Il y a un an, un certain Benoît XVI…

Lundi 10 Février 2014 - 19:18

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Retiré volontaire de l’administration de l’Église, le vieux théologien allemand vit dans la discrétion au Vatican où cohabitent deux papes !

Cela va faire très exactement un an que l’Église catholique a vécu, en direct, un événement d’une rareté absolue : la démission volontaire d’un pape ! Le 11 février de l’an dernier en effet, alors qu’il avait convoqué des cardinaux au Vatican pour ce qui s’annonçait comme une réunion de routine, Joseph Ratzinger, le théologien allemand monté à la papauté avec le nom de Benoît XVI, annonçait au monde médusé que son âge ne lui permettait pas de continuer à assumer les charges de pape acceptées, un peu en hésitant, à la mort de Jean-Paul II en 2005.

Les historiens qui se ruèrent sur les archives vaticanes et autres, ne purent y dégoter un exemple similaire où un pape soit allé aussi loin dans une telle décision : se mettre volontairement hors des ors et des lambris pour céder la place à un plus jeune. Celui-ci, on le sait, c’est l’Argentin Giorgio Bergoglio, le pape François. Mais depuis le 11 février, et surtout depuis le 28 du même mois, lorsque les Romains virent dans le ciel de leur belle ville un hélicoptère aux couleurs du Vatican emporter l’ex-pape vers sa retraite provisoire de Castel Gandolfo, les hypothèses sont allées bon train.

Quelles furent les réelles raisons du renoncement (terme officiel avalisé par le Vatican) de Benoît XVI ? L’âge, vraiment ? Et à chacun d’y aller de sa petite théorie. Les uns pour affirmer que 86 ans, l’âge de l’ancien pape à l’époque, fait vraiment un peu jeune pour une retraite en matière de papauté. Les autres soutenant que même en montant sur la cathèdre de Saint-Pierre à Rome, l’Allemand avait son idée arrêtée et que tel le petit poucet, il n’avait jamais cessé depuis de semer ses petits cailloux dans les interviews ou dans les écrits. D’autres encore pensent que les pressions à l’intérieur du Vatican, le scandale de la pédophilie des prêtres, avaient fini par venir à bout de la détermination de « monsieur Propre » de l’Allemand.

Le directeur du journal du Vatican, L’Osservatore Romano, Giovanni Maria Vian, balaie toutes ces supputations : « S'il y a une chose que cet homme aimable et paisible n'accepte pas c'est de prendre une décision dictée par des pressions extérieures. » Mais il concède que « l'affaire des prêtres pédophiles a été pour lui (…) lourde à supporter ». La mafia italienne inquiète de son intéressement aux comptes de la Banque du Vatican, des jeux d’influence au sein de la Curie romaine, ont également été évoqués pour expliquer la décision de l’ancien pape…

Que ce soient ces causes-là ou d’autres, le fait est que Benoît XVI s’est retiré volontairement et vit muré dans le silence au Vatican, non loin de là où vit son successeur. Il n’a brisé son vœu de silence et d’isolement qu’en de rares occasions : pour répliquer – par courrier - à un intellectuel athée italien, le mathématicien Piergiorgio Odifreddi, qui l’avait « titillé » dans un livre très critique contre l’Église catholique ; et pour répondre brièvement au journal allemand Bild : « Je vais bien ».

Le Père Federico Lombardi, porte-parole du Saint-Siège, expliquait lundi que Benoît XVI mène une tranquille vie « de prière, de réflexion, de lecture, d'écriture au sens où il répond à la correspondance qu'il reçoit, de discussions, de rencontres avec des personnes qui lui sont proches, qu'il rencontre volontiers, avec qui il juge utile d'avoir un dialogue, qui lui demandent des conseils ou une proximité spirituelle ». Parmi les personnes rencontrées, il y a son successeur le pape François, qui expliquait qu’avec lui au Vatican, c’était « comme d’avoir un grand-père à la maison ». Pour le père Lombardi, Benoît XVI continue de lui donner « une impression de grande sérénité spirituelle ».

En tout cas il n’y a pas eu, en un an, un seul couac. Jamais, pour désireux qu’il soit de remuer le cocotier de la hiérarchie catholique, le pape François n’a eu à prendre des décisions qui le placent en opposition frontale avec son « grand-père ». Mais le secrétaire particulier du pape allemand, Mgr Georg Gänswein, résume les choses dans le pur style feutré du Vatican : « La relation est bonne même s'il ne partage pas forcément toutes ses initiatives. » Benoît XVI s’en tient donc au cadre qu’il s’était volontairement tracé et n’entend pas en sortir : « Je vis comme un moine, je prie et je lis, je vais bien », avait dit l’ancien pape dans les propos rapportés par Bild en juin.

Lucien Mpama