Interview. Jean-Claude Gakosso: '' Le plus important entre le Congo et la France est la volonté d'entretenir une excellente relation"
Jean-Claude Gakosso (J-C.G.) : Permettez-moi de vous informer qu’avant de venir à Paris, je suis allé d’abord en Chine où j’ai eu une séance de travail avec mon homologue Wang Yi. Une mission à Paris, cela s’inscrit dans la routine de nos concertations permanentes. De ce fait, avant toute chose, il est important de rappeler que dans le métier qui est le nôtre, il relève de la routine de sillonner les pays à chaque fois que cela l’exige. En cas d’espèce, le métier de diplomate nécessite de venir exercer une concertation dans le cadre de nos relations avec la France, avec laquelle nous avons une relation économique, politique, intellectuelle, culturelle, dans tous les domaines, y compris celui de la paix. S’agissant de la paix, nous devons à chaque fois, par tous les moyens et en toutes circonstances, la rechercher, recourir aux moyens les plus adaptés à mettre en place en vue de la résolution des conflits, dans la mésintelligence qui peut subvenir entre deux États, deux gouvernements, trouver les meilleures solutions pacifiques possibles. Entre la France et la République du Congo, chacun sait que c’est une longue histoire d’amour. De ce fait, nul n’a intérêt, que ce soit la France ou la République du Congo, à ce que s’ouvre la brèche de dégradation d’une telle relation, très ancienne, précieuse, sans aucune raison de la laisser se détériorer. Nous sommes ici, à Paris, pour consolider nos convergences avec la France, pour gommer les aspérités puisque cela ne manque jamais dans les relations entre les États et entre les individus. Cela nécessite, avec mon homologue français Jean-Noël Barrot, de remettre les choses sur le droit chemin. Entretemps, il y a eu des paroles, des mots. Tout cela est derrière nous. Désormais, le plus important est notre volonté de renouveler et d’entretenir une excellente relation entre la République du Congo et la France. L.D.B : De par l’actualité, la France est en conflit avec l’Algérie. Peut-on voir là presque un aspect similaire de la recherche d’un apaisement ? J-C.G. : Non, pas du tout ! Vous savez, à proprement parler, l’État congolais en tant que tel n’a pas de problème avec le gouvernement français. Nous déplorons simplement ces questions judiciaires qui portent préjudice aux relations entre nos deux États. Après l’incident suscité suite à l’épisode judiciaire autour de la première dame de la République du Congo, en respect du travail de la justice, le travail qu’il nous est demandé d’accomplir, à mon homologue français et moi-même, en s’appuyant sur la Convention de Vienne et après avoir reçu les instructions du président Denis Sassou N’Guesso, consiste à travailler au point de revisiter l’accord judiciaire signé en 1974, ratifié et entériné par le Parlement congolais en 1975, 50 ans après. Ce que l’on a pu comprendre un demi-siècle plus tard, à l’époque où le pays s’appelait République populaire du Congo, ne peut plus être valable aujourd’hui. Ce texte de l’époque, non seulement ne donne plus beaucoup d’égard à la souveraineté des États mais n’accorde pas non plus davantage d’égards aussi au principe de droit de l'autorité de la chose jugée qui peut être définie comme une force exceptionnelle conférée par la loi aux décisions juridictionnelles qui, une fois prononcées, bénéficient du principe de l'immutabilité interdisant de remettre en cause ce qui a été définitivement jugé. Il me semble que les jugements déjà prononcés à Brazzaville ne sont pas du tout considérés en France. Cela constitue un imbroglio judiciaire duquel nous devons sortir. Quoiqu’il en soit, sauf changement aux agendas présidentiels respectifs, nous avons également abordé la mission d’État du président de la République prévue courant le mois de mai prochain. L.D.B. : Vous êtes également en charge des Congolais de l’étranger. Vos compatriotes en France affirment une appartenance double en mettant en avant des destins uniques, des racines multiples et des perspectives communes ici et là-bas. Que prévoyez-vous afin que la diplomatie établisse des ponts par le biais de la coopération décentralisée ? J-C.G. : Pour les Congolais de l’étranger, l’idée du président de la République est d’exprimer la solidarité avec les enfants de la patrie, établir un lien qui ne se rompt jamais avec les enfants disséminés à travers la planète avec la matrice République du Congo, la terre sacrée de nos ancêtres, et que ceux-ci travaillent et participent au développement de leur pays d’origine, à l’image des ressortissants du Sénégal, de l’Ethiopie. À terme, que ces Congolais se prononcent aux divers scrutins et soient représentés au sein de notre Assemblée nationale. Qu’ils soient capables de vénérer la terre de leurs ancêtres, quelles que soient leurs convictions, car rien ne peut être au-dessus de ce qu’elle représente, la terre de ses ancêtres, à laquelle ils ne doivent pas tourner le dos, même s’ils ont souvent l’occasion de griefs à avoir vis-à-vis des gouvernants. Quand ils arrivent au pays, la Maison commune demeure le ministère des Affaires étrangères par le biais du département mis en place pour eux. L.D.B. : À juste titre, comment la diplomatie congolaise se déploie-t-elle au niveau international pour promouvoir sa candidature présentée à la direction générale de l’Unesco ? Une équipe de campagne a-t-elle été constituée ? Quel est le budget alloué ? J-C.G. : D’emblée, je vous confirme que la République du Congo présente à cette élection un candidat réellement compétent, un cadre valeureux et recevable, qui a passé l’essentiel de ses années d’activité professionnelle au sein de cette institution onusienne, et en conséquence nourri de la bonne culture internationale. Le président de la République, Denis Sassou N’Guesso, a donné les instructions pour que le gouvernement congolais soutienne sa candidature. Nous nous y employons et essayons de rallier à notre cause les gouvernements des pays amis et au-delà. J’ai abordé cette question avec Jean-Noël Barrot. Reconnaissons néanmoins qu’une élection reste une compétition, avec sa part de certitudes comme d’aléas, car vous n’êtes pas sans ignorer que, comme on le voit dans des élections au sein des Nations unies, à l’Union africaine, un pays prend parfois l’engagement de voter dans un sens et, au moment décisif du vote, on constate que c’est un autre vote qui s’exprime. En ce qui nous concerne, nous allons nous battre jusqu’au bout, jusqu’à ce que notre cause soit entendue, c’est-à-dire la victoire de notre candidat. Le jeu est ouvert ; c’est ce que nous pouvons dire à ce stade. Propos recueillis par Marie Alfred Ngoma Légendes et crédits photo :1-Jean-Claude Gakosso reçu par son homologue français, Jean-Noël Barrot, au Quai D'Orsay/ Adiac
2- Point presse du ministre Jean-Claude Gakosso à l'ambassade du Congo en France/ Adiac |