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La presse écrite au Congo

Vendredi 22 Novembre 2013 - 0:04

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Dans la foulée de sa création, le Mouvement congolais pour la démocratie et le développement intégral se dote d’un organe d’information dénommé Le Soleil, astre, symbole du logo du parti de Bernard Kolélas et, plus tard, du Conseil national des républicains du pasteur Ntumi. Mi-soleil pour le premier, plein soleil pour le second. Là aussi, tout un symbole. Comprenne qui pourra.

Le premier numéro du journal Le Soleil paraît le 13 janvier 1991, un mois quasiment avant le début de la Conférence nationale souveraine (25 février de la même année). J. Bongo, professeur de philosophie reconverti dans le journalisme, en est le directeur de la publication et non directeur de publication, comme on le lit de nos jours.

La Conférence nationale a vu débouler de nombreux journalistes, dont certains, peu en vérité, ont pu s’affirmer dans la profession. Les problèmes que connaît la presse écrite congolaise, notamment, sont en grande partie dus à cette entrée massive de gens peu outillés. Il s’ensuit donc, depuis plus d’une vingtaine d’années, de multiples entorses au plan éthique et déontologique, voire au niveau de l’écriture. Sous certains cieux, de nombreux titres, sur décision politique ou de justice, auraient déjà fermé boutique. C’est bien de cela qu’il s’agit, vendre du papier à tout prix et à tous les coups.

Tous les coups semblent alors permis, avec des titres racoleurs, sans rapport avec le contenu. Ce n’est donc pas sans raison qu’un habitué des attaques infondées affirme : « Pour ces journalistes approximatifs, la liberté de mentir, d’inventer, de faire passer pour vrai ce qui est faux » est véritablement un fonds de commerce. Pour eux, la dépénalisation des délits de presse au Congo est pain bénit. Faisant fi des règles élémentaires, ils injurient, diffament sans le moindre état d’âme. Vérité, fous le camp ! Mensonges et affabulations, de la une à la dernière page. La grossièreté n’est pas le sceau de la critique. On peut être corrosif et intelligent, critique et subtil. Je le reconnais, c’est, à l’évidence, un exercice délicat et difficile pour certains. À cause de leurs sorties de route répétées, ces moutons noirs de la profession clouent au pilori toute la presse écrite congolaise.

Il faut remettre de l’ordre, en commençant par un véritable toilettage de la loi sur la presse. À trop copier mécaniquement ce qui se fait ailleurs, on se retrouve piégé. Il faut acclimater certains concepts sans préjudice pour leur esprit. Avec cette loi, au nom de la liberté de la presse, tout le monde peut créer un journal. C’est laxiste, véritablement. Il y a vingt ans, dans l’euphorie de la liberté de parole retrouvée, tous ceux qui le voulaient pouvaient créer un journal. Vingt ans après, d’autres normes doivent être édictées. Par exemple, être un professionnel reconnu avec quelques années d’expérience. Une telle stipulation pourrait servir de filtre à l’entrée dans la profession, un gatekeeper, en quelque sorte. Il faudra, dans le même esprit, renforcer par une loi l’Observatoire congolais des médias, qui pourrait plus efficacement jouer le rôle de contrôleur de la profession. Jusqu’à présent, ses avis ne sont que consultatifs et non péremptoires et non contraignants. C’est toute la profession qui gagnerait ainsi de l’assainissement de son milieu. Dans d’autres pays existent des observatoires de la déontologie de l’information.

Dans cette gangue de médiocrité, quelques titres surnagent. Heureusement. Mais il en faut certainement plus pour redorer le blason terni du journalisme au Congo, qui a le malheur de concentrer tous les maux : absence de moyens (matériels, financiers et humains), inexistence des aides publiques à la presse, faiblesse des tirages, misère de ceux qui font office de journalistes. Au surplus, les pouvoirs publics traînent le pas dans l’institutionnalisation des aides de l’État à la presse. Pendant ce temps, dans ce sens, la presse attend toujours ce projet ou cette proposition de loi qui tarde à venir. Il est peut-être temps que quelqu’un y pense.

Mfumu

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Édition Quotidienne (DB)

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