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La langue maternelle, vecteur de paix et d’amitié ?

Lundi 24 Février 2014 - 0:20

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Une fois de plus, l’Unesco nous invite à célébrer une expression de la diversité culturelle à travers une journée mondiale. En l’occurrence, il s’agit de définir les apports inestimables de la langue maternelle dans notre universalité culturelle. En effet, depuis 1999 l’Unesco a déclaré le 21 février Journée internationale de la langue maternelle, ce qui nous permet à chaque célébration, mais surtout chaque jour, de mettre en relief la contribution incontestable, mais différemment perçue de cette dernière au développement socio-humain. Cette année, le thème retenu est « Citoyenneté et langue maternelle ».

Dans certains pays, les départements de l’Éducation nationale envisagent l’introduction des langues maternelles en classe et l’on a même procédé à des phases expérimentales pour évaluer des méthodes appropriées d’introduction. La langue maternelle, assimilée très souvent à langue natale, faut-il le rappeler, désigne la première langue qu’un enfant apprend, d’où la confusion souvent faite entre les deux. Dans les domaines de la linguistique et de l’éducation, la langue natale, elle, se définit comme le premier moyen d’expression acquis pendant l’enfance, l’expression d’une identité ; la langue maternelle, quant à elle, reflète plus souvent la filiation à une tradition particulière et se définit comme l’expression d’une culture.

On oppose également la langue maternelle, qui fait l’objet d’un enseignement que ce soit à l’école ou la maison, à la langue vernaculaire, qui s’acquiert par mimétisme. La langue maternelle doit être est considérée bien plus qu’un droit culturel, car elle permet d’apprendre et de comprendre, de s’exprimer sans grande difficulté dans d’autres langues, tandis que la langue nationale permet de revendiquer une nationalité. Souvent apprise aisément, sans même avoir suivi le moindre cours, la langue maternelle permet de parcourir des espaces géographiques sans que la communication soit un frein majeur.

Donc, conserver les langues maternelles, le parler régional, dans le monde entier pour mieux comprendre son voisin doit être compris comme un vecteur de paix et d’amitié, une vraie lutte contre les guerres. Combien de fois cette nette différence langagière n’a-t-elle pas envenimé les conflits, notamment dans les pays du tiers monde ou en Europe de l’Est ? Comprendre et parler la langue maternelle de l’autre permet de se mettre plus aisément à sa place. La date du 21 février est retenue également en signe du sacrifice de cinq étudiants de Dacca qui en 1952 donnèrent leur vie afin que le bangla soit nommé langue officielle dans ce qui était à l’époque le Pakistan oriental, et qui est devenu le Bangladesh après la guerre de libération.

Une culture de paix ne peut se construire que dans un espace où tout le monde a le droit d’utiliser sa langue maternelle pleinement et librement dans toutes les différentes circonstances de la vie, et le théâtre est l’expression culturelle par excellence en mesure d’amplifier cette nécessité. En effet, une résolution de l’Unesco affirme que « la reconnaissance et le respect pour la diversité culturelle dans le domaine du langage inspirent une solidarité basée sur la compréhension, la tolérance et le dialogue, et toute action qui favorise l’utilisation des langues maternelles sert non seulement à encourager la diversité linguistique et l’éducation multilingue, mais nous sensibilise davantage à la multiplicité des traditions linguistiques et culturelles dans le monde. »

Ainsi le théâtre s’exprime-t-il dans toute sa plénitude dans cette tâche à l’image de la pièce de Hamlet de Shakespeare qui se joue à travers le territoire congolais et dans des langues maternelles diverses, ce qui permet de partager le caractère unique de chaque culture, dont la langue est un vecteur essentiel.

Ferréol-Constant-Patrick Gassackys

Edition: 

Édition Quotidienne (DB)

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