussi, j'ai aimé tous ces mots oubliés », ajoute Sybil.

« Alors moi j’ai fait une pile avec les livres en mettant au-dessus celui que j’avais le moins envie de lire. Et c’était celui d’Ali Zamir. Et en fait, passées les seize premières pages, qui m’ont un peu désarçonnée, je l’ai lu d’un trait. C’est un livre qui m’a prise par surprise. C’est un livre à la fois lyrique et poétique, et je me suis beaucoup attachée au personnage, candide, qui pose sur le monde un regard d’enfant. J’ai été impressionnée par la richesse du langage et par la capacité du romancier à sauter du drame au comique. Il est fort parce que s’il était resté dans le registre dramatique, cela aurait été insupportable, mais là il nous met dans sa poche », poursuit-elle.

Fabrice, un juré, qualifie ce roman d’ « OVNI littéraire ». « Ça ne ressemble à rien de ce que j'ai pu lire jusqu’ici. Je me suis entendu éclater de rire. C’est vraiment un écrivain à découvrir, qui dépote ! », souligne-t-il. « Quand j’ai fini le livre, je me suis dit, c’est déjà fini ! J'aurais voulu que ça continue », poursuit-il. « Il est jeune, il est Comorien, et il s'est réapproprié la langue française de manière extraordinaire », conclut Fabrice.

Sans grande surprise, "Dérangé que je suis", d’Ali Zamir, est élu avec neuf voix dès le premier tour. « C’est assez rare », relève François Busnel, qui confie avoir trouvé les jurés 2019 particulièrement « curieux, sincères et vifs ». « Ils ont défendu leur livre avec des arguments très forts. Et ils ont fait un choix audacieux, avec cette envie de défendre un auteur peu connu, et une petite maison d’édition », ajoute-t-il. « Ils ont évité tous les pièges d’un jury de lecteurs. C’est l’instinct et l’émotion qui ont primé sur l’analyse ou l’éloquence, et c’est pour cette raison aussi qu’ils ont fait ce choix sincère et audacieux », se réjouit le président du jury.

Rappelons qu’Ali Zamir a remporté en 2016 le Prix Senghor pour son roman "Anguille sous roche" paru en septembre 2016 aux éditions du Tripode. La même année, il a obtenu la mention spéciale du jury du « Prix Wepler », le Prix des Rencontres à Lire 2017 de Dax et le Prix Mandela de littérature pour le même roman qui parlait des naufragés en mer sans assistance qui résonne avec les nombreux drames de notre actualité quotidienne.

 

 

Boris Kharl Ebaka

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