Lampedusa plus que jamais symbole, veut tirer les leçons du passé

Mardi 4 Mars 2014 - 14:59

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Les projets se multiplient autour de la petite île italienne devenue synonyme de drame de l’immigration clandestine

Un projet de maraîchage urbain, conduit par les immigrés sur la ville de Lampedusa, a été présenté lundi dernier à Rome. Pour l’occasion, le maire de la capitale italienne, Ignazio Marino, et celle de la ville de Lampedusa, Mme Giusi Nicolini, ont tous deux lancé une opération de collecte de fonds pour soutenir ce projet. Lampedusa, où ont péri plus de 360 immigrants clandestins le 3 octobre 2013, est devenue une localité-symbole. C’est pourquoi les institutionnels, les associations et les regroupements de la diaspora veulent en faire le porte-étendard d’une politique qui doit changer.

« Nous devons absolument revoir notre manière d’accueillir les migrants. Si nous devions continuer à les enfermer dans des centres de regroupement où même moi suis tenue de demander l’autorisation pour y accéder, il est clair que nous n’y parviendrons pas », a déclaré Mme Giusi Nicolini, connue pour son combat pour rendre un peu de dignité aux nombreuses personnes, de toutes provenances, qui sont « de passage » dans sa ville de Lampedusa. Elle milite, comme l’ex-ministre de l’Intégration, Cécile Kyenge Kashetu, avant elle, pour la fermeture de ces centres de transit.

Les clandestins y sont entassés avant leur expulsion vers les pays de provenance ou l’examen de leurs demandes éventuelles quand ils sont des requérants d’asile. « Lampedusa ne peut être considérée comme la périphérie, mais la porte de l’Europe. La présidence du conseil (le gouvernement italien, Ndlr) devra donc s’engager davantage durant la présidence semestrielle italienne de l’Union européenne pour que l’immigration devienne un thème central », a renchéri le maire de la ville de Rome, Ignazio Marino.

Pour l’heure, les signaux qui viennent des autorités à Rome sont assez contrastés. Installé il y a à peine deux semaines, le gouvernement de Matteo Renzi n’a pas encore suffisamment donné à voir la politique qu’il entend suivre en matière d’immigration. La ministre de l’Intégration dans l’équipe précédente, l’Italo-Congolaise Cécile Kyenge Kashetu, n’a pas été reconduite dans le nouveau gouvernement. Aucun ministère ou secrétariat d’État ne semble se rapprocher le moins du monde des thèmes au centre de l’action de l’ex-ministre, mais tout le monde espère que M. Renzi, homme de gauche, saura trouver l’accent pour affronter les questions liées au thème de l’immigration. Pour l’heure, a indiqué la maire de Lampedusa, le Premier ministre ne l’a pas encore rencontrée. Mais, soutient fermement Giusi Nicolini, même au sein de l’Europe, l’Italie doit présenter une politique novatrice en matière d’accueil des immigrés.

L’Europe, précisément, a répondu lundi. Le président de son Parlement, le socialiste allemand Martin Schulz (qui vint même s’incliner devant la mémoire des morts à Lampedusa), a réaffirmé que c’est aux États membres qu’il faut attribuer la responsabilité de ces nombreux morts, pas à l’Union Européenne. « C’est le manque de volonté d’intervenir des États membres, de reconnaître une fois pour toutes que l’Europe est un continent de destination de l’immigration, et le manque d’une politique commune sur l’immigration » qui expliquent les nombreux drames qui sont à déplorer dans des petites communes comme Lampedusa, estime-t-il.

En attendant, le procès entamé à Agrigente contre les organisateurs de l’équipée du 3 octobre dernier, qui avait abouti au naufrage de l’embarcation des immigrants clandestins faisant plus de 360 morts, se poursuit. Un Somalien, qui était au timon du vieux bateau, est poursuivi pour divers délits ; un Tunisien devrait le rejoindre à la barre pour la même affaire. Lampedusa, devenue un symbole, a donné naissance à une ‘Charte de Lampedusa’ sur les droits des immigrés. Des associations ont décidé que la date du 3 octobre sera celle de la « Journée de l’Accueil ». Lundi, l’UE et la Tunisie ont signé un accord sur une simplification des visas et une plus grande ouverture à l'immigration régulière en échange de la lutte contre l'immigration clandestine, à l'image de ce qui se fait déjà avec le Maroc.

Lucien Mpama