Italie : des affiches jugées racistes retirées des salles de cinéma

Samedi 28 Décembre 2013 - 7:07

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Avant sa projection, 12 Years a Slave pâtit d’une mauvaise publicité

Il n’est pas banal qu’un film à grand budget soit jugé non sur son contenu mais sur sa présentation. En Italie, 12 Years a Slave émeut plus la critique par sa « com » que par son message. Car le film en soi n’a rien de répréhensible. Il raconte l’histoire d’un violoniste afro-américain de talent (Chiwetel Ejiofor) avant la guerre de sécession américaine. Parfaitement intégré avec femme et enfants, l’artiste sera berné par un faux impresario blanc qui le fait déporter sur les champs de coton du sud où il devient esclave.

Adaptée de l’autobiographie de Solomon Northup, réalisée par Steve McQueen et produite par Brad Pitt, acteur américain de talent, l'histoire nous replonge dans les affres d’une époque, finalement pas très lointaine, où, aux États-Unis, la couleur de peau déterminait aussi la place à occuper dans la société et les mérites dont on pouvait, a priori, être parés qu’on le veuille ou non.

C’est donc un film tout sauf raciste, au contraire ! Mais ce message a été brouillé en Italie parce que sur les affiches, l’acteur principal, le Britannique d’origine nigériane Chiwetel Ejiofor, est relégué en fond d’image au profit de Brad Pitt et des acteurs blancs. Erreur de communication ou politique commerciale ouvertement raciste ? Le débat enfle. La société productrice des posters de lancement, la Lionsgate, se démarque tout de suite.

« Les posters de 12 Years a Slave représentant Brad Pitt et Michael Fassbender récemment publiés en Italie n'étaient pas autorisés ni validés par les producteurs ou les propriétaires du film », explique Summit Entertainment, filiale de Lionsgate. Plusieurs observateurs ont estimé que le distributeur italien du film, BMI, cherchait seulement à attirer les spectateurs avec des acteurs plus connus que Chiwetel Ejiofor, mais d'autres y ont vu une démarche raciste.

« Je ne me souviens pas que Brad Pitt soit le personnage principal du film ou ait un rôle à tel point central qu'il doive être au milieu du poster », « Je ne connais rien aux stratégies de marketing destinées à attirer les spectateurs, mais est-ce que ça ne va pas un peu trop loin ? », écrit la blogueuse italienne Carefree Black Girl. L'acteur-réalisateur David Eng observe : « Les concepteurs des posters ne sont peut-être pas racistes, mais ils pensent que tous les Italiens le sont. »

Résultat des courses, les posters incriminés ont été retirés devant les principales salles de cinéma de la péninsule. De son côté, Lionsgate précise dans un communiqué que « Summit, vendeur exclusif du film aux distributeurs, est en train d'enquêter et a pris des mesures immédiates pour arrêter la distribution de tout poster non autorisé et faire retirer ceux déjà en place. » Une triste affaire qui commence tristement : cela va-t-il faire du tort à un récit aussi poignant ? On le verra en mars lors de la cérémonie des Oscars aux États-Unis.

Lucien Mpama