Activité forestière : le Trésor public n’aurait collecté que 10% des revenus du secteur en 2012

Lundi 28 Octobre 2013 - 18:30

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L’organisation britannique Global Witness a publié, le 28 octobre, une nouvelle enquête faisant état des « pertes massives causées par l’évasion fiscale et la pléthore d’arrangements fiscaux illégaux ».

Dans son rapport intitulé « Les forêts de RDC victimes d’une grande braderie; évasion fiscale arrangements illégaux : 90% des taxes absentes des caisses publiques », l’organisation a fait état de pertes de l’ordre de 90% en 2012. Cette estimation est tirée des dispositions de la loi en vigueur en RDC, a-t-elle confirmé. Au regard de la loi congolaise, Global Witness a rappelé l’obligation faite aux compagnies forestières de s’acquitter d’une taxe sur la superficie fixée à 0,50 dollars américains par hectare. Selon elle, il faut comprendre qu’il s'agit déjà d’un montant « extrêmement faible et malgré cela, non acquitté ».

Cette investigation a permis à Global Witness d’aller plus loin, en présentant même une estimation chiffrée des pertes enregistrées par l’État congolais. « Entre 2011 et 2012, les compagnies forestières ont privé les populations congolaises d’un revenu de 11 millions de dollars américains ». Et ceci n’est que le début des abus, a lancé l’analyste spécialisé en politique forestière de l’organisation, Reiner Tegtmeyer. Ce dernier a insisté sur les conséquences socioéconomiques inévitables car, a-t-il affirmé, des millions de Congolais dépendent de ces richesses précieuses pour leur survie. Il y va aussi, a-t-il ajouté, de l’équilibre de la planète. Enfin, il a appelé aussi à « une révision profonde du modèle industriel de concession des forêts tropicales ».

Le rapport a pointé un doigt accusateur en direction des agents du ministère en charge des forêts. Ceux-ci auraient facilité l’évasion fiscale et les arrangements illégaux en autorisant l’industrie forestière à contourner les lois congolaises. Au-delà du manque à gagner pour l’État, les populations riveraines sont privées des retombées économiques et financières concrètes, en contrepartie de l’abattage de leurs forêts. En effet, l’action de ces populations sur les forêts congolaises est plus dévastatrice que l’exploitation industrielle. D’où l'intérêt porté sur l’effectivité de cette contrepartie pour éviter une recrudescence de l'exploitation sauvage. Or, a noté l’organisation, des décennies de faible gouvernance et de législation inadéquates ont permis aux compagnies forestières d’exploiter les forêts, sans aucun impact sur les communautés.

« La RDC est le deuxième pays forestier au monde et abrite 40 millions de personnes qui dépendent de ces forêts pour générer des revenus, s’alimenter, construire des matériaux et pour leur santé ». Sur un ton critique, Reiner Tegtmeyer s’est dit préoccupé par la corruption et les pratiques de mauvaise gestion. Ces deux fléaux permettent aux exploitants de contourner les paiements déjà très bas. « Tout est fait à la faveur des exploitants. Le gouvernement et les bailleurs de fonds se doivent de réagir, confirmant le fait que l’industrie forestière à grande échelle n’est pas la solution pour répondre aux besoins de développement du pays ». L’idéal serait aujourd’hui de réfléchir sur d’autres modèles alternatifs de gestion des forêts qui associent de manière directe les communautés forestières et la société civile. Mais bien entendu, tout devra être fait dans le strict respect de la préservation des forêts et de sa biodiversité. Il faut aujourd’hui expérimenter d’autres modèles durables de développement.

Laurent Essolomwa