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Partis politiques : l’épreuve de conformité à la loi

Samedi 6 Février 2016 - 12:30

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Le 3 février dernier, dans une salle de conférence de la préfecture de Brazzaville affichant comble, le ministre de l’Intérieur et de la décentralisation, Raymond Zéphirin Mboulou, s’était donné rendez-vous avec les dirigeants des partis, groupements et associations politiques pour parler de la mise en place de la Commission nationale électorale indépendante (Cnei). Annoncé lors du Conseil des ministres du 24 décembre 2015, cet organe attendu par tous pour rendre consensuelle l’organisation des élections au Congo a été institué au terme d’une loi promulguée, le 23 janvier, par le chef de l’Etat après son adoption par l’Assemblée nationale et le Sénat.

Un décret présidentiel signé, le 1er février, définit l’organisation, le fonctionnement et la désignation des membres de la Cnei. De portée générale évidemment, ce décret doit être consolidé par la nomination des personnes chargées d’animer la structure ; des personnes dûment désignées par les partis et associations qui concourent à l’expression du suffrage universel comme l’indique la loi. On a appris que ces derniers traînent les pieds pour choisir les hommes et les femmes qui devront les représenter dans les différentes instances de la Cnei. D’où l’appel lancé en leur direction par Raymond Zéphirin Mboulou : «  Si, au plus tard, lundi 8 février, les propositions de noms ne parviennent pas au ministère de l’Intérieur, je reconduirai sans autre recours les fonctionnaires qui exercent jusqu’alors au sein de la Commission nationale d’organisation des élections. » A bon entendeur !

Dans un second avertissement, le ministre de l’Intérieur et de la décentralisation a presque chatouillé ses interlocuteurs. Sur le point précis, disons sensible, de la conformité des partis politiques à la loi qui les institue. Telles qu’elles naissent, grandissent, et disparaissent, le cycle de vie des formations politiques congolaises est une véritable incertitude. Il serait, en effet, difficile de dire qu’elles  remplissent les conditions édictées par la loi n°21-2006, du 21 août 2006, qui en organise les activités. Prenons le cas de l’article 9 de cette loi, qui stipule : «  Les partis politiques, outre le siège national, doivent avoir des membres et des sièges permanents dans tous les départements ». Prions ensemble de bonne foi et restons mesuré sur leur nombre exact pour dire que sur la centaine de partis de l’aréopage congolais on trouverait moins d’une demi-dizaine pour revendiquer une telle performance.  

Comme s’ils savaient ses invités pris à leur propre jeu, le ministre leur rappelait que tous les partis politiques impliqués dans le processus électoral devraient pouvoir être représentés dans les 111 circonscriptions répertoriées sur le territoire national. Ceci pourrait-être une raison valable de mieux veiller sur les scrutins à venir, et donc minimiser les risques de contestation souvent violente des résultats électoraux. Et le ministre d’enfoncer le clou en indiquant que la loi n’autorise pas le « parachutage » de délégués dans telle ou telle circonscription. En clair, si un parti X n’est implanté en tout et pour tout que dans la localité Y, il ne pourrait pas désigner son militant de cette localité Y pour le représenter dans la circonscription électorale de la ville Z. Raymond Zéphirin Mboulou en profitait alors pour demander aux partis dont l’application de la loi pourrait fragiliser l’existence de faire comme des entreprises en crise : « Alors regroupez-vous, au risque de disparaître ! ».

Il n’est pas certain que le ministre de l’Intérieur soit suivi sur cette voie. L’absence de compétitivité des partis politiques congolais sur le territoire national est un problème profond. On ne sait pas s’il ne tire pas sa source du peu d’engagement d’une classe politique abonnée au repli sur soi de ses principaux animateurs. Parce qu’ils n’arrivent pas à se remettre en cause, parce qu’ils ne parviendront pas facilement à créer des structures à cheval sur les douze départements du pays, parce qu’ils n’auront pas les ressorts fédérateurs démocratiques nécessaires pour se regrouper. En attendant, la loi risque de frapper avec rigueur. Dans une certaine mesure, pour tenter d’aseptiser un environnement politique par trop confus.

 

 

 

 

 

 

 

 

Gankama N’Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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