Les Dépêches de Brazzaville



Lire ou relire : « L’homme ! Ce moustique sous les tropiques » de Pierre Ntsemou


De l’art de Montaigne à celui de La Fontaine, le poète congolais Pierre Ntsemou consacre sa dixième publication au culte de l’amitié, de la fraternité et de la solidarité dans le bien. Le bonheur de l’humain et la vertu sont l’horizon vers lequel s’engage le poète. Pour lui, « l’amitié est la plus belle chose au monde/ Faisons-en toujours une graine féconde » (p.28). C’est avec de tel aphorisme qu’il déploie une sagesse salomonique puisée dans les pensées de son expérience quotidienne. L’expérience d’une vie longuement vécue à travers moult périples géographiques, culturels et intérieurs. Ainsi, tous les poèmes de ce recueil sont datés et marquent par conséquent le ressentir de l’auteur par rapport à la société, se présentant comme ce « jardinier de bon fruit à servir à tous » (p.30).

Il montre sa reconnaissance à sa mère (p.40) et à son père (p.165) avec beaucoup de nostalgie. Dédie quelques textes à d’autres observateurs de la vie publique dont Sirtinalea Nishka, Alexis Bongo, Armand Boueya, Gaëtan Ngoua et Gaétan Mbama le préfacier de ce volume. A côté de ses intimes, le poète exalte la vocation de l’instituteur (p.72) qui offre la première initiation à la langue de Molière, avec toute sa sublimité. S’opposant toutefois à la médiocrité en prônant les valeurs du travail, de l’humilité et de la patience par des titres comme « le fruit de la brouette scolaire » (p.36), « la cancrelature » (p. 156), « le bonheur dépend de l’heure » (p.127). « Le travail est la seule prison où les détenus sont heureux », écrit-il.

L’auteur est, par ailleurs, chantre de l’unité nationale et de la paix pour le Congo, sa patrie (pages 43, 46, 66, 115…) comme en témoigne cet extrait :

« Nous sommes du même clan des Humains/ Nous sommes du même sang des Terriens/ (…) Que cesse la religion de Bango/ Que cesse l’hymne de Kaka Beto/ Que cesse la question tu es d’où ?/ Que cesse le cri t’es pas de chez nous !/ Le Congo d’hier dont je suis fier/ Etait une leçon d’une seule matière/ Enseignée au Mbongui/ LA CONGOLAISE/ Ebongui mpe esengeli/ En cette terre de glaise/ Beto vanda na kintouadi/ C’est là mon Congo/ De Boko à Impfondo/ De Ouesso à Komongo/ De Diosso à Owando/ De Leketi à Sibiti/ de Nianga à Liranga/ De Djambala à Kinkala/ De Madingou à Dongou/ De Ngabe à Kelle…/ De Divenié à Enyéllé » (p.44).

Le cœur du poète se dilate pour l’Afrique entière à travers des textes comme « Et si l’Afrique surprenait » (p. 246), puis loue le geste altruiste des médecins cubains qui ont apporté leur aide aux malades de Covid en Europe, un exemple à retenir pour éviter tout préjugé réducteur de certains Etats ou peuples. A propos du sens du titre du livre, le poète considère l’homme comme ce moustique à la vie éphémère qui paye parfois un lourd tribut au nom d’une espèce réputée pernicieuse, alors que ce ne sont pas tous les moustiques qui sont vecteurs de maladie.    


Aubin Banzouzi

Légendes et crédits photo : 

Photo: Couverture de l'ouvrage