Arts plastiques. Jean Wilfried Djaha : « Les arts, ça paye, il faut toujours y croire »

Jeudi 4 Avril 2019 - 17:55

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L’artiste plasticien d’origine ivoirienne expose pour la première fois en solo, du 2 au 30 avril, à l’Institut français du Congo (IFC), sur le thème « Souffle et immigration », dans le cadre du Festival international du livre et des arts francophones.

Willy Djaha utilise des techniques et matériaux non conventionnels pour peindre ses toiles comme la fibre de laine, le fil à coudre, du collage des cartons, les coupures de presse, le polyester et des filets de pêche. Il s’inspire des scènes de la vie quotidienne. Son œuvre frappe par la richesse des mouvements fluctuants, les contrastes et la matérialité de la vie. Parmi les toiles exposées dans le hall de l’IFC, on peut citer le tableau « Mort anonyme » qui traduit la condition difficile que certains migrants vivent. 

« Après la traversée, ils se retrouvent séquestrés dans les lieux qu’ils ne connaissent pas, et avec un peu de chance, ils s’en sortent; certains restent simplement, ils meurent sans qu’on ne le sache », a-t-il indiqué, ajoutant: « Cette exposition se tient grâce à la directrice adjointe de l’IFC, Marie Audigier, qui avait aimé le travail que j’avais présenté lors de mon premier passage à la Rencontre internationale des arts contemporains, organisée par les ateliers Sahm en 2018. Elle a voulu que je puisse faire découvrir mon savoir-faire au public ».

La traite des Noirs en Libye, la traversée de la méditerranée, l’exil politique sont, entre autres, les toiles les plus patentes. Dans ses œuvres, Jean Wilfried Djaha crée un mélange optique dans l’œil de l’observateur avec des différents fils de couleur. « L’observateur joue un très rôle dans la lecture de l’œuvre. Mon art plait aux plus jeunes et aux plus âgés, ces derniers s’interrogent sur ma façon de travailler et les matériaux utilisés. Toute cette interrogation me pousse aujourd’hui à pouvoir continuer parce qu’une œuvre en elle-même n’est pas finie et tant qu’on s’interroge pas, l’œuvre n’est pas encore aboutie à mon sens », a-t-il fait savoir.

Les jeunes doivent croire en eux

De même, l’artiste a expliqué que le choix de ses matériaux découle d’une situation qu’il avait constatée à l’école des beaux –arts d’Abidjan. Il fallait, a-t-il dit, produire des œuvres pour le passage de fin d’année. La peinture à l’acrylique, à huile et pastel coûte un peu cher. « À cette période, la bourse ne passait pas, c’est ainsi que j’ai opté pour les fils parce que j’avais un sujet que je devrais traiter "La pêche artisanale", il fallait chercher un matériau à propos.  C’est lors d’une promenade dans un marché que j’ai découvert ces fibres-là, et je me suis rendu compte qu’il y avait des fibres de plusieurs couleurs. Je me suis dit pourquoi ne pas utiliser ces couleurs puis les intégrer dans une œuvre.  Tout est parti de là, aujourd’hui la peinture n’est que couleur », a révélé l’artiste.

Il a, par ailleurs, exhorté les jeunes à croire en ce qu’ils font, les arts étant pour tout le monde. « Dans notre vie commune, on pratique de l’art sans le savoir, l’art fait voyager.  Il ne faut pas se limiter seulement en ce que l’on connaît. On peut être un PDG d’une société et pratiquer la peinture. Les arts, ça paye, il faut toujours y croire », a-t-il signifié.    

Né d’un père artiste, professeur de musique, le plasticien Willy a commencé à peindre depuis 2007. « Le déclic a commencé depuis le bas âge avec plusieurs sonorités que j’avais l’habitude d’entendre, lorsque mon père prenait sa guitare. C’est ce voyage en quelque sorte que je cultivais sans que je me rende compte. Mon père avait déjà trouvé en moi du talent  que je pouvais aller loin et  il m’a encouragé sur ce chemin. Contrairement  aux autres pères qui  se disaient que les arts plastiques ne payent pas, mon père a cru en moi et, après mon brevet, il m’a incité d’aller à l’école des beaux-arts », a-t-il expliqué. 

Notons que Willy Djaha est aussi enseignant en art au lycée moderne d’Agboville, dans la région du sud de la Côte d’Ivoire, où il perfectionne sa technique en peinture. Lauréat de la septième édition de Rencontre internationale d’art contemporain de 2018, l’artiste participe souvent aux expositions collectives. Ses œuvres ont été déjà présentées à l’exposition Couleur d’immigration en France.

Rosalie Bindika

Légendes et crédits photo : 

Photo : L’artiste posant devant sa toile Photo : Les œuvres de Willy Djaha exposées à l'IFC

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